La direction de la sécurité sociale (DSS) explicite, dans une circulaire, les modalités de récupération par les caisses primaires d'assurance maladie (CPAM) de la participation forfaitaire de 1 € due sur les consultations, les analyses et les examens radiologiques (1) et des franchises médicales applicables, dans certaines conditions, aux médicaments, aux transports sanitaires et aux actes effectués par un auxiliaire médical (2).
En cas de dispense d'avance des frais, l'article L. 322-2 du code de la sécurité sociale prévoit que les sommes dues au titre des franchises médicales peuvent être versées directement par l'assuré à sa CPAM ou récupérées auprès de l'assuré sur les prestations de toute nature à venir. Mais l'article D. 322-3 du même code, modifié par un décret du 26 décembre 2007 (3), stipule quant à lui que les caisses sont tenues d'imputer les sommes dues au titre du forfait de 1 € sur les premières prestations qu'elles versent ultérieurement à l'assuré. Une solution étendue par l'article D. 322-9 aux franchises médicales. En janvier 2008, l'Association des accidentés de la vie (FNATH) et l'Association nationale de défense des victimes de l'amiante (Andeva) avaient saisi le Conseil d'Etat d'un recours en annulation du décret du 26 décembre 2007 au motif notamment qu'il imposait le seul prélèvement sur les prestations à venir. Le 6 mai dernier, la Haute Juridiction a en partie donné raison aux associations en annulant la disposition litigieuse au motif qu'elle méconnaissait les dispositions législatives (4). Devançant cette décision, la DSS explique déjà, dans la présente circulaire, qu'il faudrait en conséquence retenir, à compter de la date d'annulation de la disposition en cause, l'ancienne rédaction de l'article D. 322-3, « moins restrictive et contraignante » que la version issue du décret du 26 décembre 2007, a expliqué la DSS aux ASH. En pratique, la CPAM dont relève l'assuré n'est donc plus « tenue d'imputer » la somme due au titre du forfait de 1 € et de la franchise médicale sur les futures prestations, une façon de lui rappeler qu'elle peut également réclamer cette somme directement auprès de l'intéressé.
La récupération sur les prestations ultérieures déroge ainsi à la règle d'insaisissabilité des prestations, la loi n'excluant aucune prestation du dispositif de compensation. Sont ainsi concernées tant les prestations en nature qu'en espèces. Toutefois, précise la circulaire, pour les indemnités journalières (5) et les pensions d'invalidité, qui sont cessibles et saisissables, le principe de compensation doit s'appliquer dans les mêmes limites que pour les salaires (6). Quoi qu'il en soit, insiste-t-elle, « les caisses devront veiller à respecter ces dispositions pour que les retenues opérées sur ces catégories de prestations ne laissent pas à l'assuré des montants de prestations inférieurs aux seuils prévus, sauf si l'assuré manifeste son accord pour que la compensation s'opère au-delà ou le demande ».
Lorsqu'il est impossible de récupérer les sommes dues sur les remboursements de soins à venir, leur paiement doit être réclamé à l'assuré, indique la DSS. A cette fin, la CPAM doit lui adresser un avis des sommes à payer, en l'informant des voies et des délais de recours. Toutefois, compte tenu des faibles montants que ces sommes peuvent représenter, la caisse peut « faire une demande globalisée de remboursement et de recouvrement de la participation forfaitaire et de la franchise à la fin de chaque année civile », précise l'administration.
