En déplacement dans le Val-d'Oise le 24 avril, le président de la République a annoncé un investissement de près de 1,3 milliard d'euros pour favoriser la formation et l'accès à l'emploi de près de 520 000 jeunes sur le marché du travail d'ici à fin juin 2010. Pour tenter de limiter les effets de la crise économique sur les 16-25 ans, premiers touchés par la remontée du chômage depuis un an (voir ce numéro, page 8), il mise en priorité sur le développement des formations professionnalisantes en alternance, veut développer le recours aux contrats aidés et souhaite « déprécariser » les stages...
L'Etat financera ce « plan d'urgence » en faveur des jeunes via le Fonds d'investissement social (Fiso) (1)doté, pour l'heure, d'environ 1,5 milliard d'euros auxquels s'ajoutent 200 millions d'euros débloqués par les partenaires sociaux en puisant dans les fonds paritaires de la formation professionnelle. Selon l'Elysée, ces crédits pourront encore être abondés par les partenaires sociaux au travers du Fiso, ainsi que par les régions, dont Nicolas Sarkozy réclame le partenariat. Les nouvelles aides annoncées - qui seront également applicables dans les départements d'outre-mer - seront versées « à partir de juin 2009 pour les embauches réalisées à compter du 24 avril 2009 ». Tour d'horizon des principales mesures annoncées.
Pour le chef de l'Etat, les formations en alternance représentent la solution d'insertion professionnelle la plus efficace, avec un taux d'accès à l'emploi de « 70 % » à leur issue. Aussi souhaite-t-il renforcer l'apprentissage et soutenir le développement du contrat de professionnalisation. S'agissant de l'apprentissage, Nicolas Sarkozy a fixé un objectif « ambitieux » : recruter 320 000 apprentis entre le 1er juin 2009 et le 1er juin 2010, soit 35 000 de plus qu'en 2008. Pour l'atteindre, le dispositif « zéro charge » pour toutes les embauches dans les entreprises de moins de dix salariés, mis en place pour 2009 dans le cadre du plan de relance (2), sera étendu à celles de plus de dix salariés pour le recrutement de leurs apprentis. Cette mesure s'appliquera pour un an aux embauches réalisées avant le 30 juin 2010. Sur la même période, une prime de 1 800 € sera accordée aux entreprises de moins de 50 salariés pour l'embauche de tout apprenti supplémentaire. En outre, le soutien à l'offre de formation en apprentissage sera renforcé à hauteur de 100 millions d'euros, pour atteindre un montant de 600 millions d'euros sur 2009 et 2010. Autre objectif fixé par l'Elysée : conclure 170 000 contrats de professionnalisation entre le 1er juin 2009 et le 1er juin 2010. Pour le concrétiser, les entreprises qui embaucheront un jeune de moins de 26 ans bénéficieront d'une prime de 1 000 € , portée à 2 000 € pour un jeune n'ayant pas le niveau bac. Par ailleurs, les partenaires sociaux sont invités à renforcer leur soutien aux contrats de professionnalisation via les mécanismes de financement du Fonds unique de péréquation et, demain, du Fonds paritaire de sécurisation des parcours professionnels (voir ce numéro, page 8). L'objectif, a expliqué l'Elysée, est que « chaque entreprise souhaitant recruter en contrat de professionnalisation trouve une solution de financement et que les branches qui s'engagent à faire davantage que l'année passée soient particulièrement soutenues ». Enfin, le service public de l'emploi sera mobilisé pour augmenter le recours au contrat de professionnalisation en partenariat avec les branches.
