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Le métier de conseiller d'insertion et de probation bientôt redessiné ?

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L'administration pénitentiaire a, le 5 mars, présenté aux organisations syndicales un projet de protocole de réforme statutaire des personnels d'insertion et de probation. L'enjeu : un recentrage du métier des agents sur la justice pénale, avec à la clé une revalorisation statutaire.

La réforme du statut des personnels d'insertion et de probation va-t-elle bientôt voir le jour ? Engagée en juin 2008 après un mouvement social pour la revalorisation de cette filière, elle a abouti en octobre dernier à des orientations s'inspirant notamment du rapport d'Isabelle Gorce, conseillère référendaire à la Cour de cassation, proposant de recentrer les conseillers d'insertion et de probation (CIP) sur le champ pénal et criminologique (1). Les travaux se sont depuis prolongés avec le seul Snepap (Syndicat national de l'ensemble des personnels de l'administration pénitentiaire)-FSU, qui, au contraire de la CFDT-Interco et de la CGT-pénitentiaire, défend cette redéfinition du métier. Celle-ci aurait, selon lui, pour effet de mieux identifier les missions du CIP et de renvoyer les détenus à la compétence des dispositifs sociaux de droit commun. Il en ressort un projet de protocole présenté le 5 mars aux trois syndicats ainsi qu'à l'UFAP (Union fédérale autonome pénitentiaire).

Des réticences et une contre-proposition

Mais le dossier est loin d'être bouclé, au grand dam du Snepap, qui espérait une signature rapide du protocole pour que puisse s'engager la suite des réflexions sur sa mise en oeuvre. « Le document acte une réforme statutaire et indemnitaire qu'il convient de ne pas manquer, souligne Sophie Desbruyères, sa secrétaire générale. Pour que la revalorisation indemnitaire soit appliquée dès 2009, il faut que les décrets sortent rapidement. » Mais les deux autres organisations représentatives de la profession sont réticentes. La CFDT-Interco a adressé à l'administration une contre-proposition visant à ne pas distinguer l'approche sociale et pénale du métier, tandis que la CGT-pénitentiaire, au nom du principe de consultation de ses adhérents, se donne un mois de réflexion.

Cette réforme, en effet, met le doigt sur un sujet sensible : l'identité professionnelle des conseillers d'insertion et de probation. Selon le projet de protocole, il est nécessaire de reconnaître un « coeur de métier » spécifique au CIP, qui « par son action sur le passage à l'acte, son rôle dans l'individualisation des peines et des mesures pénales pré-sententielles (qui suppose, après une évaluation, la mise en place d'un suivi adapté au profil des personnes condamnées ou prévenues), son implication dans l'aménagement des peines, se place désormais clairement sur le champ pénal et criminologique, avec une méthodologie propre et pour objectif la prévention de la récidive. » Pour la première fois, se réjouit le Snepap, le texte spécifie que le champ d'intervention du CIP est la justice pénale, même s'il n'est « pas question d'abandonner une prise en compte de l'individu et de ses problématiques sociales, familiales et professionnelles, indispensables à l'exercice de nos missions ». Concrètement, les CIP seraient dotés d'un statut revalorisé et bénéficieraient, à compter de 2010, selon l'administration, d'une grille alignée sur celle de lieutenant/capitaine, plus avantageuse sur le plan indiciaire et du déroulement de carrière. Le cadre indemnitaire des personnels serait revalorisé.

Les assistants sociaux, qui exercent les mêmes missions que les CIP dans les services d'insertion et de probation, auraient, quant à eux, deux options possibles : rester dans le champ du travail social et, dans ce cas, mettre fin à leur détachement dans le corps des CIP, ou bien intégrer le nouveau corps. Cette intégration (après détachement préalable dans le corps actuel des conseillers d'insertion et de probation, dont l'extinction est prévue au 31 décembre 2012), ne nécessiterait pas, à la demande du Snepap, d'examen professionnel. Selon le projet de protocole, qui met l'accent sur la « pluridisciplinarité des services », l'objectif est, à terme, « l'intervention directe des dispositifs de droit commun ». Et, afin de ne pas priver les détenus de droits sociaux, « les SPIP doivent être dotés, à titre transitoire, de travailleurs sociaux articulant le lien avec les dispositifs locaux. » Le texte ne se prononce pas, toutefois, sur le volume de tels recrutements.

Maintenir l'équilibre entre le social et le judiciaire

Cette scission entre les missions des CIP et celles des assistants sociaux ne satisfait pas les deux autres organisations syndicales représentatives du secteur. « Tendre vers l'insertion des détenus dans le corps social relève de nos missions, défend Yoann Bouchet, référent pour les travailleurs sociaux à la CGT-pénitentiaire. Si notre place est différente de celle des travailleurs sociaux de droit commun, nous partageons avec eux notre rapport à l'usager et la méthodologie d'intervention. » Pour la CGT, qui revendique un corps unique de travailleurs sociaux pénitentiaires oeuvrant à la fois dans les champs pénal et social, l'intervention des CIP dans le champ social permet de maintenir l'équilibre entre l'aide et le contrôle, entre l'action sociale et le mandat judiciaire. Selon le syndicat, la direction de l'administration pénitentiaire explique que « l'intégration de la filière sécrurité est l'une des deux conditions fixées par Bercy pour accepter le projet statutaire ». La CFDT-Interco est sur la même ligne : « Devant l'afflux des besoins, l'administration propose une réorganisation du travail de manière taylorienne. Une autre solution aurait pu être de conserver nos missions et de recruter des agents supplémentaires », commente Olivier Mourot, secrétaire général adjoint.

La formation initiale des CIP, sur laquelle les réflexions devraient encore se poursuivre, devrait également être recentrée sur la prévention de la récidive. Mais, se félicite le Snepap, le protocole « ne spécifie plus aucune durée » pour cette formation, que l'administration avait souhaité raccourcir. Un point néanmoins sur lequel l'organisation n'a pas obtenu gain de cause : les CIP ne seraient plus soumis au décompte horaire du travail.

Le protocole prévoit également la réforme du statut des personnels de direction des services pénitentiaires d'insertion et de probation. Un statut de directeur fonctionnel d'insertion et de probation serait créé, induisant une revalorisation indiciaire, et les deux corps actuels d'encadrement seraient fusionnés.

Notes

(1) Voir ASH n° 2576 du 10-10-08, p. 43.

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