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PERSONNES ÂGÉES

L'accueil des immigrés vieillissants en institution

Pour que la vieillesse des personnes immigrées ne s'apparente pas à un second exil, il faudrait que les acteurs de la gérontologie et ceux de l'immigration sortent de leur méconnaissance mutuelle et travaillent davantage ensemble, explique Nadège Bartkowiak, socio-anthropologue, directrice d'un établissement d'hébergement pour personnes âgées dépendantes (EHPAD). Actuellement, seules 3 % des 1 414 000 personnes immigrées de plus de 60 ans vivent en institution pour personnes âgées : il s'agit surtout de femmes, très souvent veuves et issues des migrations anciennes (Espagne, Italie, Pologne), qui peuvent communiquer en français et partagent, pour l'essentiel, les codes culturels et religieux en vigueur en France. Les autres immigrés, le plus fréquemment des hommes musulmans originaires du Maghreb, vieillissent à leur domicile (11 %) et surtout (85 %) en foyers de travailleurs migrants (FTM).

Ces derniers doivent donc de plus en plus s'ouvrir aux services de maintien « à domicile » ainsi qu'aux professionnels extérieurs du soin et du social. C'est ce que fait, par exemple, ADOMA (ex-Sonacotra), qui réhabilite également ses foyers en « résidences sociales » adaptées aux personnes âgées (ascenseurs, portes élargies à la dimension d'un fauteuil roulant, lits à hauteur variable, salles de bain sécurisées, toilettes surélevées). En revanche, les institutions gérontologiques ne font pas d'effort équivalent pour ajuster leur prise en charge aux besoins des personnes qui sont à la fois âgées et immigrées, affirme l'auteure : « la seule et unique caractéristique sociale mise en avant est l'âge, et aucune autre ». Ainsi, en maison de retraite, peu de professionnels parlent une langue étrangère - ce qui peut notamment être à l'origine d'évaluations gérontologiques erronées. Quant aux pratiques alimentaires musulmanes ou au rite des cinq prières par jour, ce sont des éléments culturels largement méconnus des établissements. On n'est donc pas trop étonné de constater que ces derniers ont très mauvaise presse parmi les publics immigrés : selon une recherche réalisée en 2001, c'est pour des raisons culturelles que 72 % des résidents de foyers de travailleurs migrants affirment ne pas vouloir accéder à un lieu de vie réservé aux personnes âgées - contre 10 % qui mettent en avant l'obstacle financier.

Pourtant, il est possible de prendre en compte la variable culturelle sans pour autant communautariser les EHPAD, estime Nadège Bartkowiak. Comme le montre la démarche conduite par une maison de retraite de la région parisienne, répondre aux attentes de personnes âgées immigrées ne revient pas à les « cibler » en tant que groupe destinataire d'une politique particulière, mais à davantage individualiser la prestation offerte à ces résidents, c'est-à-dire à ne pas gommer une dimension de leur identité.

L'accueil des immigrés vieillissants en institution - Nadège Bartkowiak - Presses de l'EHESP - 19 € .

TRAVAIL SOCIAL INTERVENTION SOCIALE

Jeux de loi

Antonin, 16 ans, est arrivé en classe avec des ecchymoses sur le visage et les bras. Il aurait subi une sévère correction de son père. Sa situation fait l'objet d'un signalement scolaire. Pascale, 14 ans, sollicite elle-même le tribunal pour enfants. Hébergée par une tante avec laquelle elle déclare ne pas s'entendre, elle demande son émancipation. Clémence, 12 ans, est déscolarisée depuis plusieurs mois. Fille unique d'une mère célibataire, l'adolescente souffrirait de troubles phobiques pour lesquels elle refuse d'être soignée. Un membre de sa famille élargie s'inquiète de sa situation. « Voilà comment [...] commencent les histoires de rencontre » entre Joëlle Loiseau-Blachère et les mineurs pressentis en danger au bénéfice desquels elle est chargée d'une mesure d'investigation et d'orientation éducative (IOE). Voilà aussi comment commence ce récit d'une éducatrice spécialisée « convaincue de faire l'un des plus beaux métiers du monde », qui en décrit les tenants et aboutissants avec précision et alacrité.

