La loi du 5 mars 2007 instituant le droit au logement opposable - dite loi « DALO » - a consacré le droit pour les personnes mal logées ainsi que pour celles dont la demande d'hébergement n'a reçu aucune réponse adaptée de pouvoir se tourner vers l'Etat pour obtenir un logement ou un hébergement (1). Un dispositif rythmé par trois échéances principales.
La première était l'obligation de créer avant le 1er janvier 2008, dans chaque département, une commission de médiation, instance du recours dit « amiable » chargée d'examiner les demandes de logement ou d'hébergement non satisfaites. Sur ce point - le comité de suivi de la mise en oeuvre du DALO l'a souligné dans son deuxième rapport annuel (2)-, le calendrier a bien été respecté. Ainsi, au 31 août, ces commissions avaient reçu 40 000 demandes et en avaient traité la moitié. Plus récemment, la ministre du Logement indiquait, lors d'une réunion publique consacrée au DALO, que plus de 50 000 dossiers avaient été déposés au 31 octobre, mais aussi qu'environ 58 % des dossiers avaient été examinés et qu'un peu plus de 13 200 - soit 50 % - avaient reçu un avis favorable, les autres ayant été rejetés ou étant devenus sans objet. En outre, parmi les personnes dont la demande a reçu un avis favorable, 27 % ont obtenu un relogement, ce qui est « un très bon résultat en un temps aussi court » selon Christine Boutin.
Seconde échéance fixée par la loi : l'ouverture, à compter du 1er décembre 2008, d'un recours contentieux devant le tribunal administratif pour certaines catégories de demandeurs considérés comme prioritaires par une commission de médiation parce qu'ils se trouvent dans une situation critique et auxquels aucune solution n'a été proposée à l'issue de la médiation. La juridiction peut, à cet égard, ordonner à l'Etat, sous astreinte, de loger ou d'héberger le demandeur.
Enfin, la dernière échéance sera l'ouverture, à compter du 1er janvier 2012, du recours juridictionnel aux demandeurs « classiques », c'est-à-dire ceux qui ont été reconnus comme prioritaires par une commission de médiation parce qu'ils n'ont reçu aucune offre après un délai « anormalement long ».
Notons que, selon le rapport du comité de suivi, dans certains départements, « l'offre aujourd'hui mobilisable par les préfets est insuffisante pour faire face aux besoins des ménages les plus en difficulté et elle ne permettrait de tenir l'échéance du 1er janvier 2012 qu'en fixant le délai anormalement long à un niveau le privant de sa signification, qui est de faire du droit au logement opposable un droit pour tous ». Le comité de suivi estime ainsi que la situation est « critique » dans 16 départements et « tendue » dans 11 autres.
La commission de médiation peut être saisie d'un recours amiable dans deux cas distincts : par un demandeur de logement social ordinaire, d'une part, et par un demandeur d'accueil en structure d'hébergement ou d'un logement adapté, d'autre part. Dans les deux cas, pour pouvoir exercer un recours, les intéressés doivent résider régulièrement sur le territoire français (voir encadré, page ci-dessous).
Un demandeur de logement locatif social peut - à condition d'être de bonne foi et de répondre aux conditions réglementaires d'accès au logement social - saisir la commission dans deux cas de figure (code de la construction et de l'habitation [CCH], art. L. 441-2-3) :
s'il n'a reçu aucune proposition adaptée dans un délai fixé par arrêté du préfet au regard des circonstances locales, délai dit « anormalement long » ;
sans condition de délai, s'il est dans une situation critique.
Sur ce dernier point, il s'agit plus précisément des personnes :
dépourvues de logement ;
menacées d'expulsion sans relogement ;
hébergées ou logées temporairement dans un établissement ou un logement de transition ;
logées dans des locaux impropres à l'habitation ou présentant un caractère insalubre ou dangereux ;
logées dans des locaux manifestement suroccupés ou ne présentant pas le caractère d'un logement décent, si elles ont au moins un enfant mineur, sont handicapées ou ont à leur charge au moins une personne en situation de handicap.
