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Chronique d'une destruction annoncée

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Voilà trente ans, la cité Olivier-de-Serres, à Villeurbanne, était démolie, dans un contexte politique de stigmatisation de l'immigration.

Le quartier Olivier-de-Serres, à Villeurbanne (Rhône), fut démoli entre 1978 et 1984, mais la « cité-ghetto » reste toujours très présente dans les mémoires. Répartis sur un terrain de 2 400 m2, 6 barres de 8 étages, 336 logements, 71 garages... La cité a été construite hâtivement à la fin des années 1950 pour les rapatriés d'Algérie. Très vite, des conflits éclatent entre le propriétaire - la régie Simon - et les rapatriés, car les charges sont trop élevées et la cité n'est pas entretenue. Progressivement, les immigrés d'Algérie, du Maroc et de Tunisie remplacent les pieds-noirs. En 1977, sur 200 familles logées, 95 % sont d'origine maghrébine, une concentration qui ne facilite pas le désenclavement du quartier. Le mot « ghetto » est employé pour qualifier Olivier-de-Serres dès 1975. Le cabinet du maire de Villeurbanne enregistre un nombre croissant de lettres et de pétitions du voisinage contre les occupants de la cité : « jeunes », « délinquants », « nord-africains », « une invasion », écrivent certains. La disparition des barres est alors l'un des principaux thèmes de la campagne du candidat socialiste Charles Hernu lors des élections municipales de 1977. Elu, il en fait une priorité de son mandat. Ses déclarations contribuent à ancrer la mauvaise image de marque et la réputation de la cité. Les barres sont successivement démolies, les familles étant relogées au cas par cas. Mais la destruction était-elle la seule solution ?, s'interroge-t-on en visitant l'exposition présentée au centre culturel Le Rize. Une réhabilitation de l'existant n'aurait-elle pas été plus rapide et moins coûteuse ? La cité s'était forgé une réputation bien trop désastreuse pour qu'une alternative à sa destruction soit envisageable : détruire Olivier-de-Serres revenait à nettoyer la ville d'un « abcès », et sa disparition avait une valeur hautement symbolique... L'ensemble reconstruit à la place est composé d'une série de logements sociaux à échelle humaine. L'architecture du nouveau quartier, rebaptisé « Jacques-Monod », repose sur une idée directrice : faire oublier ce qu'il a été. Mais on n'efface pas un passé douloureux simplement avec un nouvel urbanisme. L'exposition « Olivier-de-Serres, radiographie d'une «cité-ghetto» » propose un parcours chronologique sur 300 m2 qui retrace l'histoire du grand ensemble : de la construction de la première barre aux travaux mémoriels réalisés ces dernières années, des films, photographies, textes et témoignages audio(1) dévoilent aux visiteurs, à travers des souvenirs parfois contradictoires, un quartier et une époque elle aussi marquée par une crise économique et un débat politique sur l'immigration.

« Olivier-de-Serres, radiographie d'une «cité-ghetto» » - Le Rize - 23-25, rue Valentin-Haüy - 69100 Villeurbanne - Jusqu'au 30 janvier 2010 - Ouvert du mardi au samedi de 12 h à 19 h ; le jeudi de 17 h à 21 h

Notes

(1) Quartier lointain, documentaire sonore d'Irène Berelowitch, à écouter sur www.arteradio.com/son.html?514494

CULTURE

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