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Crise sociale aux Antilles : signature de deux accords salariaux partiels

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Après plusieurs semaines de grève générale et des négociations marathons, les partenaires sociaux ont conclu, le 26 février en Guadeloupe et le 3 mars en Martinique, deux accords accordant principalement une augmentation des bas salaires de 200 € . Toutefois, en Guadeloupe, le texte n'a été signé que par cinq organisations patronales minoritaires, le Medef et la CGPME, notamment, ayant refusé de le parapher. Conséquence, il ne concerne que de 15 000 à 17 000 salariés environ sur les 85 000 que compte l'île. Elie Domota, leader du collectif LKP à l'origine du mouvement, a annoncé son intention de demander au ministre du Travail, qui en a la faculté, d'étendre par arrêté à toutes les entreprises de Guadeloupe l'application de l'accord. Cela ne sera cependant peut-être pas nécessaire puisque, selon le secrétaire d'Etat chargé de l'outre-mer, Yves Jégo, qui s'exprimait le 3 mars lors d'une conférence de presse, le Medef Guadeloupe et la CGPME locale souhaitent « proposer des dispositions qui s'appliqueraient aux entreprises ressortissantes [des deux organisations patronales] et qui viendraient compléter l'accord ». Willy Angèle, président du Medef Guadeloupe, a d'ailleurs annoncé le jour même sur France Info qu'il ferait « une recommandation à l'ensemble de [ses] adhérents, qui consiste à verser des primes de vie chère qui évolueront entre 50 et 100 € , de manière à ce que cette problématique des bas salaires soit traitée ».

En Martinique, si le patronat dans son ensemble a accepté de ratifier l'accord, ce sont la CGT Martinique et FO, pourtant membres du Collectif du 5 février (intersyndicale qui mène le mouvement social), qui n'ont pas voulu le signer dans l'immédiat, préférant consulter au préalable leur base. Une décision qui pourrait fragiliser l'accord, même si le Medef local, le préfet et le président du collectif assurent que ce texte est valide.

A noter : dans les deux départements d'outre-mer (DOM), la signature de ces accords salariaux n'a pas mis totalement fin à la grève. A l'heure où nous bouclions les ASH, elle se poursuivait dans l'attente de la conclusion d'un texte de sortie de crise dont l'élaboration était en cours.

Une augmentation de 200 nets pour les bas salaires

Signé par cinq organisations patronales (UMPEG, UCEG, CRTG, OPGSS, UNAPL) et sept organisations syndicales réunies au sein du collectif LKP, l'accord régional interprofessionnel sur les salaires en Guadeloupe prévoit, pour les salariés dont le salaire ne dépasse pas 1,4 SMIC, une augmentation de 200 € nets prise en charge de la façon suivante :

dans les entreprises d'au plus 100 salariés : 50 € par l'employeur, 50 € par les collectivités territoriales et 100 € par l'Etat au titre du revenu supplémentaire temporaire d'activité (RTSA) créé à l'occasion de cette crise ;

dans les entreprises de plus de 100 salariés : 100 € par l'employeur et 100 € par l'Etat.

La prise en charge par l'Etat se fera pendant 36 mois et celle des collectivités territoriales pendant 12 mois. Ensuite, « l'augmentation de salaire de 200 € nets est intégrée dans la rémunération des salariés à la charge de l'employeur ».

Il est en outre prévu que les rémunérations des salariés percevant un salaire supérieur à 1,4 SMIC et inférieur à 1,6 SMIC seront fixées dans le cadre de négociations de branche ou d'entreprise qui s'ouvriront, dans un délai de 30 jours suivant la signature de l'accord, sur la base d'une augmentation minimale de 6 %. Les salariés percevant plus de 1,6 SMIC verront quant à eux leur revenu augmenter d'au moins 3 % dans le cadre de négociations salariales qui seront menées dans le même délai de 30 jours. Pour les salariés à temps partiel, l'augmentation sera calculée au prorata de leur temps de travail.