A noter : les personnes logées dans des locaux impropres à l'habitation, insalubres ou menaçant ruine ayant fait l'objet d'un arrêté, assorti d'une interdiction définitive d'habiter, ne sont pas visées par la loi DALO. En effet, dans ces cas, elles bénéficient d'un droit au relogement opposable à leur propriétaire et, en cas de défaillance de celui-ci, opposable à la commune ou à l'Etat (CCH, art. L. 521-1 et suivants).
Toute personne qui, sollicitant l'accueil dans une structure d'hébergement, un établissement ou un logement de transition, un logement-foyer ou une résidence hôtelière à vocation sociale, n'a reçu aucune proposition adaptée en réponse à sa demande, peut également saisir, sans condition de délai, la commission de médiation (CCH, art. L. 441-2-3).
Chaque commission de médiation est composée de 13 membres, tous nommés par le préfet pour une durée de 3 ans - renouvelable une fois - mais pas tous désignés par la même autorité.
Sont ainsi désignés par le préfet (CCH, art. R. 441-13) :
3 représentants de l'Etat ;
un représentant des organismes d'habitations à loyer modéré ou des sociétés d'économie mixte de construction et de gestion de logements sociaux, et un représentant des autres propriétaires bailleurs ;
un représentant des organismes chargés de la gestion d'une structure d'hébergement, d'un établissement ou d'un logement de transition, d'un logement-foyer ou d'une résidence hôtelière à vocation sociale ;
un représentant d'une association de locataires affiliée à une organisation siégeant à la commission nationale de concertation ;
2 représentants des associations agréées dans le département dont l'un des objets est l'insertion ou le logement des personnes défavorisées ;
une personnalité qualifiée qui assure la présidence et qui dispose d'une voix prépondérante en cas de partage égal des voix.
Au-delà, chaque commission de médiation comprend également un représentant du département, désigné par le conseil général, un représentant des établissements publics de coopération intercommunale (EPCI) qui ont conclu un accord collectif intercommunal, désigné sur proposition conjointe des présidents des EPCI concernés, ainsi qu'un représentant des communes désigné par l'association des maires du département. Lorsqu'il n'existe aucun accord collectif intercommunal dans le département, la commission comprend alors 2 représentants des communes.
A propos des associations agréées dont l'un des objets est l'insertion ou le logement des personnes défavorisées, le décret du 28 novembre 2007 précise qu'il s'agit de celles qui « mènent de façon significative » dans le département des actions d'insertion ou en faveur du logement des personnes défavorisées. L'agrément est accordé par le préfet pour une durée de 3 ans renouvelable et peut être retiré à tout moment si l'organisme ne satisfait plus aux conditions de l'agrément ou en cas de manquements graves ou répétés à ses obligations. La décision de retrait ne peut toutefois intervenir qu'après que l'association en cause a été mise à même de présenter ses observations (CCH, art. R. 441-13).
La commission siège valablement à première convocation si la moitié au moins des membres sont présents et, à seconde convocation, si un tiers des membres sont présents. Elle délibère à la majorité simple. En cas de partage des voix, celle du président est prépondérante (CCH, art. R. 441-13).
Le secrétariat de la commission est assuré par un service de l'Etat désigné par le préfet.
Le requérant saisit la commission au moyen d'un formulaire, signé par lui et précisant l'objet et le motif du recours (CCH, art. R. 441-14). Deux modèles de formulaire existent (arrêté du 19 décembre 2007) :
le premier formulaire concerne le demandeur de logement ;
le second concerne le demandeur d'accueil en structure d'hébergement, établissement ou logement de transition, logement-foyer ou résidence hôtelière à vocation sociale.
