C'est dans le bois que les jeunes Lebrac, Grangibus et La Crique, de la bande des Longeverne, se bagarrent contre ceux de Verlans. Leur butin : des boutons. Et quand l'un des leurs va trouver les ennemis pour leur donner la cachette, il ignore encore que Lebrac va le lui faire payer chèrement.
L'histoire se règle donc entre eux. Qu'arriverait-il aujourd'hui aux héros du roman La guerre des boutons, écrit par Louis Pergaud en 1912 et porté à l'écran par Yves Robert en 1962 ? Bertrand Rothé, professeur d'économie, a fait relire le livre à des policiers, des juges, un médecin et un éducateur d'un tribunal pour enfants, leur demandant comment ils réagiraient face à de tels actes. Il a ainsi réécrit l'histoire : après avoir rossé le traître, Lebrac est convoqué par le proviseur, emmené dans un véhicule de police, puis interrogé. Devant la gravité des faits et pour éviter de nouvelles violences, le parquet décide qu'il sera jugé rapidement, dans le cadre de la présentation immédiate. En attendant, il est incarcéré cinq jours à Fleury-Mérogis (Essonne). Et condamné finalement à trois mois de prison ferme.
La démonstration est convaincante. Bien entendu, Bertrand Rothé a choisi les conditions qui mènent au résultat le plus dramatique. Et c'est tout son intérêt d'attirer l'attention sur la question que pose le sociologue Laurent Bonelli, dans une postface efficacement synthétique : « Comment est-on passé de l'idée que l'enfance irrégulière était en quelque sorte une victime de l'ordre social et qu'elle pouvait être «réintégrée», à celle de l'altérité irréductible des mineurs délinquants qu'il faudrait punir sans faiblesse, voire retrancher de la société ? »
Lebrac, trois mois de prison - Bertrand Rothé, postface de Laurent Bonelli - Ed. Le Seuil - 18 €