« Les décisions de placement d'un détenu à l'isolement, qu'il s'agisse d'isolement préventif, d'isolement en urgence ou d'isolement provisoire peuvent être contestées devant le juge administratif », a indiqué le Conseil d'Etat dans un communiqué du 17 décembre. « En outre, ces décisions ne peuvent intervenir que lorsqu'aucune autre solution ne permet d'assurer la sécurité de l'établissement pénitentiaire ou des personnes. » C'est en effet ce qu'il a jugé dans une décision rendue le même jour.
Dans cette affaire, la section française de l'Observatoire international des prisons (OIP) a présenté devant le Conseil d'Etat une demande d'annulation pour excès de pouvoir du décret du 21 mars 2006 relatif aux décisions prises par l'administration pénitentiaire (1). L'organisme attaquait plus précisément l'article 3 du décret ayant institué l'article R. 57-8-1 du code de procédure pénale. Aux termes de cet article, le chef de l'établissement pénitentiaire est compétent pour prendre la décision de placement à l'isolement d'un détenu. Il peut déléguer sa signature à un agent d'encadrement placé sous son autorité. Selon la section française de l'OIP, cette délégation est trop générale et prévue au profit d'agents ne disposant pas d'un niveau d'encadrement et de compétences suffisant. Un argument rejeté par le Conseil d'Etat au motif que cette délégation de signature « vise exclusivement les agents d'encadrement placés directement sous l'autorité du chef d'établissement, indépendamment de leur appellation, différente selon la catégorie d'établissement ».
La section française de l'OIP contestait en outre l'article R. 57-9-10 du code de procédure pénale, également introduit par l'article 3 du décret, qui détermine les situations dans lesquelles peuvent être prises les mesures d'isolement d'urgence, provisoire et préventif. Selon elle, cette disposition ne respecte pas le principe de proportionnalité des peines. Le Conseil d'Etat rejette aussi cette requête. En effet, explique-t-il, « les décisions de placer un détenu à l'isolement, soit en urgence et de manière provisoire, soit à titre préventif, prévues par ces dispositions, ne constituent pas des peines mais des mesures de sûreté ». Le principe de proportionnalité des peines ne peut donc être invoqué dans cette affaire.
Enfin, selon la section française de l'OIP, l'article 3 du décret « ne pouvait légalement prévoir que les fautes de plus faible gravité, dites du troisième degré, pourraient donner lieu à un placement préventif en quartier disciplinaire ». Une fois encore, les magistrats écartent l'argument. En effet, énoncent-ils, « selon les dispositions de cet article, une telle mesure, à l'instar de la mesure de placement provisoire, ne peut intervenir, sous le contrôle du juge de l'excès de pouvoir, que dans l'hypothèse où elle est strictement nécessaire afin d'assurer la sécurité de l'établissement pénitentiaire ou des personnes ».