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La loi relative à la mobilité et aux parcours professionnels

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Une « boîte à outils » pour faciliter la mobilité des fonctionnaires et accompagner la réforme de l'administration. C'est ce que propose la loi du 3 août 2009 dont nous détaillons les principales dispositions.

Développer la mobilité des fonctionnaires en levant un certain nombre de blocages statutaires et financiers qui l'entravent, tout en facilitant la gestion par les employeurs publics de leurs effectifs, notamment dans le cadre de restructurations. Tel est l'objectif affiché de la loi du 3 août 2009 relative à la mobilité et aux parcours professionnels dans la fonction publique.

Ce texte offre des garanties nouvelles aux fonctionnaires qui souhaitent évoluer dans leur vie professionnelle telles que le droit au départ en mobilité. Dorénavant, dès lors qu'un agent bénéficie de l'accord d'une administration ou d'un organisme privé pour l'accueillir en son sein, son administration d'origine ne peut plus s'opposer à son départ, sous la seule réserve des nécessités de service ou, le cas échéant, d'un avis d'incompatibilité rendu par la commission de déontologie s'il s'agit d'un départ vers le secteur privé. L'administration peut toutefois exiger de lui qu'il accomplisse un préavis d'une durée maximum de 3 mois.

La loi consacre, par ailleurs, l'ouverture de tous les corps et cadres d'emplois de la fonction publique au détachement. Concrètement, les fonctionnaires peuvent désormais solliciter un détachement dans tous les corps et cadres d'emplois comparables à celui auquel ils appartiennent sans que l'administration puisse leur opposer les dispositions des statuts particuliers de ces corps ou cadres d'emplois. Autres nouveautés : la création d'un droit à l'intégration au-delà d'une période de 5 ans de détachement et d'une nouvelle voie de mobilité entre corps et cadres d'emplois, « l'intégration directe ». La loi du 3 août 2009 aménage, en outre, le principe de double carrière propre à la situation de détachement. A présent, il est possible de prendre en compte une promotion obtenue au cours d'une période de détachement lors du retour dans l'administration d'origine. Inversement, l'administration d'accueil peut reconnaître une promotion obtenue dans le corps ou cadre d'emplois d'origine de l'agent. Ainsi le « principe du plus favorable » s'applique : au moment de sa réintégration, du renouvellement de son détachement ou de son intégration, l'agent est reclassé au grade et à l'échelon qui lui sont les plus favorables.

Est par ailleurs introduite, à titre expérimental, pour une durée de 5 ans, la possibilité pour les fonctionnaires de cumuler des emplois à temps non complet relevant des 3 fonctions publiques. Les conditions de cumul d'activités sont aussi assouplies.

La loi vise également à créer les conditions qui permettront d'assurer la continuité et l'adaptabilité du service. Cela passe tout d'abord par l'harmonisation des conditions de recours à l'emploi contractuel et l'autorisation du recours à l'intérim dans les 3 fonctions publiques. Le texte crée en outre un dispositif d'accompagnement personnalisé pour les fonctionnaires de l'Etat confrontés à la réorganisation de leur service... avec la possibilité de placer en disponibilité d'office ceux dont l'emploi est supprimé et qui ont refusé 3 propositions de reclassement. Il offre également un cadre juridique sécurisé aux transferts d'activités entre collectivités publiques, ainsi qu'entre collectivités publiques et organismes privés, garantissant ainsi aux agents concernés la continuité de leur emploi.

Le troisième et dernier objectif poursuivi par la loi est de moderniser les pratiques de recrutement et de gestion des ressources humaines dans la fonction publique. Le texte contient ainsi diverses dispositions permettant de diversifier le recrutement dans le secteur public, telles que l'ouverture des concours internes aux ressortissants communautaires. Il entend aussi moderniser les règles d'évaluation et d'avancement, avec la généralisation de l'entretien professionnel ou la possibilité d'accéder aux grades supérieurs des corps et cadres d'emplois par la voie d'un concours ou par promotion.