Parvenir à la connaissance la plus fine et la plus juste possible d'un jeune et de son environnement familial afin de permettre au magistrat à l'origine de la mesure de traiter au mieux la situation de l'intéressé, telle est la finalité de la mission d'investigation. Du premier contact - parfois très rugueux - avec l'enfant ou l'adolescent, jusqu'à la remise au juge du rapport de fin de mesure, fruit d'un travail d'élaboration de la « matière informative », réalisé en équipe pluridisciplinaire, Joëlle Loiseau-Blachère donne à voir les étapes d'une démarche qui est recherche du sens d'une crise familiale et recherche des solutions envisageables pour en sortir. Au fil des six mois dévolus à l'IOE, temps suspendu de bilan mais aussi temps moteur d'évolution des protagonistes, l'intervenant éducatif fait « le pari d'une relation qui peut permettre au jeune, initialement objet de la mesure, de devenir sujet de son histoire et, ce faisant, principal acteur de sa mutation obligée ».

Jeux de loi. Ethique et pratiques d'un service d'investigation et d'orientation éducative (IOE) - Joëlle Loiseau-Blachère - Ed. érès - 23 € .

A quoi servent les professionnels de l'insertion ?

Comment les intervenants qui exercent en centres d'hébergement et de réinsertion sociale, en missions locales ou dans des structures d'insertion par l'économique conçoivent-ils leur rôle ? Pour répondre à cette question, moins accrocheuse que celle du titre de l'ouvrage mais au coeur de sa problématique, le sociologue Philippe Bregeon a rencontré une pléiade de professionnels opérant dans ces trois réseaux. Ils ont en commun un certain nombre de représentations d'eux-mêmes et de leur métier, au premier rang desquelles la référence à des valeurs altruistes et l'importance de l'écoute et du travail relationnel. Mais, au-delà de ce socle partagé, les acteurs de l'insertion développent différents types d'interactions avec les usagers. Le sociologue en dégage cinq principaux, qui renvoient à des formes historiques successives de l'intervention sociale : le modèle thérapeutique, le modèle de l'assistance, le modèle de la socialisation, le modèle communautaire, qui concerne plus particulièrement les intervenants en situation de proximité prolongée avec les personnes en insertion, et le modèle des services. « Chaque métier s'attache [...] à deux ou trois de ces modèles qu'il hiérarchise et qu'il articule en fonction des situations », explique l'auteur.

A quoi servent les professionnels de l'insertion ? - Philippe Bregeon -Ed. L'Harmattan - 24,50 € .

LOGEMENT - HÉBERGEMENT

Le locataire endetté

Déménageant « à la cloche de bois » - celle qui ne sonne pas quand les cloches en cuivre de Notre-Dame de Paris sont à Rome le Jeudi saint -, les locataires qui ne peuvent payer leur terme déguerpissent de leur logement avant de voir saisir leurs meubles. Ces « départs à la Saint-Pierre » sont monnaie courante aux XVIIIe et XIXe siècles. Jusqu'à ce qu'en 1871, quelques jours après la proclamation de la Commune de Paris, le gouvernement décrète une remise générale des loyers - et une suspension des expulsions - pour une période de neuf mois. Première intervention des pouvoirs publics en matière d'impayés de loyer, ce moratoire constitue l'acte de naissance d'une nouvelle catégorie juridico-administrative : celle du locataire endetté. Entre 1914 et 1945, guerres et crise obligent, l'Etat se penche à nouveau sur la situation des locataires impécunieux ou, plus précisément, de certains d'entre eux - locataires mobilisés, attributaires de secours, chômeurs... - à qui est accordé le bénéfice d'exonérations ou de réductions des loyers. Puis, avec la création des allocations logement, qui incarnent une vision préventive du problème des impayés de loyer, la question des locataires endettés quitte le terrain de l'actualité. Elle ne reviendra en force sur la scène politique qu'à la fin des années 80. Depuis, elle ne l'a plus guère quittée.

