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Regards insaisissables

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Pendant trois ans, la photographe Delphine Warin a découvert, au centre de protection maternelle et infantile du XIVe arrondissement parisien, le quotidien de femmes non voyantes déjà mères ou qui désiraient le devenir, et a su capturer en noir et blanc leurs portraits sensibles.

Dans le métro, une mère serre son nourrisson contre elle. Sur la photo d'à côté, une autre coiffe les longs cheveux de sa petite fille. Plus loin, sur un autre cliché, une enfant passe un bras protecteur autour du cou de sa mère. Tous - mères, filles, fils, et parfois pères - regardent en direction de l'appareil photo. Pourtant, les mères ne voient pas. « Lors d'un reportage, j'ai découvert le travail exceptionnel mené au centre de protection maternelle et infantile du XIVe arrondissement de Paris avec des femmes non voyantes qui ont ou désirent avoir un enfant », raconte la photographe Delphine Warin, qui a suivi ces femmes dans leur quotidien durant trois ans. « Là, elles sont accompagnées individuellement, et participent à des réunions pour échanger, se donner des conseils pratiques, et surtout pour être moins isolées. » Car les espaces pour les mères non voyantes sont rares. « Quand, en 1987, une puéricultrice de secteur m'a adressé une mère aveugle, j'ai découvert le monde du handicap visuel, raconte Edith Thoueille, puéricultrice et responsable du centre. J'ai découvert aussi que l'entourage, le corps médical, mais également certains travailleurs sociaux décourageaient les femmes non voyantes d'avoir des enfants. Je suis tombée de haut. » C'est ainsi que le lieu de parole a vu le jour. Aujourd'hui, les nourrissons sont adolescents. Ils peuvent, eux, voir les photos de Delphine Warin et les commenter à leur mère.

« Ce travail a été déstabilisant, confie la photographe. Pour moi, le regard caméra est essentiel. Or, là, j'étais face à un regard qui n'est pas un vrai regard, mais qui a une présence plus forte. J'étais aussi face à des mères qui développent les autres sens pour découvrir leur enfant. Il me fallait tenter de saisir cet insaisissable. » C'est réussi. Sur les clichés en noir et blanc, ce sont les mains, les oreilles, les nez qui parlent. Une attention palpable dans l'air. Qui fait penser que ces mères aveugles ont beaucoup à nous apprendre.

Les yeux grands ouverts - Photographies de Delphine Warin - Galerie Faits & Cause - 58, rue Quincampoix - 75004 Paris - Jusqu'au 31 octobre, de 13 h 30 à 18 h 30 - Entrée libre - Livre des photos disponible auprès de Filigranes Editions - www.filigranes.com - 25 €

CULTURE

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