I. AMÉLIORER LA MOBILITÉ ET LE DÉROULEMENT DE CARRIÈRE DES AGENTS

Création d'un droit au départ, à l'intégration au-delà d'une période de 5 ans de détachement, d'une nouvelle voie de mobilité entre corps et cadres d'emplois (1). Mais aussi suppression des obstacles juridiques au détachement et à l'intégration entre corps et cadres d'emplois de même catégorie et de même niveau, prise en compte des avantages de carrière acquis en période de détachement, développement du cumul d'emplois inter-fonctions publiques ou encore assouplissement des conditions de cumuls d'activités. La loi du 3 août 2009 comporte une série de mesures pour faciliter l'exercice de mobilités et la construction de parcours professionnels dans la fonction publique.

A. LA RECONNAISSANCE D'UN DROIT AU DÉPART (ART. 4 DE LA LOI)

La loi limite la possibilité pour l'administration de s'opposer au départ d'un agent qui souhaite être muté, placé en détachement, en disponibilité ou en position hors cadres. Cela vaut pour les seuls fonctionnaires civils de l'Etat, ainsi que pour les fonctionnaires territoriaux et hospitaliers. Les agents non titulaires, qui sont généralement recrutés sous contrat à durée déterminée, sont en effet soumis à des dispositions spécifiques en matière de mobilité. En particulier, les positions de détachement hors cadres et de mise en disponibilité ne leur sont pas applicables.

1. L'OBLIGATION POUR L'ADMINISTRATION D'ACCEPTER LA MOBILITÉ

Dorénavant, une administration ne peut plus s'opposer à la demande d'un fonctionnaire d'être muté ou de changer d'établissement, d'être placé en détachement, en disponibilité ou en position hors cadres ou encore d'être intégré directement dans une autre administration, dès lors que l'administration ou l'organisme d'accueil a donné son accord. Concrètement, le fonctionnaire doit donc s'être vu proposer un nouvel emploi par une administration ou un organisme privé.

L'absence de réponse de l'administration dans un délai de 2 mois vaut acceptation de la demande, conformément aux règles de droit commun.

L'administration peut seulement exiger de l'agent qu'il effectue un préavis d'une durée maximale de 3 mois avant de quitter son poste, afin qu'il puisse clore les dossiers en cours et qu'elle ait le temps de lui trouver un successeur. Les statuts particuliers des corps et cadres d'emplois (2) peuvent toutefois prévoir des règles plus contraignantes dans certains corps où la durée du préavis peut atteindre 6 mois. L'administration peut par ailleurs imposer une durée minimale de services effectifs avant une demande de mobilité. Objectif : limiter le turn-over, qui peut être préjudiciable au bon fonctionnement du service (loi du 13 juillet 1983, art. 14 bis nouveau). L'institution de ce délai de préavis constitue une innovation dans la fonction publique, où le fonctionnaire pouvait auparavant quitter son service dès lors que sa demande de mobilité avait été acceptée.

L'introduction de ces nouvelles règles a conduit le législateur à modifier celle qui, dans la fonction publique territoriale, prévoyait que, en cas de désaccord sur une mutation entre la collectivité d'origine et la collectivité d'accueil, la mutation prenait effet 3 mois après la notification de la décision de la collectivité d'accueil à la collectivité d'origine. La mutation prend désormais effet à l'expiration du préavis effectué par l'agent (loi du 26 janvier 1984, art. 51 modifié).

A noter : la règle selon laquelle l'administration ne peut plus s'opposer à la demande d'un fonctionnaire d'être muté ou de changer d'établissement ne s'applique pas lorsque ces mouvements sont effectués en application d'un tableau périodique de mutations. Dans la fonction publique de l'Etat, il est fréquent que les mouvements de fonctionnaires soient gérés de manière centralisée, sur la base d'un barème qui prend en compte l'ancienneté du fonctionnaire, sa situation individuelle, le niveau de responsabilité du poste... Dans ce cas, le droit au départ ne s'applique pas puisque le fonctionnaire ne se voit pas proposer un poste par une administration d'accueil distincte de son administration d'origine (loi du 13 juillet 1983, art. 14 bis nouveau).

