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Sécurisation des SSIG : premiers éléments de réponse français

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Alors que le collectif SSIG est décidé à se saisir des opportunités offertes par le contexte européen pour faire avancer la reconnaissance des services sociaux d'intérêt général, leur avenir se joue aussi en France à travers la transposition de la directive « services » et la mise en oeuvre de la réglementation européenne sur les aides d'Etat.

Après l'élection du Parlement européen, le débat sur la reconnaissance des services sociaux d'intérêt général (SSIG) va-t-il pouvoir être relancé ? Des SSIG qui, aujourd'hui, en l'absence d'un encadrement spécifique, sont soumis au droit communautaire applicable aux services d'intérêt économique général (SIEG) et se voient imposer les exigences de mandatement, plus rigoureuses que le système d'encadrement français. Le collectif SSIG, qui a effectué sa rentrée le 28 septembre dernier par un déjeuner de travail avec les nouveaux députés européens français, est en tout cas bien décidé à se saisir des opportunités offertes par le nouveau contexte européen pour obtenir une adaptation du cadre jurisprudentiel applicable aux SIEG aux spécificités des SSIG et de leurs acteurs.

On notera tout d'abord l'inflexion du discours de José Manuel Barroso, reconduit le 16 septembre pour cinq ans à la présidence de la Commission européenne. Si celui-ci avait bloqué, lors de son mandat précédent, toute possibilité d'obtenir une directive sur les SSIG, il a évoqué, les 8 et 9 septembre dernier, l'idée d'« un cadre de qualité pour les services publics et sociaux, ce qui témoignera de leur importance dans le modèle de société européen ». Encore faudra-t-il vérifier qu'il ne s'agissait pas là d'un discours de façade destiné à assurer sa réélection.

L'autre ouverture vient du traité de Lisbonne, qui pourrait entrer en vigueur avant la fin de l'année. L'article 14 demande à l'Union et à ses Etats membres de fixer les principes et les conditions permettant aux SIEG d'accomplir leurs missions. Et reconnaît en la matière le pouvoir de légiférer en codécision du Parlement européen et du Conseil (alors que seule la Commission était compétente jusqu'ici) par voie de règlements. Le collectif entend donc mobiliser les eurodéputés pour qu'ils se servent de cette nouvelle compétence pour sécuriser les SSIG. « L'idée d'une directive sur les SSIG n'est donc plus d'actualité. C'est par le biais d'un règlement de portée générale ou par des règlements thématiques - par exemple sur la qualification d'aide d'Etat - que l'adaptation du droit communautaire aux spécificités des SSIG devra se faire désormais, commente Laurent Ghekiere, membre du collectif SSIG et représentant de l'Union sociale pour l'habitat (USH) auprès de l'Union européenne. L'intérêt, c'est que le règlement est adopté aux termes d'un vrai débat démocratique entre les deux co-législateurs et qu'il s'applique directement sans avoir à être transposé en droit interne par les Etats. » Par ailleurs, le comité européen de liaison des services d'intérêt général (Celsig) a demandé à José Manuel Barroso de nommer au sein de la future commission européenne un commissaire spécialement chargé du respect de la mise en oeuvre de l'article 14 et, donc, du bon accomplissement des missions d'intérêt général des SIEG. Autre avancée : sur proposition de l'USH, reprise par les principales formations politiques françaises de gauche comme de droite, un intergroupe parlementaire sur les services publics (services d'intérêt général-services sociaux d'intérêt général) est en cours de constitution. Ce qui permettrait aux eurodéputés d'aborder les services publics dans le cadre d'une approche transversale, comme l'exige l'article 14, et pas seulement au sein de chaque commission. « Ce serait également un signal donné par les différents groupes politiques du Parlement de l'importance qu'ils accordent à la question des services publics », défend Laurent Ghekiere.

Mais l'avenir des services sociaux se joue également au niveau national à travers la transposition de la directive « services » en droit interne, sur laquelle la France doit remettre au plus tard son rapport le 28 décembre prochain. Cette directive a en effet exclu de son champ d'application un certain nombre de services sociaux à condition qu'ils soient assurés par des « prestataires mandatés par l'Etat ou par des associations reconnues comme telles par l'Etat » (1). Chargée d'examiner la question de sa transposition pour les établissements et services relevant de la direction générale de l'action sociale, la mission confiée à l'administrateur civil Guy Janvier (2) a rendu ses propositions, qui ont été validées en réunion interministérielle. Après avoir passé en revue les différents régimes d'autorisation, il en conclut que la majorité des services et établissements sociaux et médico-sociaux faisant appel à des financements publics (soit l'essentiel des structures) sont exclus du champ de la directive, la procédure d'appel à projets instaurée par la loi « hôpital, patients, santé et territoires » pouvant constituer un mandat au regard du droit communautaire. Sont également exclus du champ de la directive certains autres services (organismes agréés de domiciliation de personnes sans domicile, personnes agréées menant des actions expérimentales de caractère médical et social, services de protection des majeurs et des familles, établissements de formation en travail social, etc.). En revanche, le groupe de travail considère qu'en raison de l'absence de mandatement, un certain nombre de services relèvent de la directive et sont donc dans le marché intérieur : c'est le cas notamment des services d'aide à domicile agréés ou autorisés hors appels à projets ou des crèches et haltes-garderies.

Pour ces services, précise Guy Janvier, « les régimes juridiques peuvent néanmoins, pour l'essentiel, être justifiés au regard des principes de la directive car ils concernent des publics fragiles. Cette inclusion ne remet par conséquent pas en cause nos dispositifs de protection, nos exigences de qualité et leur contrôle a priori ».

L'autre question à résoudre pour le gouvernement est celle des modalités de financement des associations chargées d'une mission d'intérêt général. La réglementation européenne relative aux aides d'Etat oblige à vérifier que l'aide attribuée aux organismes n'entraîne pas une « surcompensation » de la mise en oeuvre des obligations de service public. Ce qui pose la question de la faisabilité des contrôles, souvent complexes à réaliser, et de la conformité du recours à la subvention comme mode de financement public. La crainte - jugée par certains irrationnelle - que la convention de subvention ne réponde pas aux exigences communautaires pousse d'ailleurs un nombre croissant de collectivités locales à recourir aux procédures de marché public (3). Un groupe de travail interministériel, piloté par le Haut Commissariat à la jeunesse et aux solidarités actives, réfléchit actuellement à la création d'une convention de partenariat d'intérêt général, comme l'avait proposé Michel Thierry (4). Elle devrait permettre de préciser la notion de « mandat » dont la traduction en droit français pose des difficultés dans le champ des services sociaux. Ce nouvel outil, qui devrait sécuriser les associations au regard du droit communautaire, devrait être présenté le 17 décembre prochain, lors de la conférence de la vie associative. S'accompagnera-t-il d'un renforcement des exigences à l'égard des opérateurs, notamment en matière comptable comme certains le craignent ? « Pas forcément, tient à rassurer Guy Janvier. Les associations ont déjà l'habitude de devoir répondre à un certain nombre d'exigences. »

Notes

(1) Sont ainsi exclus les services sociaux relatifs au logement social, à l'aide à l'enfance et à l'aide aux familles et aux personnes se trouvant dans une situation de besoin.

(2) Voir ASH n° 2605 du 17-04-09, p. 7.

(3) Voir notre enquête « Les associations face au marché : l'impasse ? », ASH n° 2606 du 24-04-09, p. 24.

(4) Voir ASH n° 2600 du 13-03-09, p. 15.

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