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Le « CIVIS Justice » : un moyen d'étoffer les actions d'insertion

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La délégation interministérielle à la ville rend public un rapport d'évaluation du dispositif expérimental de contrat d'insertion dans la vie sociale pour les jeunes placés sous main de justice lancé en 2006. Si celui-ci est efficace, son pilotage peut encore être amélioré.

La mise en oeuvre du contrat d'insertion dans la vie sociale (CIVIS) en faveur de 6 000 jeunes de 16 à 25 ans placés sous main de justice, qui figurait parmi les mesures prioritaires du comité interministériel des villes du 9 mars 2006 (1), vise à faire bénéficier ces derniers d'un accompagnement vers l'emploi, à mieux préparer leur sortie de détention le cas échéant, et à prévenir la récidive. Pour ce dispositif expérimental reposant sur le partenariat entre les services de la Justice et ceux du service public de l'emploi, six départements (Essonne, Seine-Saint-Denis, Val-d'Oise, Nord, Rhône et Bouches-du-Rhône) se sont vu attribuer, pour une durée de trois ans, des moyens humains et financiers supplémentaires. La délégation interministérielle à la ville (DIV) a ainsi financé 26 postes de « référents justice », portés par 32 missions locales.

Quel bilan aujourd'hui ? La DIV vient de rendre public le rapport d'évaluation, réalisé de juillet 2008 à janvier 2009 par le cabinet Pluricité. Au 30 septembre 2008, environ 3 800 jeunes sous main de justice (détenus condamnés à une peine inférieure à un an ou suivis en milieu ouvert) ont été accompagnés, dont un tiers a signé un contrat (non obligatoire dans ce cadre). Si les jeunes suivis en milieu ouvert ne représentent que 30 % des publics accompagnés, ils restent les mieux représentés parmi les signataires (44 % d'entre eux). Pour 780 mineurs, 240 ont signé un contrat.

D'un point de vue qualitatif, les bénéficiaires présentent plus souvent que ceux du « CIVIS classique » « une combinaison de problématiques lourdes » : niveau de qualification très bas, toxicomanie, difficultés psychologiques et relationnelles, auxquelles s'ajoute le handicap lié à la situation judiciaire. Des obstacles accrus par « une confiance en soi et dans l'adulte très fragile, voire inexistante ». Globalement, « les jeunes sous main de justice présentent la particularité d'avoir des parcours plus chaotiques, plus discontinus, avec des phases abruptes d'échec et des phases plus progressives de reconstruction de parcours ». La proportion d'aménagements de peine obtenue dans ce cadre est encourageante (20 %) même si les résultats sont inégaux d'un département à l'autre, avec une notoriété du dispositif auprès des magistrats assez disparate.

La faible antériorité du dispositif au moment de l'évaluation et l'hétérogénéité de sa mise en oeuvre rendent difficile l'appréciation de son efficacité en termes d'accès au travail, même si « quelques chiffres épars » tendent à montrer « des volumes de sorties loin d'être négligeables ». Plus complexe encore est la mesure de l'effet du dispositif sur la prévention de la récidive, compte tenu, encore une fois, du court délai de l'observation. Quoi qu'il en soit, souligne le rapport, « l'enjeu majeur des collaborations SPIP, PJJ et missions locales est, dans un contexte de développement d'une politique d'alternatives à l'enfermement des jeunes, de pouvoir s'appuyer sur des partenaires externes pour étoffer la palette des actions mobilisables dans la période d'exécution des peines, et de favoriser ainsi la réduction du risque de récidive des jeunes ». La valeur ajoutée tient donc en « une réelle complémentarité des compétences entre professionnels du travail social (conseillers d'insertion et de probation, services pénitentiaires d'insertion et de probation et éducateurs de la protection judiciaire de la jeunesse) et experts de l'insertion socioprofessionnelle ». Parallèlement, le dispositif « redonne une légitimité à un accueil et un accompagnement en mission locale des jeunes sous main de justice », alors que les structures sont soumises à une injonction paradoxale : accueillir tous les jeunes, quelles que soient leurs difficultés, et assurer un « taux de sortie le meilleur possible ». Dans ce contexte, offrir à ces publics une voie d'accès spécifique au droit commun permet d'éviter leur stigmatisation.

Quelques nuances tout de même à un tableau globalement prometteur : si le « CIVIS Justice » permet aux jeunes incarcérés de bénéficier d'un accompagnement socioprofessionnel, le suivi en détention reste toujours en deçà de ce qui est proposé à l'extérieur. Raisons de ce décalage ? Les moyens techniques (téléphone, ordinateur...) sont plus faibles, ainsi que les possibilités d'action concrète pour l'insertion (rencontre d'un employeur, passer son permis...) Peu de pratiques sont par ailleurs développées pour « capter » les jeunes suivis en milieu ouvert, qui peuvent s'adresser spontanément au dispositif. Les modalités d'orientation les plus courantes restant les prescriptions du service pénitentiaire d'insertion et de probation et de la PJJ, la couverture des jeunes en milieu ouvert par le « CIVIS Justice » est, au final, peu développée.

Compte tenu de la croissance des besoins, le rapport propose plusieurs pistes pour renforcer la prise en charge des jeunes placés sous main de justice dans le cadre du CIVIS. Il recommande d'étendre le programme expérimental (2), d'y dédier des « moyens spécifiques et pérennes » (dans une logique de cofinancements et de pluriannualité) et de « privilégier la captation de publics en milieu fermé » et des jeunes majeurs, « pour lesquels l'impact de l'expérimentation est le plus net ». Il préconise, en outre, de renforcer les démarches de pilotage - notamment par l'Etat -, afin de mettre en cohérence les démarches partenariales et de traiter rapidement les difficultés rencontrées. Le rapport propose enfin une démarche de suivi de cohortes sur 12 mois.

Notes

(1) Ses conditions de mise en oeuvre ont été fixées dans la circulaire du 18 septembre 2006 - Voir ASH n° 2472 du 6-10-06, p. 6.

(2) Voir sur le sujet l'enquête de l'ANDML, dans les ASH n° 2595 du 6-02-09, p. 28.

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