2. LES CAS OÙ L'ADMINISTRATION PEUT S'OPPOSER AU DÉPART

L'administration peut refuser le départ du fonctionnaire si les « nécessités du service » le justifient. Cette notion permet de viser tous les cas dans lesquels le départ de l'agent poserait un réel problème à l'administration, avec le risque qu'elle soit invoquée fréquemment par les administrations, compte tenu de son caractère très large. Du reste, elle est souvent prévue par les textes réglementaires comme motif de refus d'une demande de détachement, de mise en disponibilité ou de placement hors cadres. Les juridictions administratives ont également jugé que les demandes de détachement peuvent être refusées au nom de « l'intérêt du service », qui est une notion synonyme.

L'administration a aussi la possibilité d'opposer unrefus à l'agent qui souhaite exercer une activité lucrative privée, si ses futures fonctions sont incompatibles avec les règles déontologiques définies par le code pénal. Ainsi, elle peut mettre son véto à une demande quand la commission de déontologie a donné un avis négatif au projet du fonctionnaire au motif qu'il constitue un délit de prise illégale d'intérêts.

La loi ne modifie pas, en revanche, les règles applicables lorsque le placement en détachement, en disponibilité ou en position hors cadres est de droit pour le fonctionnaire. L'administration ne peut donc pas opposer à l'agent les nécessités du service ou exiger l'accomplissement d'un préavis lorsqu'il demande à être détaché pour l'exercice d'un mandat syndical, l'accomplissement d'un stage ou d'une scolarité préalable à une titularisation, la préparation d'un concours... Il en est de même pour les demandes de mise en disponibilité pour élever un enfant de plus de 8 ans, soigner un proche gravement malade ou handicapé, rejoindre son conjoint, exercer un mandat d'élu local et en cas de déplacement outre-mer ou à l'étranger en vue de l'adoption d'un enfant (loi n° 83-634 du 13 juillet 1983, art. 14 bis nouveau).

B. LES NOUVEAUTÉS CONCERNANT LE DÉTACHEMENT (ART. 1ER)

1. L'ASSOUPLISSEMENT DES CONDITIONS DE DÉTACHEMENT

Auparavant, tous les corps et cadres d'emplois des 3 fonctions publiques (Etat, territoriale, hospitalière) étaient accessibles aux fonctionnaires de chacune d'entre elles par la voie du détachement (3) - suivi ou non d'une intégration - dans les conditions prévues par les statuts particuliers des corps et cadres d'emplois.

Le législateur a élargi le détachement en faisant sauter le verrou des statuts particuliers. En d'autres termes, le détachement est dorénavant possible même sans disposition en ce sens dans le statut particulier du corps ou du cadre d'emplois concerné et aucun des statuts particuliers ne peut déroger à ce principe. Il ne peut toutefois être prononcé qu'entre corps et cadres d'emplois appartenant à la même catégorie (A, B ou C) et de niveau comparable, apprécié au cas par cas par l'administration d'accueil au regard des conditions de recrutement ou de la nature des missions. Lorsque le corps d'origine ou le corps d'accueil ne relève pas d'une catégorie, le détachement s'effectue entre corps et cadres d'emplois de niveau comparable. La réserve selon laquelle l'accès aux fonctions visées est subordonné à la détention de titres ou diplômes spécifiques est maintenue (loi du 13 juillet 1983, art. 13 bis modifié).

2. LE DROIT À L'INTÉGRATION AU-DELÀ D'UNE PÉRIODE DE 5 ANS DE DÉTACHEMENT

La loi prévoit l'obligation de proposer au fonctionnaire détaché son intégration dans le corps ou cadre d'emplois d'accueil lorsque le détachement se poursuit au-delà d'une période de 5 ans. Concrètement, l'administration ne peut plus se contenter de renouveler le détachement d'un agent au-delà d'une telle période, sauf si ce dernier préfère cette position statutaire (loi du 13 juillet 1983, art. 13 bis modifié).

