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Le Conseil d'Etat valide sept des huit marchés publics d'assistance aux étrangers placés en rétention

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La bataille juridique qui oppose, depuis un an, le ministère de l'Immigration et la Cimade sur la réforme de l'intervention associative en centre de rétention administrative (CRA) pourrait bien avoir connu son ultime épisode. Dans une décision du 16 novembre, le Conseil d'Etat a, en effet, décidé de ne pas suspendre cinq des six contrats signés par Eric Besson avec les associations qui se sont portées candidates pour se partager la mission d'assistance aux étrangers placés dans les CRA (sur les réactions associatives, voir ce numéro, page 25). Seul contrat torpillé par la Haute Juridiction, en raison d'un « doute sérieux » sur sa validité : celui qui confiait au Collectif Respect l'aide aux étrangers dans les centres d'outre-mer. Les marchés publics d'assistance juridique confiés à la Cimade, l'Assfam (Association service social familial migrants), Forum réfugiés, France terre d'asile et l'Ordre de Malte France peuvent en revanche être exécutés.

Un feuilleton aux multiples rebondissements

Pour bien comprendre ce nouveau rebondissement, il convient de rappeler les épisodes précédents. La Cimade était, avant la réforme, la seule association à disposer du droit d'entrer dans les CRA. Le ministère de l'Immigration a voulu changer la donne en engageant une procédure d'attribution d'un marché divisé en huit « lots », ayant pour objet la fourniture de prestations pour les étrangers maintenus en rétention. L'idée étant, pour chaque lot, de confier à une personne morale sélectionnée ces différentes prestations. Six associations se sont portées candidates, dont la Cimade et le mystérieux Collectif Respect, créé par un ancien chargé de mission au ministère de l'Immigration et inconnu dans le domaine du droit des étrangers tant en métropole qu'en outremer. Eric Besson a réparti entre elles les différents lots et les marchés correspondant à ces lots ont été signés. Quatre associations - la Cimade, l'Association des avocats pour la défense du droit des étrangers (ADDE), le groupe d'information et de soutien aux immigrés (GISTI) et l'association des avocats membres du réseau Elena France - ont alors demandé et obtenu le 30 mai dernier, du juge des référés du tribunal administratif de Paris, la suspension de l'exécution des marchés. Principal grief retenu par le juge : en ne prévoyant « qu'une simple mission d'information auprès des étrangers retenus sans imposer une assistance juridique », le marché litigieux ne permettait pas, à ses yeux, de garantir l'exercice effectif des droits des intéressés. En outre, il y avait, selon lui, un doute sérieux quant à la légalité du marché conclu en raison du manque d'expérience du Collectif Respect (1). Ce dernier s'est donc joint à Eric Besson pour contester cette décision devant le Conseil d'Etat.

Constatant une irrégularité dans les mentions du jugement, la Haute Juridiction a, d'emblée, annulé l'ordonnance du juge des référés. Conformément au code de justice administrative, elle était censée, en effet, mentionner que l'audience avait été publique. Or elle ne comportait pas cette mention.

Passé ce premier camouflet pour les associations requérantes, le Conseil d'Etat s'est prononcé à son tour, en tant que juge des référés, sur la demande de suspension de l'exécution des marchés. Il a tout d'abord écarté les demandes formulées par ADDE, Elena France et le GISTI, qui ne s'étaient pas portés candidats et n'apportaient aucun élément justifiant qu'ils auraient pu être candidats. Or seuls les candidats évincés de l'attribution d'un marché sont recevables à en contester la validité. Il a en revanche examiné la demande de la Cimade, attributaire de trois lots mais candidate sur l'ensemble des huit lots du marché... et donc recevable à contester les cinq lots pour lesquels elle n'avait pas été retenue.

Le Collectif Respect, seul recalé

Au final, le Conseil d'Etat n'a fait droit qu'à une seule des demandes de suspension formées par la Cimade : celle visant le lot attribué au Collectif Respect. Il a tout d'abord rappelé que, en vertu des règles posées dans le code de l'entrée et du séjour des étrangers et de l'asile, la convention passée entre le ministre de l'Immigration et les personnes morales sélectionnées doit porter non seulement sur l'information mais aussi sur l'accueil et le soutien des étrangers, pour permettre l'exercice effectif de leurs droits. De plus, l'Etat ne peut conclure une telle convention qu'avec des personnes morales présentant des garanties d'indépendance et de compétences suffisantes, notamment sur le plan juridique et social, pour assurer le bon accomplissement de ces missions d'accueil, de soutien et d'information prévues par la loi. Or s'agissant du lot attribué à l'association controversée, deux moyens étaient, aux yeux des juges, de nature à faire naître un doute sérieux sur la validité du contrat. En premier lieu, le marché ne portait que sur des prestations d'information et n'était donc pas conforme aux dispositions du code, puisque ni les différentes pièces de l'avis d'appel public (cahier des clauses administratives générales, cahier des clauses techniques particulières), ni l'offre technique de l'association ne faisaient apparaître de prestations d'accueil et de soutien. Par ailleurs, le Collectif Respect n'ayant fait valoir au soutien de sa candidature que deux missions ponctuelles dans le domaine considéré, n'employant pas de salariés et ne disposant que de moyens matériels et financiers très limités, il ne justifiait pas des capacités techniques, professionnelles et financières, ni des garanties d'indépendance et de compétences lui permettant d'assurer l'exécution du marché.

Les différents moyens soulevés à l'encontre des autres lots ont, en revanche, été écartés et leur exécution n'a donc pas été suspendue.

[Conseil d'Etat, 16 novembre 2009, n° 328826.328974, Ministère de l'Immigration et Association Collectif Respect c/Cimade, Gisti et autres, disponible sur www.conseil-etat.fr]
Notes

(1) Voir ASH n° 2612 du 5-06-09, p. 21 et 26.

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