Divers renseignements sur le requérant et sa situation y sont demandés, certains devant être fournis obligatoirement pour rendre le recours recevable par l'instance (identité, nationalité et adresse du demandeur, nombre de personnes composant le ménage et montant annuel des ressources de celui-ci, conditions actuelles de logement ou d'hébergement justifiant le recours, etc.). Sans ces informations, le secrétariat de la commission peut retourner le formulaire au requérant. Et il ne peut, en tout état de cause, délivrer à ce dernier un accusé de réception que lorsque chacun de ces renseignements a été apporté, précise une note d'information jointe au formulaire. Certaines « rubriques » du formulaire sont en revanche facultatives (numéro d'enregistrement délivré en cas de dépôt d'une ou de plusieurs demandes de logement locatif social, coordonnées du travailleur social avec lequel le demandeur est éventuellement en contact, etc.). Toutefois, précise la note, « il est dans l'intérêt [du demandeur] d'apporter à la commission de médiation toutes informations et preuves lui permettant d'apprécier sa situation ». Il est recommandé à cet égard de déposer, en même temps, le formulaire et l'ensemble des pièces justificatives pouvant être utiles en tant que moyens de preuve (copies de documents officiels, courriers antérieurs, attestations émanant de tiers, etc.). Le demandeur doit mentionner en particulier les demandes de logement ou d'hébergement effectuées antérieurement ainsi que, le cas échéant, l'existence d'un arrêté d'insalubrité, de péril ou de fermeture administrative affectant son logement ou encore d'une procédure engagée à cet effet (CCH, art. R. 441-14).
L'accusé de réception délivré au requérant par le secrétariat de la commission à la réception de son dossier (3) comporte un numéro d'enregistrement identifiant chaque requête (arrêté du 19 décembre 2007).
Ce numéro comporte lui-même trois caractères désignant le département du siège de la commission de médiation, quatre caractères identifiant l'année de l'accusé de réception et six caractères correspondant à l'ordre d'enregistrement des demandes. Il est complété, le cas échéant, par un caractère indiquant l'ordre d'arrivée des pièces complémentaires que le requérant a pris l'initiative d'adresser à la commission postérieurement au dépôt de son recours (arrêté du 19 décembre 2007).
A noter : à la différence du formulaire « logement », le formulaire « hébergement » ne comporte pas de question relative à la détention d'un titre de séjour.
Pour instruire le dossier, la commission peut entendre toute personne dont elle juge l'audition utile (CCH, art. R. 441-14).
Par ailleurs, dans le cas d'une demande de logement ordinaire, elle reçoit notamment du ou des bailleurs chargés de la requête tous les éléments d'information sur la qualité du demandeur et les motifs invoqués pour expliquer l'absence de proposition (CCH, art. L. 441-2-3).
Toujours pour l'instruction des demandes dont elle est saisie, la commission peut demander au préfet de faire appel aux services compétents de l'Etat ou des collectivités territoriales ou à toute personne ou organisme compétent pour faire les constatations sur place ou l'analyse de la situation sociale du demandeur qui seraient nécessaires à l'instruction (CCH, art. R. 441-14-1).
A noter : le demandeur peut être assisté par une association dont l'un des objets est l'insertion ou le logement des personnes défavorisées ou une association de défense des personnes en situation d'exclusion et agréée par le préfet (CCH, art. L. 441-2-3). A cet égard, il appartient aux préfets de recenser ce type d'organismes et de tenir à la disposition des requérants qui en font la demande la liste des associations pouvant les assister (circulaire du 4 mai 2007).
La commission doit uniquement se prononcer sur le caractère prioritaire de la demande et sur l'urgence qu'il y a à attribuer au demandeur un logement ou à l'accueillir dans une structure d'hébergement, en tenant compte notamment des démarches précédemment effectuées ainsi que, s'agissant d'une demande de logement ordinaire, au regard de critères d'appréciation définis par le décret du 28 novembre 2007 (CCH, art. R. 441-14-1). Elle n'a pas à prendre en considération une éventuelle situation de pénurie de logements ou de places d'hébergement. Et n'a donc pas à rejeter une demande au motif d'un manque de logements ou de places, pas plus qu'il ne lui appartient d'établir une hiérarchie entre les demandeurs qu'elle désigne.
Lorsqu'elle est saisie d'une demande de logement ordinaire, la commission de médiation rend sa décision dans un délai de 3 mois à compter de la réception de la requête. Toutefois, dans les départements d'outre-mer (DOM) et, jusqu'au 1er janvier 2011, dans les départements comportant au moins une agglomération, ou une partie d'une agglomération de plus de 300 000 habitants, ce délai est de 6 mois (CCH, art. R. 441-15).
Pour l'appréciation du caractère prioritaire et urgent d'une demande, le décret du 28 novembre 2007 reprend quelques-unes des catégories de personnes pouvant exercer un recours amiable définies par la loi, en apportant des précisions.
