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MINEURS ÉTRANGERS ERRANTS : INTÉGRER DANS LE CHAMP ÉDUCATIF LA QUESTION DU RETOUR

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La Fédération jeunes errants et le Forum européen des villes pour la sécurité urbaine devaient rendre publique, à l'occasion d'un colloque organisé le 18 juin à Marseille, une étude intitulée « Jeunes en errance : les conditions d'un retour » (1). En réponse à un appel à projets de la Commission européenne dans le cadre du programme Return, celle-ci vise à améliorer les pratiques professionnelles, dans la recherche de l'intérêt supérieur de l'enfant, explique Dominique Lodwick, ancienne directrice de l'association Jeunes errants et bénévole de la fédération (2).

Pourquoi cette étude sur ce sujet sensible du retour ?

En 15 ans d'existence, Jeunes errants a capitalisé une masse de connaissances sur l'accueil des mineurs isolés étrangers, la reconstitution de leur parcours, le travail fait avec leurs familles. Alors que les Etats abordent la question des mineurs isolés uniquement sous l'aspect du retour, et que des accords bilatéraux sont signés dans ce sens, nous savons que, chaque fois qu'un retour est réussi, ce n'est pas au nom d'une logique globale, mais parce que les partenaires ont effectué avec les enfants le travail habituellement mené avec tous les jeunes en errance. Nous avons pensé avoir notre place dans un projet visant à améliorer les pratiques et proposé une étude de faisabilité sur la réintégration des mineurs isolés victimes ou potentiellement victimes de la traite, à partir d'un nombre significatif de cas à Marseille, Barcelone, Turin, Innsbruck et Bucarest. Il s'agissait d'aborder le sujet non pas sous l'angle de l'application de la loi, mais des droits de l'Homme.

Vous abordez spécifiquement la traite des êtres humains...

La lutte contre le trafic illégal de migrants est toujours avancée comme un argument dans les débats publics concernant les mineurs isolés. Or il faut distinguer ce problème de celui de la traite, qui ne tire pas seulement profit du coût du voyage, mais aussi de l'exploitation des victimes sous des formes diverses - la prostitution, le travail forcé, les activités illicites, la mendicité, ou encore le mariage et l'adoption. Tous les enfants en errance ne sont pas victimes de la traite, mais ils y sont particulièrement exposés, d'autant plus que l'on ne leur offre pas de prise en charge. L'étude approfondie de 600 dossiers nous a permis de dresser une typologie de profils et de repérer ces vulnérabilités, de donner des éléments de compréhension des trajectoires - fugue, mandat parental, promesse de gain, exil... - et des pistes de résolution.

Quelles sont les bonnes conditions d'un retour ?

Elles reposent sur trois axes. Le premier : travailler au « cas par cas » à partir d'une évaluation afin d'envisager une solution « durable » avec le mineur, impliquant que ses droits seront garantis sur le long terme, ce qui nécessite des équipes spécialisées. La deuxième préconisation est de ne pas travailler seul : la question, qui ne doit pas être enfermée dans le débat sur les compétences de l'Etat et du conseil général, requiert de la pluridisciplinarité - un peu de justice, de socio-éducatif, de psychologie, de préfecture, de police... - et de la cotraitance. Enfin, il est nécessaire de développer des stratégies et des solidarités transnationales. Si les institutions ne sont pas en contact permanent avec leurs homologues des pays d'origine, on n'avancera pas. Or, aujourd'hui, les juges doivent demander une autorisation à la chancellerie avant de pouvoir contacter un confrère étranger ! Rares d'ailleurs sont les investigations judiciaires dans ce domaine.

Pourquoi lier la question du retour à celle de la protection ?

Il ne faut pas confondre la position militante pour le meilleur accueil possible, avec un statut, une perspective de régularisation, et celle du professionnel, du pédagogue, qui doit travailler avec l'enfant et sa famille afin de lui permettre de se reconstruire, d'accéder à l'autonomie, même si cela n'aboutit pas à la réintégration dans le pays d'origine ou à la réunification avec les parents. Ne pas évacuer cette question du champ éducatif pourrait permettre aux travailleurs sociaux, actuellement démunis face à ces situations, de renouer avec leurs fondamentaux.

Notes

(1) Portée par le Forum européen des villes pour la sécurité urbaine, réalisée par la Fédération jeunes errants et Terre des hommes.

(2) La Fédération jeunes errants a été créée en 2008 après la mise en liquidation judiciaire de l'association du même nom, afin de continuer à faire vivre son capital de ressources - FJE : c/o Bruschi - 133, rue de Rome - 13006 Marseille - jeunes.errants.international@gmail.com - jeuneserrantsinternational.wordpress.com.

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