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CC 66 : employeurs et salariés doivent s'allier

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Dans les négociations qui s'engagent réellement pour la réforme de la convention collective de 1966 (voir ce numéro, page 29), il importe - pour les salariés, les employeurs et la société - de ne pas « niveler par le bas » les conditions de travail des professionnels. C'est ce qu'explique Christine Svolanek, chef de service éducatif à l'Association pour la protection de l'enfance et de l'adolescence (APEA), à Montpellier.

«Environ 240 000 salariés oeuvrent dans le secteur social et médico-social sous la convention collective de 1966. En relation d'aide auprès de personnes en grande fragilité personnelle et précarité sociale, ils réalisent un travail très difficile, générateur d'usure, en puisant au quotidien dans leurs ressources d'énergie personnelles. Ils le font avec courage et enthousiasme, malgré des doutes sans cesse renouvelés, avec une capacité de remise en cause que beaucoup d'autres pourraient leur envier. L'utilité de ce travail pour la cohésion de notre société est indéniable, et pourtant loin d'être toujours connue, reconnue, et encore moins valorisée.

Depuis la loi 2002-2, les exigences en termes de dispositifs d'intervention augmentent sans cesse, en intégrant des outils pour certains pertinents, et d'autres issus de l'économie marchande dont la logique peut entrer en contradiction avec la déontologie du travail social et les valeurs affichées dans les projets associatifs. L'adaptation demandée aux travailleurs du secteur social est d'une vitesse vertigineuse, et n'est possible que tant que le sens du travail est préservé.

Les travailleurs du secteur social sont des professionnels formés et compétents. En choisissant leur métier, ils ont choisi une voie où leur profit et leur confort personnels ne sont pas des valeurs premières. S'ils ont un privilège, c'est bien d'aimer le travail qu'ils font, d'y trouver du sens et même du plaisir, malgré ses contraintes lourdes. Pour autant, afin de mener à bien leurs missions, ils ont besoin d'une assise qui leur garantisse suffisamment de sérénité pour ne pas avoir à se préoccuper quotidiennement de leur propre survie.

Si la convention collective de 1966 comporte des avantages, ceux-ci peuvent s'expliquer par l'ampleur et l'exigence de la tâche dont les professionnels s'acquittent avec un engagement qui ne doit pas être ignoré ou mésestimé. L'écart en termes de rémunération et de congés a déjà commencé à se creuser avec d'autres conventions collectives, au point que le recrutement de nouveaux collègues devient de plus en plus ardu. Certaines catégories de salariés de la CC 66 font d'ores et déjà partie des travailleurs pauvres ; or mettre à terme tous les travailleurs du secteur social en situation de précarité résoudrait-il la crise économique ? Peut-on décemment attendre d'eux de continuer à s'exposer avec motivation à des situations difficiles et douloureuses si leur propre subsistance est mise en péril et menace leur équilibre personnel ?

Deux risques préoccupants

Mon expérience de l'encadrement d'un service d'AEMO m'a convaincue d'un autre aspect essentiel : le travail des professionnels n'est possible que s'ils peuvent s'appuyer sur la confiance et le soutien indéfectible de leurs cadres, de leur direction et de leur employeur, et si le projet associatif qui les réunit tous leur permet de partager les mêmes valeurs.

C'est ainsi qu'à propos des négociations qui s'engagent, j'entrevois deux risques préoccupants : qu'elles ne dessinent une fêlure entre les employeurs et les salariés, préjudiciable à l'étayage dont ces derniers ont besoin, et que le modèle marchand ne tente de s'imposer à ce secteur d'activité qui est l'un des derniers à ne pas avoir renié la valeur de la solidarité. Est-il sensé de raisonner uniquement en termes d'économies de moyens, de «gain de productivité» à court terme, dans un secteur dont l'utilité se situe bien ailleurs - ce que les responsables politiques savent pourtant pertinemment -, et de faire fi des dégâts causés à moyen et long terme, tant chez les professionnels du secteur qu'au niveau de la société dans son ensemble s'il est mis à mal ?

Il est beaucoup question de «réformes» en France, depuis un certain temps. La réforme, selon Le Petit Robert, est «un changement profond apporté dans la forme d'une institution afin de l'améliorer, d'en obtenir de meilleurs résultats». Ce n'est donc pas une notion aussi péjorative et restrictive que les résultats déjà perceptibles des «réformes» auxquelles nous assistons ces derniers mois pourraient le faire croire. Il me semble donc nécessaire à la survie du secteur social qu'employeurs et salariés se rejoignent pour refuser de niveler par le bas mais élever au contraire le niveau du débat. »

Contact : APEA : 59, avenue de Fès - Bât. D - 34080 Montpellier E-mail : svolanek.christine@wanadoo.fr.

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