Ainsi, pour les personnes dépourvues de logement, le cas échéant, la commission apprécie leur situation au regard de l'obligation alimentaire dont elles peuvent bénéficier (CCH, art. R. 441-14-1). Rappelons que l'obligation d'aliments englobe non seulement la nourriture mais aussi, entre autres, le logement. Y sont tenus les enfants vis-à-vis de leurs parents et de leurs ascendants, ainsi que les gendres et les belles-filles vis-à-vis de leurs beaux-parents durant le mariage et réciproquement.
Pour les personnes logées dans des locaux impropres à l'habitation, insalubres ou dangereux, la commission tient compte des dispositions législatives qui mettent le relogement à la charge du propriétaire ou d'une collectivité (CCH, art. R. 441-14-1).
Pour les personnes menacées d'expulsion sans relogement, elles doivent nécessairement avoir fait l'objet d'une décision de justice prononçant l'expulsion (CCH, art. R. 441-14-1).
Quant aux personnes hébergées ou logées temporairement dans un établissement, elles doivent l'être de façon continue depuis plus de 6 mois (18 mois si elles sont logées dans un logement de transition) (CCH, art. R. 441-14-1).
Autre catégorie visée par la loi : la personne logée dans des locaux manifestement suroccupés ou ne présentant pas le caractère d'un logement décent, si elle a au moins un enfant mineur, est handicapée ou a à sa charge au moins une personne en situation de handicap (CCH, art. R. 441-14-1).
Qu'est-ce qu'un logement manifestement sur-occupé ? Est considéré comme tel le logement qui ne dispose pas de la surface suivante (CCH, art. R. 441-14-1 et code de la sécurité sociale, art. D. 542-14-2°) :
9 m2 pour une personne seule ;
16 m2 pour 2 personnes ;
16 m2 + 9 m2 pour chaque personne à partir de la troisième dans la limite de 70 m2 (ce qui signifie qu'un logement de 70 m2 ou plus ne peut être considéré comme suroccupé).
Autre précision, s'agissant de l'appréciation de l'indécence d'un logement : le logement du demandeur qui invoque ce motif doit manquer d'au moins 2 des éléments d'équipement et de confort mentionnés à l'article 3 du décret n° 2002-120 du 30 janvier 2002 (CCH, art. R. 441-14-1), à savoir :
une installation « permettant un chauffage normal » ;
une installation d'alimentation en eau potable ;
des installations d'évacuation des eaux ménagères et eaux-vannes ;
une cuisine ou un coin cuisine avec un évier raccordé à une installation d'alimentation en eau chaude et froide ;
une installation sanitaire comprenant W.-C. et baignoire ou douche, avec eau froide et chaude (le W.-C. extérieur mais dans le bâtiment étant accepté si le logement ne comporte qu'une pièce) ;
un réseau électrique permettant l'éclairage et le fonctionnement des appareils ménagers courants.
L'indécence d'un logement peut aussi consister dans le fait qu'il présente au moins un des risques pour la sécurité ou la santé énumérés à l'article 2 du décret n° 2002-120 du 30 janvier 2002 (CCH, art. R. 441-14-1). Selon cette disposition :
le logement doit assurer le clos et le couvert. Le gros oeuvre du logement et de ses accès doit être en bon état d'entretien et de solidité et protéger les locaux contre les eaux de ruissellement et les remontées d'eau. Les menuiseries extérieures et la couverture avec ses raccords et accessoires doivent assurer la protection contre les infiltrations d'eau dans l'habitation. Pour les logements situés dans les départements d'outre-mer, il peut être tenu compte, pour l'appréciation des conditions relatives à la protection contre les infiltrations d'eau, des conditions climatiques spécifiques à ces départements ;
les dispositifs de retenue des personnes, dans le logement et ses accès, tels que garde-corps des fenêtres, escaliers, loggias et balcons, doivent être dans un état conforme à leur usage ;
la nature et l'état de conservation et d'entretien des matériaux de construction, des canalisations et des revêtements du logement ne doivent pas présenter de risques manifestes pour la santé et la sécurité physique des locataires ;
les réseaux et branchements d'électricité et de gaz et les équipements de chauffage et de production d'eau chaude doivent être conformes aux normes de sécurité définies par les lois et règlements et être en bon état d'usage et de fonctionnement ;
les dispositifs d'ouverture et de ventilation des logements doivent permettre un renouvellement de l'air adapté aux besoins d'une occupation normale du logement et au fonctionnement des équipements ;
les pièces principales (destinées au séjour et au sommeil) doivent bénéficier d'un éclairement naturel suffisant et d'un ouvrant donnant à l'air libre ou sur un volume vitré donnant à l'air libre.