Tout ou partie de la progression des salaires au titre des années 2009, 2010 et 2011 sera versée sous forme de bonus exceptionnel d'un montant maximum de 1 500 € par an. Ce bonus devrait être exonéré de contributions et de cotisations sociales, à l'exception de la CSG et de la CRDS. Toutefois, pour que cette exonération puisse s'appliquer, une mesure législative, que les signataires sollicitent auprès du gouvernement, est nécessaire.

En Martinique, l'accord-cadre sur les salaires prévoit, lui aussi, une augmentation de 200 € nets pour les salariés disposant d'un salaire brut allant jusqu'à 1,4 SMIC. Les employeurs y contribueront à hauteur d'un montant compris entre 30 et 100 € , en fonction de leurs effectifs et de leurs capacités financières. L'Etat prendra en charge 100 € au titre du RTSA, le solde devant être réparti entre le conseil général et le conseil régional. Pour les salariés percevant entre 1,4 et 1,6 SMIC, des minima d'augmentation seront discutés lors de négociations de branche ou d'entreprise d'ici au 15 mai prochain.

L'organisation d'états généraux

La signature des accords salariaux a été précédée, le 19 février, d'une série d'annonces du président de la République. Tout d'abord, a assuré Nicolas Sarkozy, 150 millions d'euros serviront à financer des « améliorations » à la loi d'orientation pour le développement de l'outre-mer (1), qui doit être examinée à partir du 10 mars au Sénat. Parmi ces pistes : l'extension des secteurs visés par les zones franches d'activité et des exonérations de charges auxquelles elles donnent droit, ainsi qu'un effort fiscal en faveur du logement social.

Le chef de l'Etat a souhaité par ailleurs que 6 000 jeunes puissent bénéficier du service militaire adapté chaque année, contre 3 000 actuellement.

Enfin, il a annoncé aux élus ultra-marins la tenue d'une série d'états généraux afin de débattre des « grands enjeux » dans chacune des collectivités d'outre-mer. Il a proposé d'ouvrir lui-même en Guadeloupe cette « consultation » qui doit durer trois mois et au cours de laquelle cinq grands dossiers devraient être mis à plat : « la formation des prix, les circuits de distribution et le pouvoir d'achat », les « productions locales » et le « développement endogène », « la gouvernance au sens large », les « chantiers de la relance et les grands projets » et « la rénovation du dialogue social ». Ces consultations, qui seront coordonnées au niveau national par Richard Samuel, jusqu'alors préfet de l'Eure, devraient nourrir « avant la fin du mois de mai » la prochaine réunion du nouveau conseil interministériel de l'outre-mer (2) et déboucher sur l'adoption d'un « vaste plan de modernisation de l'outre-mer », a indiqué Nicolas Sarkozy.

A noter encore : une mission commune sénatoriale d'information sur l'outre-mer a été mise en place. Elle est chargée d'évaluer la situation des DOM et de faire toute proposition pour des solutions de long terme.

Des délais supplémentaires pour s'acquitter des impôts

Enfin, dans un communiqué du 2 mars, le ministre du Budget et des Comptes publics, Eric Woerth, a annoncé qu'un délai supplémentaire est accordé aux habitants de Guadeloupe et de Martinique pour le paiement du premier acompte 2009 d'impôt sur le revenu : la date limite de paiement est reportée au 15 avril 2009, sans application de la pénalité de 10 %. Pour les cotisations de taxe d'habitation, de taxe foncière, d'impôt sur le revenu 2008 et de contributions sociales mises en recouvrement au 31 décembre 2008, et dont les dates limites de paiement sont fixées en février ou en mars 2009, un report de la date d'échéance de 30 jours pour chacune de ces impositions est accordé, sans application de la pénalité de 10 %.

Notes

(1) Voir ASH n° 2570 du 29-08-08, p. 16.

(2) Créé par un décret du 18 février 2009 (J.O. du 19-02-09), ce conseil a pour rôle principal de définir des orientations stratégiques pour l'outre-mer, notamment en matière de développement économique, social, culturel et environnemental.

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