«Fallait-il créer l'Agence française de l'adoption [AFA] et faut-il lui donner aujourd'hui une seconde chance ? » C'est à cette double interrogation que les sénateurs (UMP) Auguste Cazalet, Albéric de Montgolfier et Paul Blanc ont voulu répondre dans un rapport voté à l'unanimité par les commissions des finances et des affaires sociales du Sénat (1).
Créée à l'occasion de la réforme de l'adoption en 2005 afin d'offrir une troisième voie à ceux qui ne peuvent être pris en charge par l'un des 42 organismes autorisés pour l'adoption (OAA) et qui ne souhaitent pas entreprendre seuls les démarches pour adopter, l'AFA s'est vu confier la mission d'informer, de conseiller et de servir d'intermédiaire pour l'adoption de mineurs étrangers de moins de 15 ans. Or, « trois ans après sa mise en place effective, force est de constater [qu'elle] n'a pas réussi à s'imposer dans le paysage institutionnel de l'adoption comme un organisme de référence international incontestable », indiquent les auteurs (2), soulignant les résultats « décevants » obtenus notamment en 2008, une année qui a vu le nombre d'adoptions réalisées par l'AFA passer à 582 contre 602 en 2007. La modestie des résultats de ses premières années d'activité n'est toutefois pas exclusivement imputable à ses dysfonctionnements, insistent les sénateurs, pour qui la dégradation du contexte de l'adoption internationale et le caractère inachevé de la réforme de 2005 expliquent aussi, pour une large part, les difficultés rencontrées par l'organisme depuis sa mise en place. « On peut donc dire que les torts sont partagés, en particulier avec les ministères de tutelle et l'Autorité centrale [française pour l'adoption], qui n'ont pas assuré leur rôle de pilotage et de coordination », accusent-ils encore. « En témoigne en particulier l'absence de convention d'objectifs et de gestion, alors que l'agence entre dans sa quatrième année. »
Au final, le rapport avance une série de propositions visant à « créer des conditions favorables » au développement de l'agence, regroupées en quatre axes. Le premier consiste à accroître l'efficacité et la lisibilité de l'organisation institutionnelle de l'adoption en France, notamment en renforçant la mission de pilotage et de coordination de l'Autorité centrale. Le second axe revient à « rationaliser le fonctionnement de l'agence pour lui permettre de jouer pleinement son rôle », le rapport suggérant dans ce cadre, entre autres, d'accorder un siège d'observateur aux associations des familles au conseil d'administration de l'agence. Une troisième série de propositions vise à poursuivre la réforme engagée pour encadrer les conditions de délivrance des agréments aux familles candidates, les sénateurs recommandant en particulier la création d'un fichier nominatif national unique des agréments accordés et refusés ou encore celle d'un référentiel national d'évaluation des candidats à l'adoption commun à tous les départements. Le quatrième et dernier axe consiste à mieux encadrer les demandes d'adoption internationale - les parlementaires proposant notamment d'engager une réflexion sur la limitation du nombre de démarches simultanées d'adoption réalisées par une même famille, que ce soit individuellement, par un OAA ou par l'AFA - et, corrélativement, à encourager le développement de l'adoption nationale, en favorisant par exemple les déclarations d'abandon lorsqu'elles sont dans l'intérêt de l'enfant et en étudiant la possibilité de développer l'adoption simple.
Rappelons que le gouvernement a engagé un plan de réforme de l'adoption - présenté en août dernier (3) - dont plusieurs mesures vont dans le sens des propositions des sénateurs. Il devrait faire l'objet d'un projet de loi présenté le mois prochain en conseil des ministres.
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(2) Au contraire, elle a fait récemment l'objet de critiques, parfois assez sévères, notamment de la part de Jean-Marie Colombani dans son rapport sur l'adoption - Voir ASH n° 2550 du 21-03-08, p. 5.