A noter : « si la situation particulière du demandeur le justifie », la commission peut, par une décision spécialement motivée, désigner comme prioritaire une personne ne répondant qu'incomplètement aux caractéristiques définies ci-dessus (CCH, art. R. 441-14-1).
Si la commission reconnaît le demandeur de logement comme prioritaire et devant se voir attribuer un logement en urgence, elle détermine, en tenant compte de ses besoins et de ses capacités, les caractéristiques de ce logement et transmet sa décision au préfet.
Si elle estime que le demandeur de logement est prioritaire mais qu'une offre de logement n'est pas adaptée, elle transmet au préfet cette demande pour que soit proposé un accueil dans une structure d'hébergement, un établissement ou un logement de transition, un logement-foyer ou une résidence hôtelière à vocation sociale.
Si la commission ne reconnaît pas le demandeur de logement comme prioritaire et devant se voir attribuer un logement en urgence, elle peut faire une proposition d'orientation de sa demande (CCH, art. L. 441-2-3).
A noter : face à des ménages bénéficiant d'un hébergement social et demandeurs d'un logement, la commission peut aussi estimer qu'une prolongation de cet accueil est préférable. Mais elle ne peut le faire qu'en raison des caractéristiques du demandeur et non pour un manque de logements.
En tout état de cause, la commission notifie par écrit sa décision motivée au demandeur (CCH, art. L. 441-2-3).
Si le demandeur sollicite l'accueil dans une structure d'hébergement ou un logement adapté, la commission peut demander au préfet de prévoir un tel accueil. Elle rend sa décision dans un délai qui ne peut dépasser 6 semaines.
La loi ne prévoit pas de modalités particulières de recours contre les décisions de la commission de médiation. Toutefois, il s'agit d'une décision administrative, susceptible donc, en tant que telle, d'un recours devant le juge administratif dans les conditions de droit commun. Cette possibilité est du reste clairement signifiée au requérant dans le texte de l'accusé de réception de son recours amiable. Il lui est indiqué, en effet, qu'en cas de rejet explicite ou implicite - l'absence de réponse dans le délai réglementaire étant considérée comme un rejet implicite -, il peut soit formuler un nouveau recours, soit se pourvoir devant le tribunal administratif dans un délai de 2 mois.
« Un soin particulier [doit] donc être apporté à la motivation des décisions, et au respect des formes et procédures », indique la circulaire du 4 mai 2007.
Avant de désigner chaque demandeur reconnu prioritaire par la commission à un organisme bailleur disposant de logements correspondant à la demande, le préfet recueille l'avis des maires des communes concernées par le relogement des intéressés. Les édiles disposent, pour ce faire, de 15 jours. A l'expiration de ce délai, leur avis est réputé avoir été émis (CCH, art. R. 441-16).
Par la suite, le préfet se tourne donc vers un organisme bailleur de logements sociaux. Il lui indique un périmètre au sein duquel le logement proposé devra être situé et lui fixe un délai maximum pour l'attribution d'un logement. L'attribution s'impute sur les droits de réservation du préfet. En cas de refus de l'organisme, le préfet peut prononcer directement l'attribution du logement (CCH, art. L. 441-2-3).
Lorsque les droits de réservation du préfet ont été délégués, il demande au délégataire de procéder à la désignation et, le cas échéant, à l'attribution du logement dans un délai qu'il détermine. En cas de refus du délégataire, le préfet se substitue à lui (CCH, art. L. 441-2-3).
Le préfet peut également proposer au demandeur reconnu prioritaire un logement privé faisant l'objet d'une convention avec l'Agence nationale de l'habitat ouvrant droit à l'aide personnalisée au logement, dès lors que des conditions spécifiques d'attribution ont été déterminées ou que le logement est donné à bail à un organisme en vue de sa sous-location à un demandeur prioritaire (CCH, art. L. 441-2-3).
