Recevoir la newsletter

Les AVS bientôt réembauchées par des associations : un retour en arrière controversé

Article réservé aux abonnés

Face à la pression du terrain, le gouvernement propose que les auxiliaires de vie scolaire en fin de contrat passent sous la coupe des associations. Une solution a minima qui ne répond pas au problème de fond, à savoir le statut de ces personnels.

«Un petit pas », telle est la réaction de l'Unaïsse (Union nationale pour l'avenir de l'inclusion scolaire, sociale et éducative), après le vote d'un amendement permettant aux auxiliaires de vie scolaire (AVS) en fin de contrat d'être embauchés par des associations. Ajouté en dernière minute par le gouvernement au projet de loi « mobilité et parcours professionnels dans la fonction publique » qui achève son parcours parlementaire, cet amendement reprend une proposition formulée par la Fnaseph (Fédération nationale des associations au service des élèves présentant une situation de handicap). Aux côtés des familles et des syndicats d'enseignants, celle-ci s'est mobilisée depuis plusieurs mois pour obtenir la reconduction des contrats des 1 330 AVS, qui ont pris fin le 30 juin dernier (1). Le texte prévoit qu'une association ou un groupement d'associations du secteur du handicap « ayant conclu une convention avec le ministère de l'Education nationale » puisse recruter les personnels. Cette solution pourrait être mise en place pour les 3 700 emplois de vie scolaire (EVS), faisant fonction d'AVS et dont les contrats aidés sont aussi arrivés à leur terme (2).

Qualifié de « solution innovante » par Nadine Morano, secrétaire d'Etat à la famille et à la solidarité, cet amendement n'est toutefois qu'une mesure minimale. « Il permet de ne pas laisser les compétences des AVS en fin de contrat s'échapper », concède Mona Bordeau, trésorière de l'Unaïsse, mais il ne peut être qu'une « étape transitoire », martèle l'Unapei (Union nationale des associations de parents, de personnes handicapées mentales et de leurs amis). La formule proposée n'est en fait qu'une reprise de ce qui existait avant 2003. « Les accompagnants scolaires pour les enfants handicapés existent depuis 1982. Ils étaient gérés par les associations jusqu'à ce que l'Etat les prenne en charge en 2003 », explique Mona Bordeau. C'est donc « un pas en arrière pour les associations. Elles n'y vont pas de gaieté de coeur, et certaines ne veulent pas y retourner ». C'est en fait « une mauvaise réponse à un vrai problème », s'agace l'APF (Association des paralysés de France. Presque une farce si l'on considère, comme l'explique Dominique Leboiteux, chef de projet social et médico-social à la Fédération des PEP, que le basculement en 2003 des AVS vers l'Education nationale a « laissé des traces. Nos associations ont dû licencier ces personnels pour qu'ils puissent être embauchés en contrat de droit public par l'Etat, ce qui leur a coûté cher ! »

Il n'est pas sûr non plus que certains problèmes du dispositif antérieur ne se posent pas à nouveau, comme les inégalités territoriales. En effet, les associations volontaires pour assurer la gestion de ces personnels ne sont pas présentes sur l'ensemble du territoire et l'Education nationale ne pourra pas signer des conventions dans tous les départements. « Quelle sera alors l'opposabilité du droit à l'éducation - dont l'Etat est garant depuis la loi «handicap» de 2005 - si le conventionnement ne permet pas de couvrir l'ensemble du territoire ? », s'interroge l'APF. Pour autant, certaines fédérations, comme l'Unapei ou la Fédération des PEP, ont déjà incité leurs adhérents à prendre en charge « à titre provisoire » les AVS. « Nous proposons aux associations de se regrouper avec d'autres, de créer des collectifs comme cela existait avant 2003, pour gérer les AVS et créer de vrais services, à partir de la mutualisation des ressources », indique Dominique Leboiteux.

A cela s'ajoutent certaines inconnues que devra lever le décret d'application de l'amendement. Comment les inspecteurs d'académie contacteront-ils les AVS pour leur proposer un nouveau contrat ? Le gouvernement pourrait notamment demander aux familles dont l'enfant était accompagné par un AVS de se manifester auprès de ces fonctionnaires (3).

Enfin, quid des moyens financiers alloués aux associations pour assurer cette mission ? Eric Woerth, ministre du Budget et de la Fonction publique, a assuré, en séance à l'Assemblée nationale, que les associations seraient remboursées par l'Etat. Mais que vaut cet engagement oral ? L'Assemblée des départements de France (ADF) craint déjà un désengagement de l'Etat et « attend de voir l'inscription de ces transferts aux associations dans les budgets ».

Mais au-delà, reste la question de fond, à savoir la précarisation des AVS. Ce problème de la durée limitée des contrats « est connu de tous depuis six ans », s'indigne l'APF. Et les associations n'ont cessé d'alerter sur les conséquences de cette situation sur la scolarisation des enfants handicapés, mais aussi sur le devenir des auxiliaires. Dans ce sens, l'ADF condamne l'attitude du ministère de l'Education nationale, qui n'a jamais prévu d'accompagnement de ces salariés en contrat précaire, ni en termes de formation, ni en termes de suivi de projet d'insertion professionnelle. En réponse à ces critiques, Luc Chatel, ministre de l'Education nationale, a demandé aux inspections générales, un audit des dispositifs de formation et de validation de compétences dont ces personnes ont bénéficié dans le cadre de leurs contrats. Il a par ailleurs rappelé que 4 700 AVS avaient été recrutés entre 2007 et 2008, sans mentionner toutefois que ces derniers ont signé un contrat d'éducation de un an renouvelable cinq fois !

Aujourd'hui, tous les espoirs sont tournés vers la mission de Marie-Anne Montchamp, qui doit déboucher sur la création d'un métier d'accompagnant pendant tous les temps de l'enfant (scolaire, périscolaire, loisirs...), mais qui, selon certaines associations, avance à petits pas. Les conclusions de cette dernière répondront-elle à la demande de la Fnaseph, à savoir la création d'un dispositif pérenne et professionnel permettant de faire face aux besoins d'accompagnement des enfants, adolescents et jeunes adultes handicapés ? La fédération prévoit d'ailleurs de mettre en place en septembre une plateforme nationale de réflexion et de propositions sur le sujet, réunissant des associations, des organisations syndicales et des personnalités.

Notes

(1) Voir ASH du 26-06-09, p. 14.

(2) Ce dispositif ne résout pas le problème de la grande majorité des EVS (près de 30 000) dont les contrats aidés ont pris fin le 30 juin. Laurent Wauquiez, secrétaire d'Etat chargé de l'emploi, vient néanmoins de signer un accord-cadre national avec le président du Groupe O2 spécialisé dans les services aux particuliers et le directeur général adjoint de Pôle emploi, pour « favoriser le reclassemen des EVS » . Le Groupe O2 prévoit de recruter 2 000 personnes pour septembre 2009 en CDI.

(3) Sur son forum, l'Unaïsse propose aux AVS de télécharger une lettre à envoyer à leur inspecteur d'académie, pour faire connaître leur souhait de continuer à être accompagnant scolaire - http://unaisse.free.fr/forum/.

Sur le terrain

S'abonner
Div qui contient le message d'alerte
Se connecter

Identifiez-vous

Champ obligatoire Mot de passe obligatoire
Mot de passe oublié

Vous êtes abonné, mais vous n'avez pas vos identifiants pour le site ?

Contactez le service client 01.40.05.23.15

par mail

Recruteurs

Rendez-vous sur votre espace recruteur.

Espace recruteur