3. LA PRISE EN COMPTE DES AVANTAGES DE CARRIÈRE ACQUIS PENDANT LE DÉTACHEMENT (ART. 5)

Reprenant le droit actuel, la loi du 3 août 2009 prévoit que, à l'expiration du détachement, le fonctionnaire est obligatoirement réintégré dans son corps d'origine, sauf si son intégration dans le corps de détachement est prononcée, dans les conditions prévues par les statuts particuliers. Mais dorénavant, dans tous les cas, il bénéficie des droits à avancement qui lui sont les plus favorables entre ceux qu'il a acquis dans son corps d'origine et ceux qu'il a acquis dans son corps d'accueil. Ce principe s'applique également dans le cas où le détachement est renouvelé.

Concrètement, le fonctionnaire réintégré dans son corps d'origine bénéficie des avancements de grade et d'échelon qu'il a obtenus dans le corps ou cadre d'emplois de détachement, s'ils lui sont plus favorables que les avancements obtenus automatiquement dans son corps ou cadre d'emplois d'origine. Cette disposition permet de ne pas désavantager les fonctionnaires détachés par rapport à ceux qui restent dans leur corps d'origine. Dans le même souci de ne pas dévaloriser les fonctionnaires détachés, ceux qui voient leur détachement renouvelé sont placés dans un grade et à un échelon correspondant à l'avancement qu'ils ont acquis automatiquement dans leur corps d'origine, si celui-ci leur est plus favorable que l'avancement obtenu dans le corps d'accueil. Enfin, lorsque le détachement est suivi d'une intégration dans le corps d'accueil, il est également tenu compte de l'avancement de grade et d'échelon acquis dans le corps d'origine, s'il est plus favorable que le grade et l'échelon occupés à l'expiration du détachement.

Ces dispositions concernent exclusivement les détachements dans un corps ou cadre d'emplois de la fonction publique dans lesquels les fonctionnaires peuvent obtenir de l'avancement. Les détachements sur « emplois fonctionnels » ou dans des organismes privés n'y sont pas soumis car ils ne relèvent pas d'une logique de carrière. Par ailleurs, l'application de ces règles est écartée dans le cas où le fonctionnaire a été détaché afin d'accomplir un stage ou de suivre une scolarité préalable à la titularisation, si celle-ci n'a pas été obtenue. Cette catégorie de détachement concerne les lauréats de certains concours internes, tels que ceux des instituts régionaux d'administration, qui sont détachés afin d'effectuer la scolarité préalable à leur entrée en fonctions. S'ils ne sont pas titularisés dans un nouveau corps ou cadre d'emplois, ils réintègrent leur corps d'origine. Comme ils n'ont pas été détachés sur un emploi, ils n'ont pas obtenu d'avancement dans les conditions prévues la loi du 3 août 2009 (loi du 11 janvier 1984, art. 45 modifié ; loi du 26 janvier 1984, art. 66 et 67 modifiés ; loi du 9 janvier 1986, art. 55 modifié).

Selon le rapporteur de la loi à l'Assemblé nationale, Jacques Alain Bénisti, « la reconnaissance mutuelle des avancements permettra aux fonctionnaires détachés de mener une carrière unique, par opposition à la situation actuelle où ils mènent des carrières parallèles dans le corps d'origine et le corps d'accueil. Elle permet également de mieux prendre en compte le mérite individuel de l'agent, puisque les avancements obtenus dans son corps d'accueil sur la base de son évaluation et de sa notation seront désormais pris en compte lors de son retour dans son administration d'origine. Elle supprime ainsi l'un des freins à la mobilité. » En effet, « en raison du cloisonnement actuel, certains agents hésitent à être détachés ou limitent la durée de leur détachement afin d'éviter un ralentissement de leur carrière. A l'inverse, certains prolongent trop longtemps leur détachement car le retour dans leur administration d'origine se traduirait par une régression de leur carrière et de leur rémunération » (Rap. A. N. n° 926, juin 2008, Bénisti, page 45).