Le préfet vers qui la commission de médiation s'est tournée pour satisfaire une demande d'accueil dans une structure d'hébergement ou de logement adapté dispose au plus de 6 semaines pour proposer à l'intéressé une place dans une structure d'hébergement, un établissement ou un logement de transition, un logement-foyer ou une résidence hôtelière à vocation sociale aux personnes désignées par la commission (CCH, art.R. 441-18).
Passé ce délai, s'il n'est pas accueilli dans l'une de ces structures, le demandeur peut exercer le recours contentieux prévu par l'article L. 441-2-3-1 du code de la construction et de l'habitation (voir page ci-dessous) (CCH, art. R. 441-18).
A noter : les demandeurs recevant une offre de logement ou d'hébergement sont informés par le préfet des dispositifs et structures d'accompagnement social présents dans le département.
La loi du 5 mars 2007 offre à plusieurs catégories de personnes la possibilité de saisir le tribunal administratif pour réclamer un logement - ordinaire ou adapté - ou un accueil dans une structure d'hébergement. Un « recours contentieux » que chacune de ces catégories de demandeur pourra exercer à des dates différentes.
Première catégorie de demandeurs concernés :
les demandeurs qui ont été reconnus par la commission de médiation comme prioritaires et devant être logés d'urgence et qui n'ont pas reçu, passé un délai de 3 mois après notification de la décision de la commission, une offre de logement tenant compte de leurs besoins et de leurs capacités. Dans les DOM et, jusqu'au 1er janvier 2011, dans les départements comportant au moins une agglomération (ou une partie d'une agglomération) de plus de 300 000 habitants, ce délai est de 6 mois (CCH, art. L. 441-2-3-1 et R. 441-16-1) ;
les demandeurs qui, en l'absence de commission de médiation, se sont tournés vers le préfet pour réclamer un logement et n'ont pas reçu dans les 3 mois une offre tenant compte de leurs besoins et de leurs capacités (CCH, art. L. 441-2-3-1 et R. 441-17) (4).
Dans le détail, le recours contentieux est ouvert depuis le 1er décembre 2008 à ceux qui, parmi tous ces demandeurs, sont dans une situation critique. C'est-à-dire ceux qui ont pu saisir la commission de médiation - ou le préfet - sans condition de délai, comme les personnes dépourvues de logement ou celles menacées d'expulsion sans relogement (voir page 24). Pour les autres, c'est-à-dire ceux qui ont pu saisir la commission de médiation - ou le préfet - après dépassement d'un délai « anormalement long », il ne sera ouvert qu'à compter du 1er janvier 2012 (CCH, art. L. 441-2-3-1).
La seconde catégorie de personnes pouvant bénéficier du recours contentieux sont les demandeurs reconnus par la commission de médiation comme prioritaires et comme devant être accueillis dans une structure d'hébergement, un établissement ou logement de transition, un logement-foyer ou une résidence hôtelière à vocation sociale, et qui n'ont pas été accueillis dans l'une de ces structures dans le délai de 6 semaines imposé au préfet (voir page 28). Pour eux, le recours contentieux est ouvert depuis le 1er décembre 2008 (CCH, art. L. 441-2-3-1 et R. 441-18).
Le recours contentieux s'exerce auprès du tribunal administratif qui statue en dernier ressort (code de justice administrative [CJA], art. 811-1). Il n'est donc pas prévu d'appel devant une cour administrative d'appel ou le Conseil d'Etat. Seule une cassation en Conseil d'Etat est donc possible.
A noter : le demandeur peut se faire assister par une association dont l'un des objets est l'insertion ou le logement des personnes défavorisées ou une association de défense des personnes en situation d'exclusion agréée par le préfet du département (CCH, art. L. 441-2-3-1 I). Cette association peut être entendue lors de l'audience (CJA, art. R. 778-7).
Les requêtes doivent être présentées par le demandeur dans un délai de 4 mois à compter de l'expiration du délai fixé par la réglementation pour qu'une offre de logement tenant compte de ses besoins et capacités lui soit présentée, c'est-à-dire, selon les cas, 3 mois, 6 mois ou 6 semaines (voir ci-dessus) (CJA, art. R. 778-2).
