THÉÂTRE

HUIS CLOS. Neuf mètres carrés est l'adaptation théâtrale de Paroles de détenus, un recueil de textes qui évoque l'univers carcéral depuis l'après-guerre. Lettres, journaux de bord et poèmes écrits en captivité... autant de réflexions de prisonniers sur eux-mêmes et sur autrui que de témoignages sur la violence subie derrière les barreaux, ou que de rêves de liberté : « La prison/ C'est comme un long sommeil dont on voudrait sortir/ Un coma capricieux fait de noir, d'éclaircies/ La prison c'est le vide, le néant, l'amnésie/ C'est la nuit qui se traîne et ne veut pas finir. »

Touché par ces témoignages réels de personnes livrant leurs pensées les plus intimes, le metteur en scène Sébastien Chénot a voulu les transmettre au public. Attaché à ne pas tomber dans le pathos, il a convié sur scène sept comédiens - six détenus et un maître de jeu - qui répercutent les mots de ces prisonniers, entassés sur une scène de 9 m² ou assis parfois sur de vieilles cuvettes de W-C, afin de faire ressentir la promiscuité insupportable de la prison. Le metteur en scène a installé son plateau en plein air et les spectateurs tout autour, parfois yeux dans les yeux avec les interprètes. « Prison et salle de théâtre ont, selon moi, un point commun, explique-t-il. La salle de théâtre est un lieu d'ouverture, mais il s'agit néanmoins, comme pour la prison, d'un lieu clos, fermé, où le regard prend une place prépondérante. Le spectateur observe ce qui se passe sur scène. En prison - les détenus eux-mêmes nous le disent -, vision et ouïe sont deux sens prépondérants. Observer et être observé. Etre observé, qu'est-ce que cela nous fait, en tant que personne ? Est-ce que notre attitude change ? Comment le gère-t-on de manière individuelle ? » Sans intention de faire le procès de l'administration pénitentiaire, le spectacle incite à poser ce regard sur l'homme emprisonné et à réfléchir à sa condition.