La dotation globale allouée par l'assurance maladie à un service d'éducation spéciale et de soins à domicile (Sessad) comprend tous les soins nécessités par l'affection ayant motivé la prise en charge de l'enfant au sein de la structure, y compris des séances d'orthophonie réalisées en cabinet libéral. C'est la décision rendue par la Cour de cassation dans un arrêt du 2 avril.
Dans cette affaire, un enfant handicapé était pris en charge par un Sessad, notamment pour une rééducation orthophonique, sur décision de la commission départementale d'éducation spéciale (aujourd'hui commission des droits et de l'autonomie des personnes handicapées). Pendant l'année scolaire 2004-2005, il a bénéficié de séances d'orthophonie dans un cabinet de ville prescrites par son médecin. Sa mère a alors demandé à la caisse primaire d'assurance maladie (CPAM) de prendre en charge le coût de ces soins. Face au refus de cette dernière, elle s'est tournée vers la justice.
Pour accueillir favorablement cette demande, la cour d'appel de Grenoble a retenu que l'enfant nécessitait une prise en charge complémentaire à celle effectuée dans le Sessad et que les soins dispensés en cabinet libéral n'étaient pas assurés par cette structure. En outre, selon elle, les séances d'orthophonie complémentaires ne constituaient pas des soins courants correspondant à la destination de ce service, c'est-à-dire des soins nécessités par l'affection ayant motivé la prise en charge de l'enfant par l'établissement. Au contraire, il s'agissait de soins en relation avec des problèmes moteurs, oculaires et praxiques exigeant le recours à des techniques et des supports particuliers que le service, spécialisé dans la prise en charge d'enfants présentant une déficience intellectuelle, ne proposait pas.
La Cour de cassation, saisie par la CPAM, rejette ces arguments et rappelle la réglementation applicable en la matière, plus particulièrement les articles 25 et 106 du décret budgétaire et comptable du 22 octobre 2003 (1), devenus les articles R. 314-26 et R. 314-105 du code de l'action sociale et des familles. Ainsi, la tarification des prestations supportées par l'assurance maladie et délivrées par les établissements ou services d'enseignement et d'éducation spéciale qui assurent, à titre principal, une éducation adaptée et un accompagnement social ou médico-social aux mineurs ou aux jeunes adultes handicapés ou présentant des difficultés d'adaptation prend la forme d'une dotation globale. Cette dotation ne comprend pas les frais médicaux ou paramédicaux autres que ceux afférents aux soins qui correspondent aux missions de l'établissement ou du service.
Pour les hauts magistrats, la prise en charge de l'enfant est globale. En effet, les établissements et services prenant en charge les enfants ou adolescents présentant une déficience intellectuelle accueillent également des enfants ou adolescents lorsque cette déficience s'accompagne de troubles tels que des troubles moteurs, sensoriels ou de la communication, expliquent-ils. Considérant que les juges de la cour d'appel auraient dû vérifier les termes de la prise en charge décidée par la commission départementale d'éducation spéciale et l'étendue des soins inclus dans la dotation globale allouée au Sessad, ils cassent l'arrêt rendu à Grenoble. Et concluent que la dotation globale comprend « tous les soins nécessités par l'affection ayant motivé la prise en charge de l'enfant au sein du service ».
Ce faisant, la Cour de cassation ne rompt pas avec sa jurisprudence établie sur le fondement de la réglementation antérieure au décret du 22 octobre 2003. En 2004, dans une affaire similaire concernant un institut médico-éducatif, elle avait déjà jugé que le forfait versé par l'assurance maladie à l'établissement incluait tous les soins nécessités par l'affection ayant motivé la prise en charge de l'enfant au sein de l'établissement. Et que la part du forfait correspondant à des actes d'orthophonie dispensés hors de l'institut et remboursés par la sécurité sociale aux parents était un indu ((2).
Reste que l'article 124 du décret budgétaire et comptable (devenu l'article R. 314-122 du code de l'action sociale et des familles) a également introduit la possibilité d'une prise en charge par l'assurance maladie, en sus du tarif versé à l'établissement ou au service, des soins complémentaires délivrés à titre individuel par un médecin, un auxiliaire médical, un centre de santé, un établissement de santé ou un autre établissement ou service médico-social. Pour mémoire, sont ainsi concernés, d'une part, les soins qui entrent dans la mission de l'établissement ou du service lorsqu'ils ne peuvent, en raison de leur intensité ou de leur technicité, être assurés par ce dernier de façon suffisamment complète ou régulière et, d'autre part, les soins dont l'objet ne correspond pas aux missions de l'établissement ou du service.
(2) Cass. civ. 2e, 4 mai 2004, pourvoi n° 03-30.017, disponible sur