Interprétant la directive européenne 2004/83/CE du 29 avril 2004 relative aux conditions que doivent remplir les ressortissants des pays tiers pour pouvoir prétendre au statut de réfugié, la Cour de justice des communautés européennes (CJCE) a jugé, dans un arrêt du 17 février, qu'un demandeur d'asile ne doit pas nécessairement prouver qu'il est menacé dans son pays d'origine en raison d'éléments propres à sa situation personnelle pour obtenir le statut conféré par la protection subsidiaire (1).
En espèce, les membres d'un couple d'origine irakienne s'étaient vu refuser en décembre 2006 un permis de séjour temporaire aux Pays-Bas, au motif qu'ils n'avaient pas suffisamment établi les circonstances prouvant l'existence de « menaces graves et individuelles » - requise par la directive du 29 avril 2004 - auxquelles ils prétendaient être exposés dans leur pays d'origine. Une décision contre laquelle ils ont fait appel. Estimant que la directive européenne présente des difficultés d'interprétation, la juridiction néerlandaise a interrogé la CJCE pour savoir si l'existence de « menaces graves et individuelles » doit nécessairement être rapportée par la preuve d'actes de violence contre le demandeur de la protection internationale lui-même, ou si elle peut résulter d'éléments plus généraux concernant son pays d'origine.
Dans son arrêt du 17 février, la Cour de justice estime que l'existence de « menaces graves et individuelles contre la vie ou la personne du demandeur de la protection subsidiaire n'est pas subordonnée à la condition que ce dernier rapporte la preuve qu'il est visé spécifiquement en raison d'éléments propres à sa situation personnelle ». Selon elle, « l'existence de telles menaces peut être exceptionnellement considérée comme établie lorsque le degré de violence aveugle caractérisant le conflit armé en cours atteint un niveau si élevé qu'il existe des motifs sérieux de croire qu'un civil renvoyé dans le pays concerné encourt un risque réel de subir des menaces graves et individuelles ».
En outre, la Cour de justice des communautés européennes précise que, dans l'évaluation individuelle d'une demande de protection internationale, les autorités nationales peuvent tenir compte de l'étendue géographique de la situation de violence et de la destination effective du demandeur, ainsi que de l'existence d'un indice sérieux de risque réel, tel que des menaces ou atteintes déjà perpétrées à l'encontre du demandeur d'asile. L'existence d'un tel indice devrait avoir pour effet de réduire l'exigence de degré de violence aveugle requis pour bénéficier de la protection internationale, estime la Cour.
(1) Selon la définition donnée par la directive du 29 avril 2004 - anticipée par la France dans la loi du 10 décembre 2003 relative au droit d'asile -, la protection subsidiaire est accordée à toute personne qui ne remplit pas les conditions d'octroi du statut de réfugié et qui établit qu'elle est exposée dans son pays à l'une des menaces graves suivantes : la peine de mort ; la torture ou des peines ou traitements inhumains ou dégradants ; s'agissant d'un civil, une menace grave, directe et individuelle contre sa vie ou sa personne en raison d'une violence généralisée résultant d'une situation de conflit armé interne ou international.