ITINÉRAIRE D'UNE ENFANT REBELLE. La vie d'Albertine Sarrazin a inspiré Mona Heftre. En rassemblant les journaux, poésies et correspondances de cette auteure hors normes, l'actrice a monté un monologue sobre et intense. Pour elle, Albertine est une héroïne, un personnage et un grand écrivain. Elevée par ses parents adoptifs dans un milieu bourgeois, elle est placée, à 15 ans, en maison de correction, à Marseille. Le jour du baccalauréat, la jeune rebelle s'enfuit du lycée et rejoint Paris en auto-stop. Là, elle n'en fait qu'à sa tête, se prostituant par goût pour l'argent - « Un acte sans importance si on le fait sans amour » -, chapardant dans les magasins - « Le vol, c'est comme Noël » - et s'acoquinant avec des gens du milieu - « Auprès d'eux, j'apprends à vivre ». Avec les premiers billets gagnés, celle qui commença à écrire dès l'âge de 12 ans s'achète les oeuvres de Rimbaud. Mais elle prend de plus en plus de risques. Un braquage de trop, en 1954, et elle est arrêtée. Elle n'a que 17 ans. Ses parents mènent alors une procédure rarissime, en révoquant leur adoption plénière. Condamnée à sept années de détention à la prison-école de Doullens (Somme), il ne faut à Albertine que quelques mois pour prendre la clé des champs. Lors de son évasion, elle se brise un os du pied, l'astragale - ce qui va lui inspirer le titre de son premier roman. Julien Sarrazin, un petit malfrat, la ramasse sur le bord de la route, la cache et l'épouse. Ils sont tous deux repris en 1958. Suivent des peines de prison plus ou moins longues pour vols ou usage de faux papiers. En 1964, elle est enfin publiée : L'astragale et La cavale, récits autobiographiques, sont des succès... Trois ans plus tard, à 29 ans, usée par l'alcool, le tabac et sa vie chaotique, elle meurt des suites d'une opération du rein mal préparée. Une histoire exceptionnelle, donc, servie par la prestance de la comédienne et par les images d'archives en noir et blanc. Un bémol, toutefois : un tel destin n'aurait-il pas mérité une mise en scène plus dynamique ?
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Albertine Sarrazin - Théâtre Les Déchargeurs - 3, rue des Déchargeurs - 75001 Paris - Jusqu'au 19 décembre - Du mardi au samedi, à 20 h - 75 min - 10 € et 22 €