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Adoption au Sénat du projet de loi pénitentiaire : la frustration demeure

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Le Sénat a achevé, le 6 mars, l'examen du projet de loi pénitentiaire. Celui-ci fait l'objet d'une procédure d'urgence que le gouvernement a refusé de lever, malgré les sollicitations venues de nombreux parlementaires comme des acteurs du monde pénitentiaire. Les dispositions sur les droits des détenus et les conditions de détention continuent de susciter le plus de critiques. Pour l'Observatoire international des prisons (OIP), le texte, qui ne devrait pas être débattu à l'Assemblée nationale avant le mois de mai, consacre des « régressions, dont certaines sont importantes », plusieurs avancées « plus ou moins significatives », tout en confortant « le large pouvoir discrétionnaire de l'administration ». Sentiment partagé par la CGT pénitentiaire, selon laquelle « nous assistons bien, malheureusement, au sabotage d'un «grand rendez-vous» attendu depuis de très nombreuses années ».

Parmi les reculs, l'OIP regrette notamment l'élargissement des critères des restrictions autorisées à l'exercice des droits fondamentaux des détenus. Ceux-ci incluent désormais, en plus des contraintes inhérentes à la détention, le « maintien de la sécurité et du bon ordre des établissements » ainsi que « la prévention de la récidive et la protection de l'intérêt des victimes ». L'introduction par les sénateurs d'une « obligation d'activité » expose en outre les détenus « au travail forcé et à une négation de leur droit au respect de la vie privée », estime l'organisation. Le texte prévoit, en effet, que toute personne condamnée « est tenue d'exercer au moins l'une des activités qui lui est proposée par le chef d'établissement et le directeur du service pénitentiaire d'insertion et de probation dès lors qu'elle a pour finalité la réinsertion de l'intéressé et est adaptée à son âge, à ses capacités et à sa personnalité ». Le principe d'autonomie est d'autant plus « bafoué », selon l'OIP, qu'une disposition précise que l'activité consiste obligatoirement dans l'apprentissage de la lecture, de l'écriture et du calcul lorsque le détenu ne maîtrise pas les enseignements fondamentaux, et dans l'apprentissage de la langue française lorsqu'il ne la maîtrise pas. Le chercheur Pierre-Victor Tournier regrette, de son côté, que les sénateurs n'aient pas assorti cette « obligation d'activité » d'une « obligation de moyens » pour l'administration : « Les détenus oisifs devront faire avec ce qu'on pourra leur proposer (imposer). »

Constitue en revanche un progrès la consécration législative du droit au respect de la dignité de la personne détenue garantie par la Constitution et la convention européenne des droits de l'Homme. Le droit des détenus de téléphoner aux membres de leur famille et à « d'autres personnes pour préparer leur réinsertion » en est une autre, comme l'inscription dans le texte législatif de la garantie de la qualité, de la permanence et de la continuité des soins aux personnes détenues. « La définition du médecin intervenant en milieu carcéral est clarifiée au sens du respect de l'éthique de son serment », se félicite l'OIP. En matière de rémunérations, ajoute l'organisation, les personnes détenues « restant privées du bénéfice de tous les droits et de toutes les protections individuelles et collectives », la reconnaissance d'un taux horaire minimum de rémunération indexé sur le SMIC constitue « un petit pas en avant ».

En matière de régime de détention, la seule satisfaction provient, aux yeux de l'organisation, du maintien du principe de l'encellulement individuel, que le gouvernement avait souhaiter supprimer. Mais la possibilité d'y déroger dans les maisons d'arrêt pendant cinq ans atténue fortement cette avancée.

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