DE LA QUÊTE DE SOI À LA DÉRIVE... A l'instar des oiseaux migrateurs attirés par les rassemblements estivaux de leurs congénères, des essaims de jeunes en rupture de ban ont commencé d'apparaître sur la scène publique lors de grands festivals musicaux, il y a quelque vingt ans. Depuis, ils ne l'ont plus quittée, cependant que d'épisodique leur visibilité a pris un tour permanent. Qui sont ces zonard(e)s qui, avec leurs chiens, squattent les quartiers marchands et les abords de gares ? Il y a « ceux qui se cherchent, ceux qui se fuient et ceux qui se perdent », analyse François Chobeaux, dans ce nouvel ouvrage. Parfois qualifiés de « punks en chocolat » par les marginaux purs et durs, les jeunes qui se cherchent semblent avoir vécu des enfances équilibrées les ayant conduits à avoir une personnalité affirmée et épanouie. Ils sont en quelque sorte de passage sur les franges de l'errance, dans une quête d'eux-mêmes avant l'entrée définitive dans la vie adulte. Souvent, d'ailleurs, dans des métiers tournés vers autrui comme ceux du travail social, explique le responsable national des secteurs « social » et « jeunesse » des Centres d'entraînement aux méthodes d'éducation active (CEMEA). Pour les jeunes qui se fuient, marqués par une enfance et/ou une adolescence difficiles, l'errance est clairement une dérive, où l'agir impulsif tient lieu d'être, tandis que les hospitalisations sous contrainte et les séjours en prison font office de limites. Au bout de leurs longs parcours de fuite, la stabilisation de ces jeunes adultes peut se réaliser grâce à l'accompagnement social, notamment en milieu rural. Mais elle n'est pas simple et, pour certains, le voyage se poursuit dans une dynamique de perte de soi. Trop en souffrance pour pouvoir se protéger et se ressaisir, ceux qui se perdent, « ces «vieux toxicos», alcooliques de 35, 40 ans, qui arborent toujours les signes de la «zone» et de la «punkitude» », qui survivent par exemple grâce à une allocation aux adultes handicapés, semblent plongés dans un irrésistible processus de mort lente. Pour aider ces différents types de « nomades du vide » - le titre du premier ouvrage qu'il leur avait consacré -, François Chobeaux prône un travail de relation et de « portage » destiné à amener les intéressés à faire des choix le plus lucidement possible, quelle que soit la nature de ceux-ci.
Intervenir auprès des jeunes en errance - François Chobeaux - Ed. La Découverte - 16 €