C. LA MISE EN PLACE DE L'INTÉGRATION DIRECTE (ART. 1ER ET 2)

Parallèlement à la voie du détachement, un nouveau cas de mobilité est introduit dans le statut général de la fonction publique : l'intégration directe (loi du 13 juillet 1983, art. 14 modifié). Celle-ci est « destinée à favoriser les mobilités entre les trois fonctions publiques et au sein de chacune d'entre elles », a expliqué Hugues Portelli, rapporteur de la loi au Sénat (Rap. Sén. n° 291, avril 2008, Portelli, page 37).

Les modalités retenues pour cette nouvelle forme de mobilité - qui permet aux fonctionnaires d'être intégrés dans un autre corps ou cadre d'emplois que le leur sans passer par la voie d'un détachement - sont identiques à celles qui encadrent ce dernier. Ainsi, l'intégration directe est autorisée dans tous les corps et cadres d'emplois, sans que les statuts particuliers puissent l'écarter. Le corps ou cadre d'emplois d'accueil doit appartenir à la même catégorie et être de niveau comparable, par les conditions de recrutement ou la nature des missions, au corps ou cadre d'emplois d'origine, y compris la détention de titres ou diplômes spécifiques imposée pour l'exercice des fonctions du corps ou cadre d'emplois d'accueil. Lorsque le corps d'origine ou le corps d'accueil ne relève pas d'une catégorie, le détachement s'effectue entre corps et cadres d'emplois de niveau comparable (loi du 13 juillet 1983, art. 13 bis modifié).

Les modalités de mise en oeuvre de l'intégration directe sont déclinées dans les 3 statuts de la fonction publique (Etat, territoriale et hospitalière). La loi y rappelle qu'elle doit s'effectuer entre corps ou cadres d'emplois de niveau comparable, niveau apprécié à l'aune des conditions de recrutement ou de la nature des missions. A noter : la condition de catégories n'est pas reprise dans les titres III et IV du statut général des fonctionnaires, relatifs respectivement à la fonction publique territoriale et à la fonction publique hospitalière.

La loi précise également que l'intégration est prononcée par l'administration d'accueil, après accord de l'intéressé et de son administration d'origine. Elle s'effectue dans les mêmes conditions de classement que celles afférentes au détachement. Cependant, elle n'est pas applicable aux corps de catégorie A de la fonction publique d'Etat accessibles par la voie du tour extérieur (loi du 11 janvier 1984, art. 63 bis nouveau ; loi du 26 janvier 1984, art. 68-1 nouveau ; loi du 9 janvier 1986, art. 58-1 nouveau).

Par ailleurs, l'intégration directe devient un moyen supplémentaire pour pallier les insuffisances des possibilités de mutation à l'intérieur des différents corps ou cadres d'emplois au bénéfice des fonctionnaires handicapés et des fonctionnaires séparés de leur conjoint ou de leur partenaire, auxquels est accordée une priorité pour bénéficier d'une intégration directe. Une chance nouvelle d'obtenir un changement d'emploi leur est ainsi ouverte (loi du 11 janvier 1984, art. 62 modifié ; loi du 26 janvier 1984, art. 54 modifié ; loi du 9 janvier 1986, art. 38 modifié). En outre, l'intégration directe est ajoutée aux procédures permettant de pourvoir un emploi vacant dans la fonction publique territoriale, à savoir : la mutation, le détachement, la promotion interne et la nomination d'un lauréat de concours inscrit sur une liste d'aptitude. Elle fait aussi dorénavant partie des possibilités prévues pour offrir un nouvel emploi aux fonctionnaires territoriaux dont l'emploi a été supprimé (4)(loi du 26 janvier 1984, art. 41 et 97 modifiés).

« Au cas par cas, l'administration pourra proposer l'intégration directe plutôt que le détachement, en fonction des besoins du service et du profil du candidat. » Selon Hugues Portelli, ce nouveau cas de mobilité devraient être « notamment utilisé par l'Etat, dans le contexte actuel de restructuration de ses administrations, en permettant l'accès direct de ceux de ses fonctionnaires concernés par la réorganisation de leur ministère aux corps homologues du département ministériel auquel leur service aura été rattaché » (Rap. Sén. n° 291, avril 2008, Portelli, page 35).

