Peu d'annonces concrètes mais des pistes de travail : dans son intervention radiotélévisée du 5 février, le chef de l'Etat a ouvert plusieurs chantiers et donné rendez-vous aux partenaires sociaux le 18 février pour les approfondir. Une semaine après la mobilisation du 29 janvier pour la défense de l'emploi et le maintien du pouvoir d'achat (1), Nicolas Sarkozy a écarté l'idée d'une pause dans les réformes, qu'il compte poursuivre « au même rythme » (2). Pas question non plus de modifier la philosophie d'ensemble du plan de relance de l'économie (3)pour l'axer sur la consommation. La priorité reste donc l'investissement. Mais le président de la République a promis des « mesures sociales » pour répondre à l'inquiétude grandissante des Français face à la crise.
L'argent que l'Etat a prêté aux banques doit rapporter en fin d'année 1,4 milliard d'euros d'intérêts, qui seront « intégralement » utilisés pour financer ces mesures.
Nicolas Sarkozy réfléchit à la suppression de la première tranche de l'impôt sur le revenu (4)ou du deuxième tiers provisionnel en 2009 pour soutenir « le bas de la classe moyenne ». Propositions qu'il soumettra aux syndicats. Autres options envisagées : une augmentation des allocations familiales qui pourrait concerner toutes les familles - mais avec éventuellement une condition de revenu - ou seulement celles ayant au moins trois enfants (5). Le chef de l'Etat a également évoqué un « chèque emploi service payé par l'Etat pour les personnes âgées qui vivent seules ou les mères de famille seules ». Par ailleurs, il a exclu une baisse de la TVA (taxe sur la valeur ajoutée) sur les produits de première nécessité, préférant des mesures ciblées sur les produits propres et les produits culturels.
Le président de la République veut « aller plus loin » sur l'indemnisation du chômage partiel, déjà passée de 50 % à 60 % du salaire brut à la suite d'un accord entre partenaires sociaux conclu à la mi-décembre (6). Et estime qu'« il faut trouver des solutions » pour que les salariés concernés puissent se former.
Il a par ailleurs exclut tout « coup de pouce » au SMIC, mesure demandée par certaines organisations syndicales. Mais, a-t-il précisé, l'Etat est « prêt à faire un effort » pour mieux protéger les jeunes qui se retrouvent au chômage sans bénéficier d'indemnisation, faute d'avoir suffisamment cotisé. Le chef de l'Etat veut aussi améliorer la situation des salariés dont le contrat à durée déterminée s'achève et qui, compte tenu de la crise, « n'ont aucune chance de retrouver du travail ».
Nicolas Sarkozy a annoncé, en outre, la suppression de la taxe professionnelle en 2010 (impôt unique en Europe pesant spécifiquement sur l'outil de production des entreprises), ce qui, a-t-il précisé, représente un coût net de 8 milliards d'euros pour l'Etat. Objectif : lutter contre les délocalisations. Une recette de substitution sera trouvée pour ne pas pénaliser les collectivités locales (taxe carbone ou impôt nouveau). « Les modalités de cette compensation seront arrêtées après que le comité présidé par Edouard Balladur sur la réforme des administrations locales aura remis ses propositions », a précisé Matignon le 8 février.
Le chef de l'Etat a également réaffirmé qu'il demanderait aux entreprises, en échange du soutien public, « des contreparties » en termes « de délocalisation, de relocalisation ou de licenciement ».
Enfin, les partenaires sociaux doivent aborder le « sujet essentiel » du « partage du profit » entre les salariés et les actionnaires, sans quoi « l'Etat prendra ses responsabilités ». Nicolas Sarkozy a défendu la règle des trois tiers : un tiers des profits à réinvestir dans l'entreprise, un tiers pour les actionnaires, un tiers pour les salariés.
(1) Huit organisations syndicales (CFTD, CFTC, CFE-CGC, CGT, FO, FSU, Solidaires et Unsa) ont appelé, le 9 février, à une nouvelle journée de « mobilisation » le 19 mars.
(2) Face à la revendication commune des organisations syndicales de renoncer aux 30 000 suppressions de postes dans la fonction publique, il a par exemple indiqué qu'il souhaitait continuer sa politique de non-remplacement d'un départ à la retraite sur deux.
(4) « Sur la base des revenus 2007 déclarés, le nombre de foyers fiscaux qui payent l'impôt sur le revenu dans la tranche à 5,5 % - parce que leur revenu imposable par part n'excédait pas 11 344 € - est estimé à 2,1 millions, pour un montant moyen d'impôt de 334 € , soit 710 millions d'euros environ au total » , a précisé le ministère du Budget le 6 février.
(5) Le président de la caisse nationale des allocations familiales, Jean-Louis Deroussen, a indiqué le 6 février préférer « une prime aux familles les plus démunies » plutôt qu'une revalorisation des allocations familiales qui « serait forcément de faible amplitude » .