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Tests ADN : l'exécutif va « prendre le temps de réfléchir »

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Dès sa prise de fonction, Eric Besson s'était montré réticent à mettre en oeuvre la mesure. Le ministre de l'Immigration a annoncé le 13 septembre, sur l'antenne d'Europe 1, qu'il ne signerait pas le décret permettant d'utiliser, pour les étrangers candidats au regroupement familial, l'ADN comme moyen de preuve de leur filiation. Prévue par la loi « Hortefeux » du 20 novembre 2007 et issue, à l'origine, d'un amendement du député (UMP) Thierry Mariani, la mesure avait suscité une très vive polémique. Au point de pousser, au final, le législateur à encadrer très strictement le recours aux tests de filiation biologique (1).

Le ministre a expliqué sa décision par l'impossibilité, pour lui, de respecter l'esprit et la lettre de la loi dans les délais impartis. La loi prévoyait en effet d'achever l'expérimentation du dispositif au plus tard le 31 décembre 2009. « Elle a dit aussi, a rappelé Eric Besson, qu'il fallait assurer la confidentialité absolue des données, ne pas créer de fichier et veiller à la sécurité absolue de la chaîne logistique. » Des exigences que le ministre dit ne pas pouvoir satisfaire d'ici à la fin de l'année, arguant notamment de l'état des moyens de la diplomatie française. « Nos consulats ne sont pas équipés pour les tests d'empreintes génétiques », a-t-il expliqué. « Ce sont des prélèvements biologiques. Il faut donc que ce soit fait par un médecin. Or il n'y a pas de médecin dans les consulats. » « Il faudrait donc que cela soit fait à l'extérieur », a-t-il précisé, pointant un « risque d'évaporation ou de constitution de fichiers ». Le ministre estime par conséquent un « report d'un an ou deux du délai d'expérimentation » nécessaire pour pouvoir appliquer la loi, ajoutant qu'à titre personnel, il ne souhaite pas rouvrir le débat sur le sujet. « Peut-être que dans 20 ans, notre signature génétique sera aussi banale qu'une signature électronique. » « Aujourd'hui, ce n'est pas le cas », a-t-il insisté. « Cela suscite une émotion politique chez les représentants des grandes religions, les spécialistes de la bioéthique, les chercheurs... Il y a une émotion très palpable et qui, en plus, a nui malheureusement à l'image de la France à l'étranger. »

Saluée par les associations, les élus de l'opposition et même quelques voix au sein de la majorité, la décision du ministre a provoqué dans un premier temps une véritable levée de boucliers du côté des députés UMP. Le président de la commission des lois de l'Assemblée nationale, Jean-Luc Warsmann, l'a ainsi qualifiée d'« extrêmement choquante ». « Lorsqu'une loi est votée, le ministre doit prendre un texte d'application », a-t-il déclaré. « S'il ne veut pas le prendre, la moindre des choses, c'est qu'il ait des contacts avec le Parlement ou la commission concernée. » Depuis la Russie où il était en déplacement, le Premier ministre a, le 14 septembre, tenté d'étouffer la grogne en promettant de « rediscuter avec le Parlement », mais sans donner d'indications sur le calendrier ou les modalités de ce débat. Défendant un texte « très équilibré » avec « à la fois des dispositions visant à mettre en oeuvre les tests ADN et des garanties pour les personnes », François Fillon a souligné que, « pour le moment », le gouvernement ne parvenait « pas à mettre en oeuvre ces garanties ». « Tant qu'elles ne sont pas applicables, nous ne mettrons pas en oeuvre ce texte », a-t-il indiqué. Devant les députés UMP réunis à l'Elysée le lendemain, le président de la République a confirmé que l'exécutif allait « prendre le temps [de] réfléchir » au sujet, sans donner, lui non plus, de précisions sur ses intentions (abandon pur et simple ? nouvelle discussion au Parlement ?). Selon le député Jean Leonetti, le chef de l'Etat « a vraiment relativisé » en expliquant que les tests ADN tels qu'ils ont été votés « étaient de toutes façons de portée très limitée, d'application très difficile ».

Dans le même temps, le groupe UMP a finalement joué l'apaisement en annonçant la mise en place d'une « commission » autour d'Eric Besson et de la majorité sur le dossier.

Notes

(1) Voir ASH n° 2533 du 30-11-07, p. 23.

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