Ce délai n'est toutefois opposable à l'intéressé que s'il a été informé, dans la notification de la décision de la commission de médiation ou dans l'accusé de réception de la demande adressée au préfet, d'une part, de celui des délais applicable à sa demande (3 mois, 6 mois ou 6 semaines) et, d'autre part, du délai de 4 mois dont il dispose pour saisir le tribunal administratif (CJA, art. R. 778-2).
Sous peine d'irrecevabilité, les requêtes doivent être accompagnées, sauf impossibilité justifiée, soit de la décision de la commission de médiation dont se prévaut le requérant, soit, en l'absence de commission, de la demande adressée par le requérant au préfet (CJA, art. R. 778-2).
A noter : lorsque le requérant se prévaut d'une décision de la commission de médiation rendue avant le 1er janvier 2009 - ou, en l'absence de commission, a saisi le préfet d'une demande de logement avant cette date - et qu'il n'a été informé ni des délais qui lui étaient opposables, ni du tribunal administratif compétent, sa requête doit être présentée au tribunal administratif au plus tard le 30 avril 2009 (décret du 27 novembre 2008, art. 3).
Les jugements sont rendus par le président du tribunal administratif ou le magistrat qu'il désigne à cet effet, qui doit avoir atteint au moins le grade de premier conseiller ou une ancienneté de 2 ans (CJA, art. R. 778-3).
Il statue en urgence, dans un délai de 2 mois à compter de sa saisine. Sauf renvoi à une formation collégiale, l'audience se déroule sans conclusions du commissaire du gouvernement (CCH, art. L. 441-2-3-1).
Les décisions prises pour l'instruction des affaires sont notifiées aux parties par tous moyens (CJA, art. R. 778-4).
Le président du tribunal administratif ou le magistrat désigné peut, dès l'enregistrement de la requête, par une décision qui tient lieu d'avis d'audience, fixer la date à laquelle l'affaire sera appelée à l'audience (CJA, art. R. 778-4).
Le juge statue au terme d'une procédure contradictoire écrite ou orale. Dès qu'il reçoit notification de la requête, le préfet communique au tribunal administratif l'ensemble du dossier constitué pour l'instruction de la demande devant la commission départementale de médiation et pour donner suite à la décision de celle-ci. L'instruction est close soit après que les parties ou les mandataires ont formulé leurs observations orales, soit, si ces parties sont absentes ou ne sont pas représentées, après appel de leur affaire à l'audience. Elle est rouverte en cas de renvoi à une autre audience (CJA, art. R. 778-5).
S'il a été saisi par le demandeur d'un logement ordinaire, le juge administratif ordonne le logement ou le relogement de l'intéressé par l'Etat s'il constate que (CCH, art. L. 441-2-3-1 I) :
la demande de logement a été reconnue par la commission de médiation comme prioritaire et devant être satisfaite d'urgence ;
et qu'il n'a pas été offert au demandeur un logement tenant compte de ses besoins et de ses capacités.
La juridiction administrative peut aussi ordonner l'accueil de l'intéressé dans une structure d'hébergement, un établissement ou logement de transition, un logement-foyer ou une résidence hôtelière à vocation sociale (CCH, art. L. 441-2-3-1 III).
S'il a été saisi par le demandeur d'un logement adapté ou d'un accueil en structure d'hébergement, il ordonne cet accueil s'il constate que (CCH, art. L. 441-2-3-1 II) :
l'intéressé a été reconnu par la commission de médiation comme prioritaire et devant être accueilli dans une structure d'hébergement, un établissement ou logement de transition, un logement-foyer ou une résidence hôtelière à vocation sociale ;
et que ce dernier n'a pas obtenu de proposition.
Dans les deux cas, l'injonction faite par le juge au préfet peut être assortie du versement d'une astreinte. Celle-ci est versée au fonds d'aménagement urbain - prévu à l'article L. 302-7 du code de la construction et de l'habitation (5)- institué dans la région de la commission de médiation saisie par le demandeur (CCH, art. L. 441-2-3-1).