Si l'assuré présente des observations écrites, il est recommandé aux services gestionnaires de lui adresser une réponse au moins 15 jours avant l'expiration du délai de saisine de la commission de recours amiable (CRA), la présentation des observations ne suspendant pas le délai de saisine de la commission. Compte tenu de la situation financière de l'assuré et s'il le demande, la caisse peut lui accorder un échelonnement du paiement de sa dette. S'il est redevable de dettes de participations forfaitaires et de franchises de dates différentes, les dettes les plus anciennes doivent être recouvrées en premier. En outre, si l'assuré est déjà redevable d'indus de prestations dont il s'acquitte selon un échéancier, les sommes dues au titre du forfait de 1 € et de la franchise peuvent être ajoutées à cet échéancier. « Il appartiendra [alors] à la caisse d'apprécier l'opportunité d'augmenter le montant des échéances ou de les allonger compte tenu de la situation financière de l'intéressé », souligne la DSS. Enfin, si l'assuré ne répond pas à la demande de paiement (pas de lettre de réclamation, pas de contestation devant la CRA dans le délai requis) et ne paie pas les sommes dues, une mise en demeure doit lui être adressée. Les sommes sont alors récupérées selon la procédure de droit commun.
Dans la mesure où la loi n'a pas fixé de délai de prescription pour l'action en recouvrement par les CPAM du forfait de 1 € et des franchises médicales, la DSS signale que c'est le délai de prescription de droit commun de cinq ans qui s'applique. Alors que le code civil ne définit pas le point de départ de ce délai, la jurisprudence l'a fixé « à compter du jour où le titulaire d'un droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l'exercer ». En l'espèce, le délai de prescription des actions en recouvrement doit être décompté « à partir de la date du remboursement des prestations sur lesquelles la participation forfaitaire et la franchise s'imputent », indique l'administration. Et il doit l'être « pour chaque participation forfaitaire de 1 € et pour chacun des montants de franchise à la charge de l'assuré ».
Le délai de prescription - abaissé de 30 à 5 ans par une loi du 17 juin 2008 (7) - s'applique aux participations forfaitaires et aux franchises dues à compter du 19 juin 2008 (date d'entrée en vigueur de la loi) et à celles nées avant dès lors qu'aucune instance n'a été introduite avant l'entrée en vigueur de la loi (8). En outre, les causes d'interruption de la prescription prévues dans la loi du 17 juin 2008 (reconnaissance de sa dette par le débiteur, demande en justice, y compris en référé, acte d'exécution forcée...) sont applicables au forfait de 1 € et aux franchises médicales. La saisine de la CRA n'interrompt pas le délai de prescription, contrairement à la médiation et à la conciliation, à partir du jour où les parties décident d'y recourir. Quoi qu'il en soit, explique la DSS et conformément aux dispositions législatives, « le report du point de départ, la suspension ou l'interruption de la prescription ne peut avoir pour effet de porter le délai de la prescription extinctive au-delà de 20 ans à compter du jour de la naissance du droit ».
Enfin, parce que des difficultés existent dans le recouvrement des sommes dues au titre du forfait de 1 € et des franchises médicales « du fait de l'absence de transmissions informatiques entre les établissements de santé [publics] et les organismes d'assurance maladie », la DSS recommande à ces derniers de « recouvrer les montants des créances dues de manière progressive sur les prestations à venir si ceux-ci sont importants ». Et, dans le cas où elles ne pourraient pas être récupérées de la sorte, « les caisses pourront proposer un échéancier de paiement à l'assuré ».
Enfin, en cas de changement de régime de sécurité sociale, la CPAM d'origine de l'assuré procédera au recouvrement de la créance auprès de l'assuré.
(1) Sur le plafond applicable, voir ASH n° 2519 du 24-08-07, p. 9.
(3) Décret n° 2007-1937 du 26 décembre 2007, J.O. du 30-12-07.
(4) Le Conseil d'Etat a rejeté les autres argumentations des associations (obstacle à l'accès aux soins notamment) - Conseil d'Etat, 6 mai 2009, requête n° 312462, bientôt disponible sur
(5) La récupération ne sera toutefois pas effectuée sur les indemnités journalières subrogées qui, dans ce cas, ne sont pas versées au débiteur de la créance mais à l'employeur.
(6) Sur le barème 2009 de saisie des rémunérations, voir ASH n° 2593 du 23-01-09, p. 43.
(8) Pour la DSS, il n'y a pas lieu de distinguer entre les instances introduites par la CPAM ou l'assuré.