Avant même qu'il ne soit officialisé, le tournant donné à l'INJEP (Institut national de la jeunesse et de l'éducation populaire) a été entériné par le Livre vert « pour une nouvelle politique en faveur de la jeunesse » diffusé en juillet dernier. Celui-ci propose de conforter l'INJEP « dans son rôle d'expertise pour la jeunesse », sur lequel pourraient s'appuyer les pouvoirs publics et une nouvelle instance représentative de la jeunesse. Cette dernière serait créée sur le modèle du Conseil économique, social et environnemental, en remplacement de l'actuel Conseil national de la jeunesse. Elle serait un organisme indépendant du gouvernement produisant sa propre expertise.
Ces pistes s'inscrivent dans la droite ligne des nouvelles orientations de l'INJEP. Conséquence de la révision générale des politiques publiques, l'établissement public, placé sous la tutelle de la direction de la jeunesse, de l'éducation populaire et de la vie associative, a fait, en 2008, l'objet d'une décision de restructuration, accompagnée d'une baisse de près de la moitié de ses effectifs. Une nouvelle configuration, adoptée le 12 juin par son conseil d'administration et effective depuis le 1er septembre, entérine son nouveau projet. « Un décret en préparation devrait bientôt acter les nouvelles missions de l'INJEP, qui se recentre sur les activités d'étude et de recherche sur les politiques jeunesse, d'un point de vue interministériel, avec la vocation de les développer », explique Olivier Toche, son nouveau directeur depuis mai, par ailleurs ancien inspecteur général des affaires sociales.
Selon le projet de décret, l'INJEP aura pour mission d'observer et d'analyser les pratiques et les attentes des jeunes, ainsi que les politiques et les actions qui leur sont destinées, et, fait nouveau, d'évaluer les politiques publiques. Il devra, en outre, valoriser et diffuser ses expertises, qui pourront avoir une dimension européenne, et se constituer en centre de ressources documentaire et pédagogique. Il pourra aussi réaliser, « à la demande de l'Etat, des collectivités territoriales ou d'associations, des activités de formation, d'étude, de conseil ou de diagnostic », précise Olivier Toche. L'INJEP, qui passe, selon son directeur, d'un budget de 16 à 14 millions d'euros (tous crédits confondus), conserve sa fonction d'agence française chargée, au nom de la Commission européenne, de la mise en oeuvre du programme européen « Jeunesse en action ». Le projet de décret instaure, par ailleurs, deux nouveautés dans la vie de la structure : la création d'un conseil scientifique et l'entrée dans son conseil d'administration de représentants de collectivités territoriales. « L'INJEP aura un rôle novateur de pivot entre la recherche et l'aide à la décision politique, se félicite Olivier Toche. Je souhaite porter un projet de redynamisation de l'établissement en l'instituant comme centre d'expertise et laboratoire d'idées. » Et d'ajouter que sa priorité est également « sociale. Qu'on ne laisse pas sur le carreau un certain nombre de personnels ».
Si 90 % de ceux concernés par la diminution des effectifs ont été reclassés, et malgré ces nouvelles orientations, les salariés restent inquiets, tant sur leurs conditions de travail que sur l'avenir de leurs activités. « Il y a encore des incertitudes sur les modalités de mise en oeuvre de la nouvelle organisation et sur les modes de relations contractuelles avec l'Etat », pointe Annie Oberti, représentante des personnels au conseil d'administration de l'INJEP. Des doutes subsistent également sur les nouvelles priorités qui seront données à l'établissement, avec des moyens réduits : « Comment, notamment, vont être prises en compte les préconisations du Livre vert, qui propose que l'institut assure le secrétariat de la nouvelle instance représentative des jeunes et qu'il pourrait être saisi par cette dernière, au même titre que par le gouvernement et le Parlement ? »
Le personnel, qui regrette la disparition de l'activité de formation proposée à l'initiative de l'institut, est par ailleurs vigilant sur son champ d'intervention : « L'éducation populaire semble devenir le parent pauvre de nos missions », déplore Annie Oberti. A ces interrogations s'ajoute une incertitude sur la date du déménagement de l'établissement, qui devrait, en 2010, quitter Marly-Le-Roi (Yvelines) pour rejoindre les locaux de la direction de la jeunesse, de l'éducation populaire et de la vie associative, à Paris.