Cette formation ne risque-t-elle pas de normaliser des pratiques, nées justement hors des sentiers battus ?
C'est la crainte de certains permanents. Ce projet - que nous portons au Gerpla depuis 2002 - va pourtant dans le sens de l'histoire. Après la reconnaissance du métier de permanent que nous avons obtenue dans la loi 2002-2, sa professionnalisation est inéluctable. A tel point d'ailleurs que certains organismes extérieurs ont tenté de faire des offres de formation. En outre, depuis cette loi, bon nombre de familles d'accueil se sont transformées en lieux de vie et d'accueil (LVA) sans en avoir la culture, et sont en grande difficulté. Il y a donc une forte attente de formation, comme le montre la consultation que nous avons menée auprès des 400 lieux de vie existants. Seule une dizaine est farouchement opposée à notre projet.
Pourquoi ne pas avoir intégré un cursus classique en travail social ?
Beaucoup de permanents ont un diplôme dans le secteur social. Or les cursus ne préparent ni à la gestion du LVA, ni à une prise en charge qui repose sur le « vivre avec » et le « partage réfléchi du quotidien ». D'où notre projet de formation spécifique et accessible sans prérequis afin de préserver la diversité des personnalités et des projets. Parmi les préinscrits, nous avons ainsi un candidat doté d'un CAP de viticulture, une institutrice...
Il s'agit d'une formation « à la carte »...
Plutôt qu'une formation standard, nous avons construit un itinéraire adapté aux profils des candidats, qui peuvent être des permanents en activité ou des personnes désireuses de travailler en LVA ou d'en ouvrir un. Le parcours comprend ainsi trois phases modulables alternant chacune des regroupements de quelques jours sur une thématique à l'Institut Saint-Simon, notre partenaire, et des stages en lieux de vie. Il peut durer de 4 à 18 mois, selon les besoins (3).
Vous mettez en avant le « compagnonnage »...
C'est la colonne vertébrale de la démarche pédagogique, qui privilégie la transmission des compétences entre pairs. Un « comité de compagnonnage », constitué de permanents et de formateurs, aide le stagiaire à circuler tout au long du parcours : il le conseille pour définir son projet personnalisé, l'épaule pour trouver un stage adapté à ses souhaits...
Avec à la clé un diplôme ?
Non. La majorité des lieux d'accueil ne sont pas favorables à la création d'un nouveau diplôme. La Fédération nationale des lieux de vie et d'accueil (4) craint que les départements n'en fassent un préalable pour autoriser la création de ces microstructures. C'est la raison pour laquelle elle a refusé de soutenir officiellement notre projet. Nous avons pris acte de ces réticences et nous proposons un dispositif de professionnalisation et non de certification. Un « livret de compagnonnage », où sont consignés les étapes du cheminement, les travaux réalisés et l'avis du « comité de compagnonnage », est ainsi remis à la personne.
La pratique en LVA n'était guère théorisée jusqu'ici...
Justement, l'un de nos objectifs est aussi de contribuer à l'analyse et à la formalisation des pratiques, sur lesquelles il y a peu d'écrits. Un « comité scientifique », en cours de constitution (5), contribuera à la constitution d'un corpus spécifique aux LVA.
(1) Renseignements sur
(2) Groupe d'échange et de recherche pour et sur la pratique en lieu d'accueil.
(3) Le coût peut aller de 1 000 à 7 020 € , qui peut être pris en charge par Unifaf, porteur également du dispositif, ou tout autre OPCA.
(4) Qui rassemble environ 200 lieux de vie sur 400.
(5) Jacques Ladsous, vice-président des CEMEA, et Paul Fustier, sociologue, sont d'ores et déjà pressentis.