S'en sortir

S'opposant à l'image des jeunes des cités véhiculée par les médias lors des émeutes de novembre 2005, des professionnels des centres de formation et des écoles de production du Réseau ignatien, adossé à des institutions proches de la Compagnie de Jésus(1), ont décidé de donner un coup de projecteur sur les trajectoires ascendantes des 3 000 jeunes accueillis chaque année dans leurs locaux. « En donnant à entendre la parole de quelques jeunes qui traversent des difficultés scolaires, sociales et professionnelles, nous souhaitons entrouvrir pour tous les autres les portes closes des jugements sans appel », peut-on lire dans l'avant-propos de Georges Jousse, coordinateur du Réseau. Au fil des récits recueillis dans l'ouvrage Plus forts que l'échec, 39 jeunes exposent à la fois leur volonté de vivre responsables et les multiples obstacles qu'ils ont rencontrés. Ils évoquent leurs hésitations, leurs peurs, leurs échecs et leurs réussites. Ainsi Joseph, né en Angola, a vu toute sa famille arrêtée par la police. A 16 ans, il s'enfuit, seul, et est laissé par un passeur dans un village du sud de la France. Aujourd'hui, il est tourneur à Toulouse. A l'âge de 20 ans, Lucien a arrêté l'école en troisième parce qu'il n'était « pas intéressé ». La mission locale l'oriente vers l'Institut catholique des arts et métiers (ICAM), et il s'éloigne alors de son entourage « délinquant » - « Je voyais bien que les copains essaieraient de m'entraîner là-dedans. » Malgré son bac professionnel et des stages en entreprise réussis, le jeune homme manque toujours de confiance en lui... Noëlle, apprentie en pâtisserie, fugue sur un coup de tête. A 16 ans, elle vit dans des foyers de jeunes travailleurs, un peu à la rue aussi, et tombe dans la drogue. Il lui faudra plusieurs années et un traumatisme brutal pour lui donner l'envie de s'en sortir. Après une désintoxication, elle entre en formation de chaudronnerie à l'ICAM et retourne vivre chez ses parents. Aujourd'hui, elle reste insatisfaite, fragile encore...