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Face à la crise, prévenir le geste suicidaire

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Evoquant le risque d'une augmentation des tentations suicidaires du fait de l'accroissement de la précarité économique, l'Union nationale pour la prévention du suicide réclame la mise en place d'un « plan sanitaire et solidaire ».

«Après la crise financière puis économique, nous risquons d'être confrontés à une véritable crise sanitaire. Tout porte à croire que la forte remontée du chômage dans notre pays, les difficultés financières que vont connaître de nombreux Français, les incertitudes sur l'avenir, vont engendrer des difficultés personnelles et psychologiques majeures, avec une recrudescence des souffrances psychiques, des états dépressifs et des tentations suicidaires », prévient le professeur Michel Debout (1). A l'occasion des XIIIes journées nationales de prévention du suicide organisées par l'Union nationale pour la prévention du suicide (UNPS), son président insiste donc sur la nécessité de mieux prendre en compte le risque suicidaire chez les personnes confrontées à la précarité.

A l'appui de son discours, des chiffres. L'UNPS, avec le soutien de la MACIF, a en effet réalisé une étude sur la précarité et le suicide en France. 2 012 personnes, échantillon représentatif de la population majeure française, et 312 personnes en difficulté ayant eu recours au Secours populaire ont été jointes au téléphone entre novembre et décembre dernier. Premier enseignement : la situation économique et sociale (évaluée par un indicateur synthétique de précarité) influe très fortement sur le degré de souffrance psychique. 69 % des personnes en demande d'aide présentent ainsi une souffrance psychique avérée, contre 20 % de l'ensemble des Français. Deuxième constat : la souffrance psychique est fortement liée au risque suicidaire : parmi les personnes ayant un score de souffrance psychique supérieur ou égal à 6 (un score 0 correspond à une absence de souffrance et s'il est supérieur ou égal à 3, il indique une souffrance avérée), une sur deux a déjà pensé (même vaguement) au suicide et une sur trois l'a envisagé sérieusement. En outre, 15 % ont été hospitalisées à la suite d'une tentative. Par ailleurs, la situation de l'emploi a également une incidence : le risque suicidaire est très élevé chez les bénéficiaires de prestations sociales (qui représentent 70 % des personnes en demande d'aide) et, dans une moindre mesure, parmi les salariés ne disposant pas d'un emploi stable en contrat à durée indéterminée. Enfin, la précarité et les tentations suicidaires sont fortement corrélées au fait d'être victime de violences. Ainsi, alors que 4 % des Français déclarent avoir été victimes, au cours des 12 derniers mois, d'une agression ou de violences physiques ou verbales ayant nécessité des soins médicaux ou psychologiques, et 4 % de harcèlement, ces taux sont respectivement de 22 % et 21 % pour les personnes en demande d'aide.

Face à ces chiffres préoccupants, l'UNPS réclame l'élaboration d'« un plan sanitaire et solidaire » venant compléter le plan de relance économique et financier. Un ensemble d'actions, qui serait défini par « une conférence sur l'Humain », instance réunissant l'ensemble des services de l'Etat concernés, les acteurs économiques (patronat et syndicats), médicaux, médico-sociaux et les associations.

Michel Debout propose d'abord de prévenir les souffrances liées à la perte d'emploi ou aux difficultés dans la vie professionnelle. Il préconise ainsi la mise en place d'un « dispositif d'écoute et de suivi solidaire » à l'intention des salariés victimes de licenciement économique. Mis en place systématiquement dès la présentation d'un plan social aux partenaires sociaux, à la charge de l'employeur et d'une durée minimale de deux ans, il serait animé par un comité de représentants du personnel et d'intervenants extérieurs (psychologues et/ou psycho-sociologues) se déplaçant sur le lieu de l'entreprise. L'UNPS demande également que les personnes licenciées individuellement soient suivies pendant deux ans par le médecin du travail et que celles qui se sentent menacées dans la pérennité de leur emploi puissent le rencontrer en dehors de la visite de contrôle réglementaire. Par ailleurs, face à la pression que subissent les salariés, elle souhaite la mise en oeuvre, à l'initiative du comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail, d'un protocole pour prendre en compte les situations difficiles.

Un autre axe d'action vise la prévention des situations de surendettement. Pour éviter le passage très contraignant en commission de surendettement de la Banque de France, Michel Debout suggère que les employés des banques et des organismes de crédit soient sensibilisés aux effets psychiques de la précarité financière et qu'un établissement financier public soit créé afin de procéder au rachat et à l'apurement des dettes des personnes en difficulté. Par ailleurs, outre la création d'un observatoire du suicide permettant de mieux connaître les raisons de cet acte, il souhaite voir renforcer les liens entre son réseau, les structures de soin et les associations.

Notes

(1) Intervenant le 4 février au Conseil économique et social lors du colloque des XIIIes journées nationales de prévention du suicide.

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