« En 1999, mon fils est né. Nous vivions à la rue, et mon salaire était de 10 € par mois. J'ai pensé que je n'avais pas d'autre choix que de partir. Je fus embauché dans une usine en Allemagne par un étranger qui me promit un bon salaire, 2 000 € par mois. Au lieu de cela, il a pris mon passeport. Si je protestais, on me tabassait. J'ai prié tous les jours pour rentrer au pays. Une nuit, j'ai sauté par-dessus la barrière et je me suis évadé. » L' histoire de l'Ukrainien Victor n'est qu'une des malheureuses destinées migratoires, parmi tant d'autres, que retrace l'exposition photo « Open See », de Jim Goldberg. Dans un accrochage alambiqué aux légendes parfois parcellaires, le photographe américain de l'agence Magnum présente des Polaroid et des films, des manuscrits et des objets... qui dressent tous les portraits de victimes : réfugiés économiques, travailleurs forcés, esclaves sexuels kidnappés ou dupés par le mirage économique. Son parcours débute en Grèce, où 1,5 à 2 millions d'individus vivent dans la clandestinité. Il se poursuit en Ukraine, puis dans plusieurs pays africains touchés par les guerres ethniques ou le choléra, pour finir au coeur des violences communautaires de l'Inde et du Bangladesh. A la fondation Henri Cartier-Bresson sont présentées une centaine de photographies qui retracent cette odyssée, certaines griffonnées, d'autres ornées de collages. Jim Goldberg a raturé des visages, souligné les cicatrices. Sur la photo d'une jeune Moldave, on peut lire : « I am not for sale anymore » (« Je ne suis plus à vendre »), tandis que sur l'image suivante est annoté : « I'm a whore » (« Je suis une pute »), comme un appel à l'aide...
Open See - Jim Goldberg - Jusqu'au 26 juillet - Fondation Henri Cartier-Bresson - 2, impasse Lebouis - 75014 Paris - Ouvert du mardi au dimanche, de 13 h à 18 h 30, le samedi de 11 h à 18 h 45, nocturne le mercredi jusqu'à 20 h 30 - 3 € et 6 €