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Conflit ouvert entre le secteur de la propreté et les régies de quartier

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A la suite de l'« affaire » de Marseille, où deux régies de quartier ont, en novembre 2007, remporté le marché du nettoyage des foyers Adoma (1), la bataille se durcit entre les entreprises de propreté et les régies. En cause : la non-application par ces dernières de l'« annexe 7 » de la convention collective nationale du secteur de la propreté, selon laquelle les nouveaux attributaires d'un marché reprennent les contrats de travail du prestataire sortant. Cette particularité a entraîné un imbroglio juridique pour 40 salariés marseillais qui se sont retrouvés sans emploi après la passation de marché. Ils commencent pourtant à y voir plus clair sur leur sort : un jugement rendu, pour une partie d'entre eux, par la cour d'appel d'Aix-en-Provence le 28 mai dernier conclut qu'ils sont restés au service des prestataires sortants. Interpellé sur le dossier, le Haut Commissaire aux solidarités actives contre la pauvreté, Martin Hirsch, indique pour sa part avoir saisi le préfet de région le 22 juin pour « lui demander de mettre tout en oeuvre pour faciliter le retour à l'emploi » des personnes.

Mais pour la Fédération des entreprises de propreté (FEP), la situation est symptomatique de ce qu'elle estime être « une concurrence commerciale et sociale quasi déloyale ». Pour la première fois, explique Bertrand Castagné, président de la commission sociale de la FEP, « la question se pose pour un marché important, donné par un donneur d'ordre national. C'est pourquoi nous voulons tirer la sonnette d'alarme. » En n'appliquant pas l'« annexe 7 » de la convention collective du secteur, argumente la FEP, les régies de quartier « constituées en association bénéficient des avantages d'un tel statut juridique sans pour autant être soumises aux contraintes qui sont celles des entreprises d'insertion ou des entreprises de propreté », en l'occurrence celle de garantir aux personnels « un statut protecteur ». Pour changer la donne, la fédération, ainsi que les cinq organisations syndicales représentatives des salariés du secteur, ont signé début mai un avenant à la convention collective. Elles demandent au ministère du Travail d'étendre l'application de l'« annexe 7 » aux associations à but non lucratif, à l'exception des ESAT (établissements et services d'aide par le travail). « C'est avant tout un acte politique auprès des pouvoirs publics, précise Bertrand Castagné, sachant qu'il faudra aller au-delà de la convention, par la voie réglementaire ou législative, pour étendre cette annexe aux associations. »

Le Comité national de liaison des régies de quartier (CNLRQ) n'apprécie gère l'initiative, qu'il considère comme une attaque infondée. « Le fait que nous soyons en train de moraliser le secteur commence-t-il à gêner ? », lance Zinn-Din Boukhenaïssi, son délégué général. Sur le fond du dossier, explique-t-il, « l'«annexe 7» de la convention collective du secteur de la propreté ne s'applique pas aux régies, comme en a décidé la jurisprudence, tout simplement parce que ces dernières disposent depuis 1999 de leur propre accord collectif national, que nous sommes en train de transformer en convention collective. Celui-ci précise que, l'objectif des régies étant la satisfaction des besoins sociaux exprimés par les habitants du quartier, il est impossible de leur définir une activité dominante pouvant conditionner l'application d'une convention collective de branche. Ce que rappelle d'ailleurs la cour d'appel d'Aix-en-Provence dans son arrêt du 28 mai. » Par ailleurs, poursuit-il, plusieurs marchés ont été à l'inverse perdus par des régies au profit d'entreprises du secteur de la propreté, qui ont repris leur activité sans reprendre les contrats de travail, « invoquant la non-application réciproque de l'«annexe 7» ». Bertrand Castagné, lui, avance une autre raison : « Les contrats aidés applicables aux associations et aux entreprises publiques ne sont pas transférables aux entreprises privés. » Alors que la FEP dénonce les bas tarifs des régies, « les régies perdent des marchés plus souvent en raison des tarifs dissuasifs pratiqués par certaines entreprises qui font du dumping social, répond de son côté Zinn-Din Boukhenaïssi. Et sur de petits marchés, il peut y avoir des arrangements locaux, les régies ou les entreprises reprenant tout ou partie des salariés. » Pour faire entendre son point de vue, le CNLRQ souhaite être reçu par les cabinets de Martin Hirsch et du secrétaire d'Etat chargé de l'emploi, Laurent Wauquiez. Il étudie parallèlement la possibilité d'attaquer la FEP en diffamation.

Au-delà, le CNLRQ appelle à une « commande publique socialement responsable » pour ne pas mettre en concurrence des prestataires aux vocations différentes. « L'appel d'offres d'Adoma comportait une clause d'insertion selon l'article 14 du code des marchés publics, qui prévoit l'achat d'une prestation technique avec une dimension d'insertion, explique Zinn-Din Boukhenaïssi. La situation n'aurait pas été la même s'il y avait eu recours à l'article 30, qui, lui, prévoit l'achat d'une prestation d'insertion et de qualification dont le moyen est une prestation technique. »

Notes

(1) Voir ASH n° 2612 du 5-06-09, p. 24.

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