Les craintes de voir le gouvernement revenir sur des dispositions du projet de loi pénitentiaire, pourtant considérées comme des avancées lors de son adoption au Sénat en mars dernier, se confirment. Une semaine avant l'examen du texte par les députés, la garde des Sceaux a, le 8 septembre, précisé ses intentions devant la commission des lois de l'Assemblée nationale. Parmi les points majeurs du texte, elle propose de remplacer le principe de l'encellulement individuel, affirmé par les sénateurs - qui ont néanmoins prévu un nouveau moratoire de cinq ans pour son application -, par celui du « libre choix du détenu ». Son argument : maintenir les liens sociaux et mieux lutter contre le risque de suicide en prison. Alors que le projet de loi prévoit que les détenus condamnés à une peine de deux ans, au lieu de un an aujourd'hui, pourront bénéficier d'un aménagement de peine, la ministre a déclaré être défavorable à ce seuil « sans autres conditions ». Elle souhaiterait notamment exclure certains détenus du dispositif : « beaucoup sont des récidivistes. Certains sont des condamnés sexuels. Je souhaite donc que nos débats nous permettent d'avancer sur ce point sensible du projet de loi. »
La CGT-pénitentiaire, qui avait été reçue le 31 août par Michèle Alliot-Marie, avait déjà dénoncé sur ce dernier point un « signal extrêmement négatif » : « Alors que, depuis des années, les acteurs du monde pénal et pénitentiaire affirment sans relâche que la prison ne doit être que l'ultima ratio des peines et qu'une peine alternative ou aménagée est le meilleur rempart contre la récidive et pour la réinsertion, le ministère de la Justice s'entête à ne voir que l'incarcération comme toute réponse à la délinquance. » Même indignation au Syndicat national de l'ensemble des personnels de l'administration pénitentiaire (Snepap)-FSU, selon qui « les chiffres de la délinquance prouvent mois après mois la totale inefficacité de la politique pénale menée ces dernières années et bien souvent guidée par des objectifs de maintien de l'ordre à courte vue ». L'Observatoire international des prisons demande pour sa part au Premier ministre de « réaffirmer l'adhésion de la France au principe de l'aménagement des peines », rappelant que les recommandations du Conseil de l'Europe portent notamment sur « l'individualisation des sanctions et des mesures et la réintégration sociale des délinquants ».