Nicolas Sarkozy veut, en outre, créer un « contrat d'accompagnement formation » dont l'objectif, a précisé l'Elysée, est « de mettre à profit la période de crise pour proposer aux jeunes d'élever leur niveau de qualification et d'adapter leurs compétences aux besoins du marché afin de profiter pleinement de la reprise ». Concrètement, 50 000 jeunes âgés de 16 à 25 ans, de niveau VI à bac + 3 inscrits à Pôle emploi ou suivis par les missions locales, bénéficieront à la rentrée 2009 d'un programme d'accompagnement et de formation. Ce dernier comportera des actions de formation pré-qualifiantes et qualifiantes sur des métiers porteurs, des actions associant des périodes en entreprise, des actions offrant aux jeunes le statut, la protection sociale et la rémunération de stagiaire de la formation professionnelle, et des actions permettant l'obtention d'une certification ou l'accès à un emploi durable. Cette action s'adresse prioritairement, d'une part, à des jeunes non qualifiés ou en rupture de contrat d'alternance et, d'autre part, à des jeunes qualifiés à la recherche d'un emploi, a précisé l'Elysée. Les régions seront associées à la mise en place de ce « contrat» pour assurer sa cohérence avec l'offre de formation qu'elles financent. Il leur sera également proposé de contribuer directement au dispositif, si elles sont volontaires, pour en augmenter le nombre de bénéficiaires.
Le gouvernement, dans le cadre d'un partenariat renforcé avec les régions, a aussi pour objectif d'offrir, d'ici à 2010, 12 000 places dans les « écoles de la deuxième chance » à des jeunes faiblement qualifiés, soit 7 200places supplémentaires. Pour y parvenir, l'Etat s'engage à devenir un partenaire du réseau de ces écoles, en prenant part à leur financement au même niveau que les collectivités régionales, soit un tiers.
Le chef de l'Etat souhaite par ailleurs « déprécariser » les stages et soutenir l'embauche de stagiaires en contrat à durée indéterminée (CDI). A cette fin, l'Etat versera une aide exceptionnelle de 3 000 € à l'embauche des stagiaires en CDI (1 500 € au moment de l'embauche et 1 500 € au bout de six mois). Devant concerner 50 000 stagiaires, cette aide sera ouverte pour les jeunes entrés en stage avant le 24 avril (3) et si leur embauche intervient avant la fin du mois de septembre 2009. En outre, le gouvernement proposera rapidement au Parlement de faire évoluer la législation pour ouvrir droit à une gratification dès la fin du deuxième mois de stage et non au bout de trois mois comme aujourd'hui (4). Ainsi, tout stage de plus de deux mois pourrait ouvrir droit à une gratification d'au moins 30 % du SMIC. Le président de la République a demandé l'application sans délai de cette mesure à la fonction publique (voir ce numéro, page 10).
Autre priorité de Nicolas Sarkozy : favoriser les embauches de jeunes dans le secteur marchand grâce au contrat initiative-emploi (CIE). Ainsi, l'Etat proposera 50 000 CIE supplémentaires pour l'embauche de jeunes au second semestre 2009, contrats qui seront attribués en priorité aux métiers porteurs, notamment ceux du développement durable, et aux entreprises de l'économie sociale et solidaire.
30 000 contrats aidés du secteur non marchand seront en outre proposés aux jeunes, prioritairement dans les collectivités locales, pour leur permettre d'acquérir une première expérience professionnelle dans les métiers offrant des débouchés dans le secteur concurrentiel. Le service public de l'emploi (SPE) accompagnera ce dispositif, dont la vocation est d'établir des passerelles vers les entreprises. En particulier, le SPE s'engagera à proposer au jeune un accompagnement renforcé et, au plus tard à l'issue de son contrat, soit une offre d'emploi chez un employeur du secteur concurrentiel sur des métiers correspondant aux fonctions occupées pendant la durée du contrat aidé, soit une formation qualifiante ou un contrat en alternance. Ces 30 000 contrats seront financés à hauteur de 90 % par l'Etat pendant 12mois. Ainsi, la charge financière pour les employeurs sera très limitée.
(3) Selon le dossier de presse diffusé par l'Elysée, alors que le président de la République a, lui, évoqué le 1er mai, cette date étant également reprise dans les différents communiqués du gouvernement commentant cette disposition.
(4) Devant le Comité des stages et de la professionnalisation des cursus universitaires, le Haut Commissaire à la jeunesse a confirmé, le 27 avril, que « l'évolution des règles de gratification des stages en entreprise devra conduire à l'adoption d'une disposition législative » . Il a par ailleurs indiqué que « le décret permettant le versement de l'aide à l'embauche des stagiaires sera publié avant la fin du mois de mai » . Quant à la demande d'un plus fort encadrement des stages, Martin Hirsch « s'est engagé à apporter une réponse aux propositions du comité ».