Simplification du plan de formation, portabilité du droit individuel à la formation (DIF), « préparation opérationnelle à l'emploi », Fonds paritaire de sécurisation des parcours professionnels... : sans réformer en profondeur le système ni créer de contribution supplémentaire pour les entreprises, l'accord national interprofessionnel (ANI) du 7 janvier dernier sur « le développement de la formation tout au long de la vie professionnelle, la professionnalisation et la sécurisation des parcours professionnels » crée plusieurs dispositifs pour sécuriser davantage les parcours professionnels, en direction notamment des demandeurs d'emploi. Et tente d'introduire plus de transparence dans la gestion des fonds de la formation professionnelle, régulièrement décriée pour son opacité. L'objectif des partenaires sociaux ? Parvenir à former chaque année 200 000 demandeurs d'emploi supplémentaires et 500 000 salariés en plus parmi les moins qualifiés. L'enveloppe financière globale reste cependant constante. Il s'agit davantage d'une affectation ciblée des fonds sur des publics en difficulté et non de moyens financiers supplémentaires alloués à la formation.
La CFTC, FO et la CFE-CGC ainsi q ue, côté patronal, la CGPME et l'UPA ont décidé de signer ce texte (1), qui s'inscrit dans le prolongement de l'ANI du 5 décembre 2003 sur l'accès des salariés à la formation tout au long de la vie professionnelle (2) et de celui du 11 janvier 2008 sur la modernisation du marché du travail (3). Il sera transposé dans un accord général réunissant ses dispositions avec celles de l'accord de 2003 qui restent en application, avant de l'être dans une loi.
L'accord national interprofessionnel du 7 janvier 2009 simplifie les modalités de mise en oeuvre de certains dispositifs existants. Exit, par exemple, les trois catégories d'actions du plan de formation définies par l'ANI de 2003, jugé trop complexe à appréhender pour les entreprises. Le nouveau texte n'en retient plus que deux, présentées par l'employeur lors de la consultation du comité d'entreprise sur le projet de plan pour l'année à venir : les actions d'adaptation au poste de travail et celles liées à l'évolution ou au maintien dans l'emploi dans l'entreprise, qui seront réalisées pendant le temps de travail et rémunérées au taux normal ; les actions liées au développement des compétences, qui pourront être réalisées hors du temps de travail.
Par ailleurs, dans le droit-fil des propositions formulées par les partenaires sociaux à l'occasion du « Grenelle de l'insertion » (4), l'accès au contrat de professionnalisation sera élargi. Les entreprises, qui pouvaient déjà en conclure avec des demandeurs d'emploi de plus de 26 ans, seront ainsi incitées à le faire pour les publics les plus éloignés de l'emploi. Ces personnes en grande difficulté pourront en outre bénéficier, dans certains cas, avec l'accord de l'entreprise, d'un accompagnement spécifique par un tuteur externe.
Les partenaires sociaux ont également repris les dispositions de l'ANI de 2008 visant à introduire la portabilité du DIF entre deux contrats de travail. Ainsi, tout nouveau demandeur d'emploi indemnisé pourra faire valoir ses heures de DIF restantes, en accord avec le référent chargé de son accompagnement, au cours de la première moitié de sa période d'indemnisation. Et ce, afin d'abonder le financement d'actions de formation, de bilan de compétences ou de validation des acquis de l'expérience (VAE), ou de mesures d'accompagnement prescrites par son référent. Il pourra également mobiliser ses heures auprès de son nouvel employeur, dans les deux ans suivant son embauche. Qui financera ? L'organisme paritaire collecteur agréé
(OPCA) de l'ancien employeur pendant la période de chômage, ou celui du nouvel employeur, sur la base forfaitaire de 9,15 € de l'heure.
Autre idée retenue, celle d'une « formation initiale différée ». Ce nouveau dispositif s'adresse aux salariés qui ont arrêté leur formation initiale avant le premier cycle de l'enseignement supérieur - en priorité ceux qui n'ont pas obtenu de qualification professionnelle reconnue - et qui souhaitent poursuivre ultérieurement des études en vue d'une promotion sociale. Ces derniers devraient ainsi pouvoir bénéficier d'une ou de plusieurs formations qualifiantes ou diplômantes d'une durée totale de un an maximum, mises en oeuvre notamment dans le cadre du congé individuel de formation (CIF).
