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Maquisard du social

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Figure historique de l'éducation spécialisée, Jacques Ladsous revient sur les grandes rencontres qui ont jalonné son parcours.

Est-il besoin de présenter encore Jacques Ladsous ? Educateur spécialisé dès 1947, militant associatif, formateur de travailleurs sociaux, directeur d'établissement, longtemps vice-président du Conseil supérieur du travail social, son histoire professionnelle se confond avec celle de l'éducation spécialisée (1). Aujourd'hui, âgé de 82 ans, cet homme aux convictions assumées revient sur son riche parcours dans un livre-témoignage, Profession : éducateur. « J'aimerais, dans ce récit, vous conter ma profession d'éducateur, les points forts de sa construction, les choix heureux, les moments plus douloureux », écrit-il dans un ouvrage qui s'adresse à tous ceux que tenterait l'aventure éducative et sociale.

Découpés en plans successifs, les chapitres de cette histoire de vie abordent les grandes rencontres de Jacques Ladsous : avec l'éducation, la formation, l'autre... A commencer par l'épisode fondateur du maquis, où il doit, à 17 ans, s'occuper de la survie d'une vingtaine d'enfants de déportés. Ce qui le mène sur le chemin de l'enfance en difficulté. Sa plume se fait plus personnelle lorsqu'il évoque ses sentiments envers son épouse, les huit années qu'ils ont vécu en Algérie (d'où il sera expulsé en 1958 par l'armée française) ou sa position sur la religion (catholique critique, il regrette notamment les positions de l'Eglise sur la sexualité). Peu de dates ou de repères, mais un air de musique d'antan qui s'échappe des pages - Reggiani, Trenet, Brassens, Montand... « J'ai été responsable de chorale. La musique rassemble. Ce que la musique nous propose, il faudrait que la vie nous le propose aussi », confie-t-il.

Profession : éducateur - De rencontres en rencontres - Jacques Ladsous - L'Harmattan - 134 pages - 13 €

Pourquoi écrire aujourd'hui un ouvrage si personnel ?

C'est un peu à la demande de ma fille - à qui le livre est d'ailleurs dédicacé -, qui souhaitait que je laisse quelque chose de l'ordre de la transmission. C'est aussi parce que j'avais envie d'expliquer aux gens que la compétence se gagne au fil du temps et des rencontres que l'on fait. Michel Chauvière l'a bien compris, en écrivant la préface : je ne cherchais pas à rédiger un ouvrage didactique, je voulais l'inscrire dans la vie. Enfin, le troisième moteur a été une étudiante venue m'interviewer dans le cadre de sa thèse en travail social. Elle souhaitait raconter une histoire de vie et a passé quatre jours à mes côtés. J'ai raconté... et je me suis dit que mon vécu pouvait intéresser d'autres personnes.

Le livre passe sous silence des moments importants de votre vie : l'engagement politique, l'Aneji (2), Mai 68... Pourquoi ce choix ?

Tout cela, je pense que c'est déjà connu, et je n'avais pas envie de me répéter. Je voulais faire le contraire : montrer que c'est l'ordinaire de la vie qui fait de vous quelqu'un. J'ai cherché dans mes souvenirs ce qui était le plus marquant. Je me suis mis à ma table, et dix jours plus tard j'avais terminé. Je ne suis pas un grand théoricien, mais un essayiste du terrain qui tente de tirer de ce terrain de la substance. Si le livre manque de chronologie, c'est que la vie elle-même n'est pas linéaire. Je voulais écrire dans un souffle, je n'avais pas de prétention biographique mais celle de décrire un parcours, et dans ce parcours il y a des va-et-vient. En relisant mon livre, je me suis aperçu que j'avais oublié de citer tous les copains croisés au fil du temps, c'était presque trop évident. C'est pour ne pas les oublier que j'ai ajouté le chapitre « Rebond ».

Que souhaiteriez-vous que l'on retienne de cet ouvrage ?

Les rencontres. Je fais allusion à Schwartz, à Sartre, à Deligny et à toutes les personnes qui, directement ou indirectement, ont représenté des balises dans mon parcours. Et puis j'ai toujours eu cette idée qu'à partir du moment où quelqu'un écrivait quelque chose qui m'intéressait, il fallait trouver l'homme derrière l'oeuvre. C'est comme ça que j'ai rencontré Jouvet, Maffesoli, Boulez... La confrontation a été importante pour moi à tous les niveaux. C'est pour cette raison que j'ai aimé travailler avec les adolescents turbulents, violents, réactionnels. Aujourd'hui encore, si un chahut se produit dans un train de banlieue, je m'assois au milieu des jeunes et parle avec eux. Le fait de s'intéresser à eux les calme. Je prépare par ailleurs un livre de « contes », d'histoires de vie, sur les gens que j'ai rencontrés dans mon parcours professionnel.

PROPOS RECUEILLIS PAR É. V.

Notes

(1) Voir « Jacques Ladsous, le passeur », ASH n° 2377 du 15-10-04, p. 35.

(2) Association nationale des éducateurs de jeunes inadaptés (1947-1993), dont Jacques Ladsous fut l'un des cofondateurs.

CULTURE

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