«D'après l'Observatoire national de la délinquance, 157 femmes sont mortes sous les coups de leur conjoint l'année dernière, ce qui représente 20 % des meurtres commis dans notre pays. » Il y a donc « urgence » à éradiquer ce fléau, a déclaré Xavier Darcos, ministre chargé de la Famille et de la Solidarité, qui réunissait le 25 novembre, à l'occasion de la Journée internationale de l'élimination de la violence à l'égard des femmes, la Commission nationale de lutte contre les violences faites aux femmes. Le même jour, le Premier ministre a annoncé un ensemble de mesures visant à donner une « nouvelle impulsion » au plan de lutte 2008-2010 (1), mesures qui reprennent pour partie les propositions de la chancellerie et de Valérie Létard, lorsqu'elle était secrétaire d'Etat à la solidarité.
Avant toute chose, François Fillon a décidé d'attribuer à la lutte contre les violences faites aux femmes le label « Grande cause nationale pour 2010 ». Dans ce cadre, le seul ministère de Xavier Darcos y consacrera un budget de 1,5 million d'euros.
Pour protéger les victimes, le ministère de la Justice devrait présenter en conseil des ministres, d'ici à la mi-décembre, un projet de loi visant à adapter notre droit à l'évolution du phénomène des violences conjugales. Ce texte pourrait être examiné par le Parlement « d'ici à la fin de l'année » et s'appliquer « avant l'été 2010, si toutefois les parlementaires travaillent à un rythme suffisant », a indiqué le Premier ministre. Ce projet prévoit, entre autres, de créer un « régime juridique de référé-protection » permettant de saisir en urgence le juge aux affaires familiales pour interdire au conjoint violent d'entrer en contact ou de séjourner à proximité de sa victime. Une démarche qui interviendra donc en amont ou indépendamment de tout dépôt de plainte. Le gouvernement veut en outre étendre aux concubins et aux pacsés la mesure d'éviction du domicile conjugal en cas de violence avérée, qui ne s'applique pour l'heure qu'aux époux. Autre mesure annoncée : l'inscription dans le code pénal d'un délit de violence psychologique au sein du couple, ce qui permettra de « prendre en compte les situations les plus sournoises, [des] situations qui ne laissent pas de traces à l'oeil nu, mais qui mutilent l'être intérieur des victimes », a expliqué François Fillon.
En outre, afin de mieux prévenir la récidive des auteurs de violences, la garde des Sceaux a lancé le 23 novembre, à Bobigny (Seine-Saint-Denis), une expérimentation de téléphones portables d'urgence qui vont être attribués à une vingtaine de victimes « en très grand danger ». A compter de 2010, sera également testé sur les conjoints violents un dispositif de surveillance électronique pour s'assurer qu'ils respectent bien la mesure d'éviction du domicile conjugal prononcée à leur encontre. Selon le Premier ministre, le placement sous surveillance électronique pourra être décidé au titre d'une alternative aux poursuites ou d'un aménagement des modalités d'exécution de la peine. Lancée dans « deux, voire trois départements », d'après la secrétaire d'Etat à la famille interviewée le 25 novembre par France Info, cette initiative bénéficiera d'un budget de cinq millions d'euros. Nadine Morano a également indiqué vouloir expérimenter un « téléphone portable d'urgence sociale », qui devrait permettre « un suivi plus poussé des femmes victimes de violence que le téléphone d'urgence lancé en Seine-Saint-Senis » et « notamment un soutien téléphonique par un psychologue dans des situations de détresse ». La secrétaire d'Etat a par ailleurs précisé en conseil des ministres que la prise en charge des auteurs de violences conjugales serait améliorée « grâce à un recensement des dispositifs existants et à une labellisation des structures intervenant dans ce champ ».
Autre objectif poursuivi par le gouvernement : dispenser une formation « systématique » aux professionnels susceptibles d'intervenir dans le cadre d'affaires de violences conjugales. Enfin, des actions de sensibilisation et d'information sur les violences faites aux femmes vont être entreprises, notamment en direction des étrangers primo-arrivants. Une nouvelle campagne de communication, intitulée « Les enfants apprennent beaucoup de leurs parents, y compris les violences conjugales » (2), a été lancée dès le 25 novembre sur les chaînes de télévision partenaires.
(2) Consultable sur