Lancée par le patronat, l'hypothèse d'une fusion du DIF et du CIF a été écartée. Mais, pour autant, le débat n'est pas clos : un groupe de travail paritaire, chargé de formuler des propositions sur l'optimisation des deux dispositifs, et envisageant une gestion financière et administrative du DIF externalisée, doit être mis en place avant le 31 janvier. Ses conclusions, attendues au plus tard pour le 30 avril, serviront de base à la négociation d'un avenant à l'accord du 7 janvier.
Un nouveau dispositif - baptisé « préparation opérationnelle à l'emploi » - permettra aux demandeurs d'emploi de bénéficier d'une formation de 400 heures maximum en vue d'occuper un emploi correspondant à une offre identifiée déposée à Pôle emploi par une entreprise.
A l'issue de la formation, l'employeur conclura un contrat de travail à durée indéterminée, un contrat de professionnalisation à durée indéterminée ou un contrat à durée déterminée d'au moins 12 mois avec le bénéficiaire, qui aura le statut de stagiaire de la formation professionnelle pendant l'action de formation.
Autre innovation de l'ANI du 7 janvier : la création d'un Fonds paritaire de sécurisation des parcours professionnels - en remplacement de l'actuel Fonds unique de péréquation - qui aura pour mission de contribuer au financement des actions concourant à la qualification et à la requalification des salariés et des demandeurs d'emploi.
L'objectif est de doubler le nombre de salariés les moins qualifiés et d'augmenter de un tiers celui des demandeurs d'emploi formés au cours d'une même année.
A noter : pour 2009, à titre transitoire et pour faire face à l'urgence sociale, les partenaires sociaux prévoient de financer des actions de qualification et de requalification pour les salariés et les demandeurs d'emploi en difficulté, à partir des ressources disponibles au sein du Fonds unique de péréquation. En tant que de besoin, le pourcentage que lui reversent les OPCA agréés au titre de la professionnalisation, actuellement fixé à 5 % de leur collecte, pourra être fixé à 10 %.
Au-delà, chaque branche professionnelle devra recenser les certifications existantes dans son champ d'activité en lien avec la Commission nationale de la certification professionnelle. En matière de VAE, lorsqu'une formation complémentaire s'avère nécessaire pour l'obtention de la certification visée après une première réunion du jury de validation, le candidat bénéficiera d'une priorité d'instruction et de prise en charge financière par l'Opacif (organisme paritaire collecteur agréé au titre du CIF) ou l'OPCA concerné. Par ailleurs, un socle de compétences sera mis en place afin de favoriser l'évolution et les transitions tout au long de la vie professionnelle. Au-delà du socle commun de connaissances et de compétences acquis en formation initiale, il intégrera l'aptitude à travailler en équipe, la maîtrise des outils informatiques et bureautiques et la pratique de l'anglais. Il pourra être complété par les commissions paritaires nationales de l'emploi des branches afin de tenir compte de la diversité des métiers.
Une nouvelle instance - le Conseil paritaire national d'évaluation de la formation professionnelle - sera également chargée des évaluations régulières et pérennes des politiques paritaires de formation professionnelle. Les OPCA devront par ailleurs mettre en oeuvre une politique incitative au développement de la professionnalisation et de la sécurisation des parcours, au bénéfice prioritairement des salariés mais aussi des demandeurs d'emploi. Enfin, des règles de gestion des OPCA et des Opacif sont fixées par l'ANI du 7 janvier 2009 afin d'assurer la transparence de leurs activités.
(1) La CFDT devait se prononcer le 21 janvier. La CGT donnera, elle, sa position le 4 février à l'issue de la commission exécutive confédérale qui aura lieu après son prochain comité confédéral national des 3 et 4 février.
(2) Voir en dernier lieu ASH n° 2419 du 2-09-05, p. 13.