A noter : en réalité, l'intégration directe ne constitue pas une réelle novation puisque, en 1983, le législateur avait déjà prévu cet accès direct, dans l'intérêt du service public. La procédure de « changement de corps » s'organisait, en respectant le déroulement normal des carrières, entre corps de même niveau de recrutement et aux missions comparables. Le bénéfice de conditions et de modalités d'intégration identiques était assuré aux fonctionnaires de l'Etat et des collectivités territoriales appartenant à des corps comparables. Mais, en 1987, le législateur a substitué, dans la fonction publique territoriale, la notion de cadre d'emplois à celle de corps. Ce changement a conduit à la suppression de la procédure de changement de corps, rendue caduque, puisque le principe de corps équivalents dans les deux fonctions publiques était abandonné. La procédure du détachement lui a alors été préférée.

D. UNE NOUVELLE EXCEPTION À L'OBLIGATION DE REMBOURSEMENT DES MISES À DISPOSITION (ART. 6)

La loi du 2 février 2007 de modernisation de la fonction publique a rendu obligatoire le remboursement par l'administration d'accueil de toute mise à disposition (5) d'un fonctionnaire de l'Etat, sauf lorsqu'elle intervient auprès d'une administration ou d'un établissement public administratif de l'Etat, ou d'une organisation internationale intergouvernementale ou d'un Etat étranger (6).

Une exception supplémentaire est introduite : dorénavant, la mise à disposition d'un fonctionnaire de l'Etat auprès d'une collectivité territoriale, d'un établissement public local ou d'un établissement public de santé peut également s'effectuer sans remboursement. Cette dérogation est toutefois, à la différence des 2 autres, limitée dans son montant et dans sa durée, puisqu'elle ne peut ni excéder un an, ni porter sur plus de la moitié de la dépense de personnel afférente (loi du 11 janvier 1984, art. 42 II modifié).

Ces dispositions ont pour but de « faciliter la réaffectation des fonctionnaires de l'Etat concernés par une restructuration de leur administration. Ces agents pourraient ainsi occuper temporairement un emploi dans la fonction publique territoriale, dans l'attente d'une affectation définitive dans un nouvel emploi. Le remboursement partiel de la mise à disposition s'apparente ainsi à une subvention de l'Etat pour l'emploi de fonctionnaires momentanément sans poste » (Rap. A. N. n° 926, juin 2008, Bénisti, page 47).

E. LE DÉVELOPPEMENT DU CUMUL D'EMPLOIS INTER-FONCTIONS PUBLIQUES (ART. 14)

La loi autorise, à titre expérimental, le cumul d'emplois permanents à temps non complet dans les 3 fonctions publiques.

Un rapport du gouvernement dressant un bilan de l'expérimentation doit être transmis au Parlement au plus tard 6 mois avant son terme, afin que, le cas échéant, ce dispositif soit pérennisé. Ce document pourra comprendre les observations de collectivités territoriales ayant eu recours au cumul d'emplois publics à temps non complet relevant de diverses fonctions publiques (art. 14, IV de la loi).

1. L'ÉLARGISSEMENT DES POSSIBILITÉS POUR LES FONCTIONNAIRES DE L'ÉTAT

Les possibilités de cumul d'emplois permanents à temps non complet par des fonctionnaires de l'Etat sont étendues. Pour mémoire, la loi du 2 février 2007 de modernisation de la fonction publique a permis, à titre expérimental et pour une durée de 3 ans, de nommer des fonctionnaires de l'Etat dans plusieurs emplois permanents à temps non complet dans les seules zones de revitalisation rurale, avec l'objectif de favoriser le maintien des services publics en milieu rural. Deux ans et demi après, cette expérimentation n'a pas débuté... faute de publication du décret en précisant l'application.

La loi du 3 août 2009 reprend le principe de cette expérimentation, en apportant deux modifications importantes au dispositif voté en 2007. D'abord, cette possibilité n'est plus limitée aux zones de revitalisation rurale et peut être mise en oeuvre dès lors que « les besoins du service le justifient ». L'accord du fonctionnaire concerné reste requis. Ensuite, la durée de l'expérimentation est prolongée, celle-ci devant prendre fin à l'expiration d'un délai de 5 ans à compter de la promulgation de la nouvelle loi, soit au 3 août 2014. Au-delà, son entrée en vigueur n'est plus subordonnée à celle d'un décret, mais est effective dès la promulgation de la loi.