Le locataire endetté. La construction d'une catégorie sociale - Nathalie Guimard - Ed. L'Harmattan - 16,50 € .

À LIRE AUSSI

Handicap et périnatalité

Que se passe-t-il autour du berceau d'un enfant déclaré porteur d'un handicap ? Des réactions émotionnelles intenses chez les parents à qui est faite cette annonce, mais aussi du côté des professionnels chargés de l'effectuer. De fait, il n'y a « pas d'annonce heureuse », résume Patrick Ben Soussan, pédopsychiatre, l'un des contributeurs de cet ouvrage. Cependant, on peut tendre à ce que les paroles alors prononcées « laissent de la place à d'autres, pour que l'enfant handicapé ne soit pas qu'un handicap », souligne le clinicien.

Handicap et périnatalité. Etat des lieux - Sous la direction de Pierre Delion, Sylvain Missonnier et Nathalie Presme - Ed. érès - 10 € .

Immigration : fantasmes et réalités

« Il faut en finir avec la fermeture des frontières », s'accordent à penser les chercheurs qui sont ici réunis. Pour l'heure, eux s'emploient à en finir avec un certain nombre d'idées reçues sur l'immigration, qui ont accédé au rang d'évidences à force de répétitition. C'est simple, clair et d'une lecture très roborative.

Immigration : fantasmes et réalités. Pour une alternative à la fermeture des frontières - Sous la direction de Claire Rodier et Emmanuel Terray - Ed. La Découverte - 10 € .

- ACTES DE COLLOQUES -

Pauvreté, droits sociaux et libertés publiques : promesses et impasses de la dignité de la personne comme catégorie juridique

Ce document réunit les actes de deux conférences-débat organisées en octobre par la direction de la prévention de l'action sociale du conseil général de Seine-Saint-Denis. L'une intitulée « Les droits sociaux : des droits à part entière ? », l'autre « La dignité de la personne humaine : droit ou devoir ? ». Dans la première, Diane Roman, professeur de droit public, étudie la question de l'effectivité des droits sociaux à travers des exemples d'actualité comme le droit au logement. Dans la seconde, Stéphanie Hennette-Vauchez, professeur de droit public, souligne notamment la différence de perception du principe de dignité entre les juristes et les acteurs sociaux.

Disponible gratuitement auprès de bpellegrini@cg93.fr

Analyse de la pratique : le sujet est (toujours) là !

A la veille de l'application de la réforme de la protection juridique des majeurs (janvier 2009), l'Association nationale des délégués et personnels des services de tutelle (ANDAP) s'est penchée sur les changements qu'implique la nouvelle législation dans les services, lors de sa journée annuelle d'études et de rencontres du 25 janvier 2008. Les échanges ont porté sur l'analyse de la pratique, qui, abordée sous l'angle de la psychanalyse, n'évalue pas mais donne du sens. La pratique a aussi été envisagée au regard de la posture éthique du délégué à la tutelle, sa place et son rôle d'agent du travail social.

La place des AMP dans les institutions accueillant des personnes dépendantes

Interface entre l'équipe pluridisciplinaire et la personne en situation de dépendance, l'aide médico-psychologique (AMP) tient une place à part et complexe, dans la relation d'aide. Les journées d'études des 9 et 10 novembre 2006 organisées par CESAP Formation ont mis en évidence les différentes formes que prend ce métier auprès des publics handicapés. En débat aussi : les risques professionnels et la prévention des dérapages ou « ce que bien traiter veut dire ».

CESAP Formation Documentation Ressources : 5, rue Blanche - 75009 Paris - 22 € .

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