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SSIG : en dehors ou à l'intérieur du marché ?

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L'avenir des services sociaux dans le cadre du « marché intérieur ouvert et concurrentiel » de l'Union européenne constitue l'un des enjeux majeurs du renouvellement du Parlement européen, le 7 juin. Du fait du refus de la Commission européenne de proposer une directive spécifique sur les services sociaux d'intérêt général (SSIG), ces derniers se trouvent soumis à la jurisprudence des services d'intérêt économique général (SIEG). Et se voient donc imposer les exigences du mandatement plus rigoureuses que le système d'encadrement français. Dans ce contexte, et alors que la France doit transposer en droit interne, avant la fin de l'année, la directive « services », comment préserver la spécificité des services sociaux ?

Les professionnels du champ social, réunis au sein de MP4, qui avaient lancé une pétition afin d'interpeller les interlocuteurs nationaux et européens sur cette question (1), font circuler une « recommandation » à l'intention des futurs députés européens (2). Rédigée par Joël Henry, ancien président du Carrefour national de l'action éducative en milieu ouvert (Cnaemo), elle vise à obtenir au niveau communautaire le reclassement des SSIG dans la catégorie des services non économiques d'intérêt général (SNEIG). « En France et ailleurs en Europe, les services sociaux sont des services d'intérêt général situés hors marché, chargés de remplir des missions de service public consistant à répondre à des demandes et à des besoins généraux et/ou spécifiques émanant de la population », défend Joël Henry, estimant que les services sociaux sont des services non économiques (3). Cet argumentaire, qui entend lever toutes les ambiguïtés actuelles en excluant ces services de la compétence communautaire et en les renvoyant aux seules lois nationales, est-il toutefois défendable ?

« Malheureusement cette solution, aussi séduisante soit-elle, n'est pas possible », argumente Laurent Ghekiere, animateur du Collectif SSIG, qui réunit 19 unions et fédérations associatives (dont l'Uniopss, la FNARS, l'USH ou la FEHAP). « 90 % des services sociaux sont des services économiques au sens du Traité. Dès lors que les associations peuvent faire des offres concurrentes sur un marché donné (petite enfance, logement social, personnes âgées...) pour accéder à des financements publics, elles sont considérées comme exerçant une activité économique au sens du Traité », argumente-t-il. D'où la demande du Collectif SSIG d'adapter le droit communautaire applicable aux activités économiques aux spécificités d'organisation et de financement des services sociaux (4). Vouloir sortir ces derniers du cadre des SIEG les exposerait inévitablement, selon Laurent Ghekiere, au risque d'être requalifiés comme tels par la Cour de justice des communautés européennes, ce qui entraînerait une grande insécurité juridique.

« Certes, mais c'est justement l'orientation libérale du droit communautaire qui considère la plupart des services sociaux comme des entreprises qu'il faut faire évoluer », rétorque Joël Henry. « Ce qui suppose une tout autre conception de l'Europe sociale, notamment par un changement de majorité au Parlement européen » - à l'heure actuelle bien peu probable. Mais on peut aussi imaginer, défend l'ancien président du Cnaemo, l'action volontariste d'un Etat, la France, par exemple, dans le cadre de la transposition de la directive « services », qui décide de considérer ses services sociaux comme des services non économiques afin de faire pression sur l'Union européenne. Utopique ? Pas si sûr si la mobilisation est suffisamment importante, estime le mouvement MP4, qui entend bien se démarquer de la démarche pragmatique du Collectif SSIG par une stratégie de résistance à « une marchandisation des services sociaux ».

Notes

(1) Voir ASH n° 2598 du 27-02-09, p. 30.

(2) Téléchargeable sur www.mp4-champsocial.org.

(3) Voir la « tribune libre » rédigée sur ce sujet par Joël Henry, ASH n° 2579 du 31-10-08, p. 25.

(4) Il a publié en ce sens un « mémorandum » à l'intention des futurs eurodéputés - Voir ASH n° 2604 du 10-04-09, p. 28.

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