Les emplois cumulés peuvent relever de différentes fonctions publiques. Pour éviter un trop grand fractionnement de son activité, préjudiciable tant à sa vie privée qu'à sa vie professionnelle, le fonctionnaire doit exercer un service au moins égal au mi-temps dans l'emploi correspondant au grade du corps dont il relève. Dans la même logique, il est affilié et cotise au régime de retraite correspondant à son emploi principal. L'exigence d'une durée de services et d'une rémunération totales équivalentes à celles d'un emploi à temps complet est maintenue, de même que le principe du calcul du traitement et des compléments de traitement au prorata du nombre d'heures travaillées sur chacun des postes occupés. Egalement maintenue : la référence à un décret pour définir les dérogations au statut général nécessaires à la mise en place d'un tel cumul, et pour déterminer les conditions du cumul ainsi que les règles applicables en cas de modification de la durée de travail afférente à l'un des emplois (art. 14, I de la loi).

2. L'APPLICATION DU CUMUL AUX FONCTIONNAIRES TERRITORIAUX ET HOSPITALIERS

A l'instar de leurs collègues de la fonction publique de l'Etat, les fonctionnaires territoriaux et hospitaliers ont dorénavant la possibilité de cumuler, à titre expérimental, des emplois permanents à temps non complet relevant des 3 fonctions publiques pour une durée de 5 ans. Ainsi, à titre d'exemple, une infirmière pourrait partager son temps de travail entre l'hôpital, un emploi au sein de l'Education nationale et un travail au sein d'un centre d'action sociale ou d'un centre de protection maternelle et infantile.

Ce cumul d'emplois à temps non complet s'exerce dans les mêmes conditions que pour les fonctionnaires de l'Etat. La nomination dans de tels emplois doit ainsi, par exemple, être justifiée par les besoins du service et est subordonnée à l'accord des agents territoriaux et hospitaliers. Toutefois, à la différence des fonctionnaires de l'Etat, les intéressés ne sont assurés ni de bénéficier d'un service équivalent à un temps complet et d'une rémunération correspondante, ni d'exercer un service au moins égal au mi-temps dans l'emploi correspondant au grade du corps dont ils relèvent (art. 14, II et III de la loi).

F. L'ASSOUPLISSEMENT DES CONDITIONS DE CUMUL D'ACTIVITÉ PRIVÉE/PUBLIQUE (ART. 33 ET 34)

Pour les fonctionnaires et les agents non titulaires de droit public créant ou reprenant une entreprise, la durée de la dérogation à l'interdiction d'exercer une activité privée lucrative passe de 1 à 2 ans au maximum à compter de cette création ou reprise. Sans changement, elle peut toutefois être prolongée pour une durée maximale de 1 an. Les agents concernés sont donc désormais autorisés à cumuler pendant 3 ans au maximum (au lieu de 2 ans) leur activité privée avec leur emploi public (loi n° 83-634 du 13 juillet 1983, art. 25 II, 1° modifié).

Dans le même ordre d'idée, la loi permet aux agents occupant un emploi à temps non complet représentant au plus 70 % - et non plus seulement 50 % - de la durée légale du travail d'exercer une activité privée lucrative (loi n° 83-634 du 13 juillet 1983, art. 25 IV modifié).

À SUIVRE...

PLAN DU DOSSIER

DANS CE NUMÉRO

I. Améliorer la mobilité et le déroulement de carrière des agents

A. La reconnaissance d'un droit au départ

B. Les nouveautés concernant le détachement

C. La mise en place de l'intégration directe

D. Une nouvelle exception à l'obligation de remboursement des mises à disposition

E. Le développement du cumul d'emplois inter-fonctions publiques

F. L'assouplissement des conditions de cumul d'activité privée/publique

DANS UN PROCHAIN NUMÉRO

II. Accompagner les agents affectés dans un service en voie de réorganisation

III. Moderniser le recrutement et la gestion des ressources humaines

TEXTES DE LOIS MODIFIÉS

Loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires : art. 6 modifié, art. 13 modifié, art. 13 bis modifié, art. 13 quater nouveau, art. 14 modifié, art. 14 bis nouveau, art. 14 ter nouveau, art. 25 modifié.

Loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l'Etat : art. 3 modifié, art. 3 bis nouveau, art. 19 modifié, art. 36 modifié, art. 42 modifié, art. 44 bis nouveau, art. 44 ter nouveau, art. 44 quater, art. 45 modifié, art. 51, art. 55 bis modifié, art. 62 modifié, art. 63 bis nouveau, art. 64 bis nouveau.

Loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale : art. 3-2 nouveau, art. 6-1 nouveau, art. 7-1 modifié, art. 25 modifié, art. 36 modifié, art. 41 modifié, art. 51 modifié, art. 54 modifié, art. 66 modifié, art. 67 modifié, art. 68-1 nouveau, 76-1 nouveau, art. 88-2 nouveau, art. 97 modifié.

Loi n° 86-33 du 9 janvier 1986 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique hospitalière : art. 9-3 nouveau, art. 29 modifié, art. 38 modifié, art. 55 modifié, art. 58-1 nouveau, art. 65.1.

Loi n° 93-122 du 29 janvier 1993 relative à la prévention de la corruption et à la transparence de la vie économique et des procédures publiques : art. 87 modifié.

SAISINE DE LA COMMISSION DE DÉONTOLOGIE : CE QUI CHANGE

Jusqu'à la loi du 3 août 2009, la commission de déontologie - chargée d'apprécier la compatibilité de toute activité lucrative, salariée ou non, dans une entreprise ou un organisme privé ou toute activité libérale avec les fonctions effectivement exercées au cours des 3 années précédant le début de cette activité par tout agent cessant ses fonctions - ne pouvait être saisie que par l'administration d'origine de l'agent ou par l'agent lui-même. Dorénavant, elle peut l'être également par son président, dans un délai de 10 jours à compter de l'embauche de l'agent ou de la création de l'entreprise ou de l'organisme privé. La commission doit alors rendre son avis dans un délai de 3 semaines, qui peut être prolongé de une semaine par décision de son président. Si elle rend un avis d'incompatibilité, le contrat de travail de l'agent prend fin à la date de la notification de cet avis, sans préavis et sans indemnité de rupture. Sachant qu'un tel avis, prévoit désormais expressément la loi, peut être rendu si la commission estime ne pas avoir obtenu de l'agent ou de son administration les éléments nécessaires à son appréciation (loi n° 93-122 du 29 janvier 1993, art. 87 modifié).

Notes

(1) Les corps (ou cadres d'emplois pour la fonction publique territoriale) rassemblent les fonctionnaires soumis au même statut particulier, ayant vocation aux mêmes grades et exerçant des fonctions identiques.

(2) Les statuts particuliers déterminent les règles d'accès aux corps ou cadres d'emplois et les modalités de déroulement de carrière (avancement de grade et d'échelon, détachement, etc.).

(3) Le détachement est la position du fonctionnaire qui est placé hors de son corps ou cadre d'emplois d'origine, mais qui continue à bénéficier de ses droits à avancement et à la retraite dans ce corps ou cadre d'emplois.

(4) Les dispositions concernant le reclassement des agents territoriaux seront traitées dans la seconde partie de notre dossier.

(5) La mise à disposition est une position qui permet à un fonctionnaire de demeurer dans son corps d'origine, de continuer à être rémunéré par son administration d'origine et d'y acquérir des droits à l'avancement et à la retraite tout en exerçant des fonctions dans une autre administration. Elle présente l'avantage d'être plus rapide à mettre en oeuvre et plus souple que le détachement ou le changement d'affectation.

(6) Sur la loi du 2 février 2007, voir ASH n° 2492 du 2-02-07, p. 17.

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