A l'occasion d'un déplacement au centre d'hébergement la Mie de pain à Paris, le 9 mars, la ministre du Logement, Christine Boutin, et le ministre en charge de la mise en oeuvre du plan de relance, Patrick Devedjian, ont rendu publique une circulaire adressée aux préfets dans laquelle ils détaillent l'ensemble des mesures du plan de relance relatives à l'hébergement (1), objectifs régionaux chiffrés à la clef : développement des équipes mobiles ; réhabilitation de structures d'hébergement ou création de nouvelles structures en remplacement d'anciennes ; augmentation des capacités d'hébergement (avec un objectif de 1 000 nouvelles places ouvertes avant le 31 décembre 2009 dont 100 d'urgence, 100 de stabilisation et 800 « d'insertion », en centres d'hébergement et de réinsertion sociale) ; mise en place de moyens d'accompagnement dans et vers le logement ; accroissement du nombre de places en maisons-relais (avec un objectif de 15 000 places au 31 décembre 2011) ; mobilisation de logements privés par intermédiation (5 000 en 2009).
« Plutôt que l'augmentation constante des capacités d'hébergement, c'est l'amélioration de la fluidité entre les réponses existantes et le décloisonnement entre les secteurs du logement et de l'hébergement qui doivent être recherchées », soulignent les deux ministres, rappelant au passage que, en cohérence avec cette approche, les préfets « ont l'obligation de ne pas créer de nouvelles places d'hébergement au-delà de ce qui est explicitement autorisé dans chaque région, sauf accord formel de la direction générale de l'action sociale et mises à part les places hivernales ponctuelles ».
Un comité de pilotage national, placé sous l'égide du délégué général pour la coordination de l'hébergement et l'accès au logement des personnes sans abri ou mal logées - le préfet Alain Régnier - suivra l'avancement des mesures. Un bilan sera effectué chaque fin de mois pour proposer les ajustements nécessaires.
Au cours de sa visite, Christine Boutin a annoncé « la fin des dortoirs en centres d'hébergement » et affirmé « le principe intangible de la chambre individuelle d'une surface minimum de 12 m2 pour une création nouvelle et de 9 m2 pour une réhabilitation ». Un principe écrit noir sur blanc dans une annexe de la circulaire consacrée à la « modernisation du parc d'hébergement ». Il s'agit concrètement de réhabiliter des structures existantes ou d'en créer de nouvelles en remplacement d'anciennes « en référence à un cahier des charges national et en liant de manière étroite le projet immobilier et le projet social ». Le plan de relance prévoit à cet effet 80 millions d'euros (2009 -2010) qui s'ajoutent aux 30 millions déjà inscrits au budget 2009. Au total, les crédits consacrés à ce programme s'élèvent à 170 millions sur trois ans (2009-2011).
Un des objectifs fixés dans le cahier des charges national est de parvenir à imposer des normes pour toute nouvelle structure d'hébergement et « toute structure engageant, avec subvention de l'Etat, des travaux d'un montant supérieur à 100 000 € , ou 2 000 € par place, sauf lorsque les travaux engagés ne portent que sur la sécurité ». Sont concernés tous les centres d'urgence, de stabilisation et d'insertion (avec ou sans le statut de centre d'hébergement et de réinsertion sociale), les hôtels sociaux et les lits halte soins santé. « A titre exceptionnel, les accueils de jour existants qui participent à l'offre globale d'hébergement sont également éligibles mais uniquement pour les travaux de réhabilitation », précise la circulaire.
La première norme à respecter concerne le nombre de personnes par chambre. La ministre le répète donc par écrit : « le principe doit être la chambre individuelle ou double pour les couples », et l'unité de vie pour les familles. Ainsi, les projets prévoyant une capacité de deux personnes par chambre hors les situations de couple feront l'objet d'un examen et d'une dérogation éventuelle par le préfet de région. Et tout projet prévoyant plus de deux personnes par chambre devra faire l'objet d'une dérogation du comité de pilotage national.
