«Les préconisations fixées dans le plan national «pandémie grippale» apparaissent par trop théoriques et décalées au regard de réalités humaines et sociales complexes » comme celles des personnes sans-abri, constate la commission « Charte éthique & maraude » de l'Espace éthique de l'Assistance publique-hôpitaux de Paris (1). Or ces publics, plus vulnérables que d'autres du fait de l'extrême précarité de leurs conditions d'existence, justifient des approches spécifiques, défend-elle. Afin de veiller au « respect des personnes dans leur dignité et leurs droits » et de prévenir les risques de stigmatisation et de relégation, elle estime ainsi nécessaire la mise en place par les pouvoirs publics d'un « réseau sentinelle » - qui associerait les personnes concernées, les bénévoles et intervenants professionnels, les chercheurs - afin de suivre l'impact de la menace pandémique sur les sans-abri et d'en tirer des actions adaptées.
La commission attire d'ores et déjà l'attention sur la nécessité de limiter l'exposition des personnes à la rue aux conséquences d'une pandémie, certainement plus intenses pour elles du fait de leurs fragilités et de leur état de santé souvent précaire. Elle appelle également à la vigilance sur les risques de déstabilisation de la vie sociale des sans-abri ou de négligence de leurs besoins fondamentaux du fait d'autres urgences. Par ailleurs, elle pose une série de questions : quels dispositifs d'information, de prévention et d'accès aux soins pour des personnes souvent exclues du système de santé ? Comment les centres d'accueil de jour et de nuit pourront-ils assurer leurs fonctions en période d'épidémie ? Elle s'interroge également sur les alternatives qui seront proposées en cas de fermeture d'un centre d'hébergement ou bien sur la continuité des distributions alimentaires en cas de désorganisation de celles-ci. De même si le placement provisoire dans des structures intermédiaires (chambre d'hôtel, notamment) est envisagé comme mesure supplétive, reste la question de l'accompagnement des résidents. La commission soulève encore d'autres questions éthiques comme la faculté des personnes de consentir ou non au vaccin ou leur liberté de choix de rester dans la rue malgré leur état de santé. Enfin, quelle instance sera garante du respect de leur liberté et de leurs droits ? On le voit, les questions sont nombreuses et appellent une grande vigilance dans la mise en oeuvre du dispositif pour les sans-abri. La commission est en tout cas bien décidée à suivre ses « aspects éthiques et sociétaux » et à formuler, si nécessaire, des propositions.
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