Des normes sont à respecter également relativement à la taille et au contenu des logements. Pour la réhabilitation de locaux d'hébergement existants, la référence est celle du logement décent défini par le décret du 30 janvier 2002. La taille des chambres doitdonc être de 9 m2 minimum pour une personne ou 12 m2 pour deux personnes. Les chambres ou logements doivent par ailleurs être équipés d'un lavabo, et doivent obligatoirement comporter l'usage d'une douche collective et de W.-C. desservant au plus cinq chambres. L'unité de vie familiale doit comporter un lavabo, un W.-C., une douche. « Le bloc cuisine n'est pas obligatoire, dès lors qu'un service de restauration collective est prévu sur place, mais fortement recommandé en tant que facteur de développement de l'autonomie personnelle », rappelle encore la circulaire. Autre cas de figure : la création de locaux d'hébergement. La référence est celle du logement-foyer. La taille des chambres doit donc être de 12 m2 minimum pour une personne ou 18 m2 pour deux personnes, « sauf dérogations particulières prévues ». Chaque unité de vie familiale ou chambre doit comporter un lavabo, un W.-C., une douche, là encore sauf dérogations particulières prévues. Et « le bloc cuisine n'est pas obligatoire, dès lors qu'un service de restauration collective est prévu sur place, mais fortement recommandé ». « En tout état de cause, son installation doit pouvoir être facilement réalisable si l'évolution du projet social en amène au besoin. »
La troisième norme à respecter concerne la taille des structures. « La délocalisation, ou la division sur site des grandes structures, en petites unités à taille plus humaine (30 à 50 personnes maximum) est un objectif très souhaitable », soulignent les ministres, ajoutant que « le financement de structures nouvelles, organisées en unité de vie de plus de 50 personnes n'est [de toute façon] possible que sur dérogation accordée par le comité de pilotage national ».
Enfin, la circulaire insiste pour qu'un accueil de personnes accompagnées d'animaux soit prévu « autant que possible, soit par l'accès des animaux aux espaces personnels des résidents, soit par la création d'un chenil extérieur ».
140 équipes de maraude sont recensées actuellement. Certaines d'entre elles ne fonctionnent toutefois qu'en période hivernale. En outre, certaines agglomérations importantes en sont dépourvues et il existe aussi des zones péri-urbaines ou rurales non couvertes, où se développent des formes de non-logement (bois, camping sauvage) à prendre en compte. C'est pourquoi le plan prévoit la création de 50 équipes mobiles, réparties dans 25 départements (listés en annexe de la circulaire). Une enveloppe de l'Etat de 2,9 millions d'euros est prévue pour les financer, étant précisé qu'un financement paritaire Etat/collectivités locales « permettrait d'augmenter les moyens engagés ». Les préfets sont donc invités à mener dans cette optique une concertation, en particulier avec les communes.
« Des recrutements pourront être décidés localement pour la création de ces 50 nouvelles équipes », précisent encore les ministres, ajoutant que le recours à des contrats à durée déterminée de un an ou à des contrats aidés n'est pas exclu.
Les pouvoirs publics demandent par ailleurs aux préfets de mettre en place des procédures formalisées par convention entre les équipes de travail de rue, les hébergements et les services sociaux. « Les équipes mobiles vont au contact de personnes en situation d'exclusion ou de grande difficulté », indique la circulaire. « Elles doivent pouvoir orienter les personnes qu'elles rencontrent vers un hébergement adapté, et donc selon les cas une structure d'urgence, de stabilisation ou d'insertion. » Les procédures d'admission dans les hébergements doivent ainsi être « adaptées pour faciliter l'accès des personnes rencontrées par les équipes de travail de rue, grâce à des modalités rapides et simples, fixées par conventions ».
Autre préconisation : il revient aux représentants de l'Etat d'assurer le lien avec les équipes mobiles psychiatrie-précarité existantes ou en création. « Sont concernées aussi bien les équipes déjà existantes mises en place par le plan santé mentale 2005-2008, que celles qui vont être créées par les agences régionales de l'hospitalisation (ARH) en 2009 », signalent les ministres, précisant que des contacts peuvent être pris avec les ARH pour proposer à titre expérimental une ou des équipes mixtes psycho-sociales.
Le plan de relance a encore prévu une enveloppe de 12 millions d'euros en année pleine pour « accompagner par un suivi adapté 6 300 ménages sans domicile, hébergés ou logés temporairement ». Il s'agit plus précisément des « personnes isolées ou familles susceptibles d'accéder à un logement (c'est-à-dire remplissant les conditions administratives et de ressources pour bénéficier d'un bail ou d'un contrat de résidence) mais éprouvant des difficultés importantes (ancienneté du séjour à la rue ou en hébergement, fragilité psychologique, difficultés relationnelles...) rendant problématique leur relogement sans un accompagnement social approprié ». Objectifs affichés : « favoriser les sorties réussies des structures d'hébergement et de logement temporaire et redonner ainsi de la fluidité à l'ensemble du dispositif » mais aussi « proposer un accompagnement adapté à des personnes passant directement de la rue au logement ».
L'accompagnement développé ne devra pas être fondu dans un simple renforcement de moyens des structures existantes, précise la circulaire. « Il doit s'agir d'un service nouveau, dédié, et identifié durablement en tant que tel. » Ces nouveaux services devront s'appuyer « autant que possible » sur des moyens humains et matériels existants (pour le soutien administratif et logistique notamment), les crédits devant essentiellement se traduire par l'engagement de nouveaux travailleurs sociaux. La circulaire fixe un objectif de 315 nouveaux postes et en détaille la répartition région par région en annexe.
(1) Sur l'ensemble du plan relance, voir ASH n° 2586 du 12-12-08, p. 5.