En quoi le fait que l'Etat puisse être condamné va-t-il améliorer le sort des personnes mal-logées ? Pour le Haut Comité pour le logement des personnes défavorisées (HCLPD), le poids de la condamnation de l'Etat à verser une astreinte « devrait produire des effets vertueux car il sera préférable pour [ce dernier] d'affecter en amont les moyens nécessaires plutôt que de le faire après condamnation ». En outre, « au-delà de cet aspect pécuniaire, la condamnation de l'Etat doit également avoir un impact politique », explique le HCLPD sur son site (6). « Elle porte mise en cause du préfet et de l'action gouvernementale. »
Loi n° 2007-290 du 5 mars 2007, art. 1, 7 et 9 J.O. du 6-03-07.
Décret n° 2007-1677 du 28 novembre 2007, J.O. du 29-11-07.
Décret n° 2008-908 du 8 septembre 2008, J.O. du 10-09-08.
Décret n° 2008-1227 du 27 novembre 2008, J.O. du 28-11-08 et décret n° 2008-1227 du 27 novembre 2008 (rectificatif), J.O. du 2-12-08.
Arrêté du 19 décembre 2007, J.O. du 8-01-08.
Circulaire UHC n° 2007-33 du 4 mai 2007, B.O. Aménagement-Transports-Equipement-Mer n° 10 du 10-06-07.
Le droit pour les personnes mal logées de pouvoir se tourner vers l'Etat pour obtenir un logement, consacré par la loi du 5 mars 2007, est conditionné au fait, d'une part, de ne pas être en mesure d'accéder par ses propres moyens à un logement décent et indépendant ou de s'y maintenir et, d'autre part, de résider sur le territoire français de façon régulière et permanente (CCH, art. L. 300-1). Le décret du 8 septembre 2008 apporte des précisions sur les conditions de permanence.
Pour satisfaire à celles-ci, les citoyens de l'Union européenne, les ressortissants d'un autre Etat partie à l'accord sur l'Espace économique européen (7) ou de la Confédération suisse doivent ainsi remplir les conditions exigées pour bénéficier d'un droit de séjour en France pour une durée supérieure à 3 mois sur le fondement de l'article L. 121-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile (Ceseda). Autrement dit, il ne peut s'agir que de ressortissants remplissant l'une des conditions suivantes : exercer une activité professionnelle en France ; disposer pour eux et les membres de leur famille de ressources suffisantes afin de ne pas devenir une charge pour le système d'assistance sociale, ainsi que d'une assurance maladie ; être inscrits dans un établissement pour y suivre à titre principal des études ou, dans ce cadre, une formation professionnelle, et garantir disposer d'une assurance maladie ainsi que de ressources suffisantes pour eux et les membres de leur famille afin de ne pas devenir une charge pour le système d'assistance sociale ; ou, enfin, être membres de la famille du bénéficiaire d'un droit au séjour.
Quant aux ressortissants de pays tiers, ils doivent pour leur part, soit être titulaires d'une carte de résident ou de tout autre titre de séjour prévu par les traités ou accords internationaux et conférant des droits équivalents à ceux de la carte de résident, soit justifier d'au moins 2 années de résidence ininterrompue en France sous couvert de l'un ou l'autre des titres de séjour suivants, renouvelé au moins 2 fois :
une carte de séjour temporaire portant la mention « scientifique » ;
une carte de séjour temporaire portant la mention « profession artistique et culturelle » ;
une carte de séjour temporaire autorisant l'exercice d'une activité professionnelle délivrée en application de l'article L. 313-10 du Ceseda, à l'exception des cartes portant les mentions « travailleur saisonnier », « travailleur temporaire » ou « salarié en mission » ;
une carte de séjour temporaire portant la mention « vie privée et familiale », à l'exception de celle délivrée à un étranger du fait que son conjoint ou l'un de ses parents est titulaire de la carte de séjour « compétences et talents » ou de la carte de séjour temporaire portant la mention « salarié en mission » ;
un titre de séjour prévu par les traités ou accords internationaux et conférant des droits équivalents à ceux des titres précités et notamment celui d'exercer de façon pérenne une activité professionnelle en France.
Quid de la situation particulière des étrangers reconnus comme réfugiés et mis en possession d'un récépissé de demande de titre de séjour valant autorisation de séjour d'une durée de validité de 3 mois, récépissé dont disposent les réfugiés dans l'attente de leur carte de résident de 10 ans ? Les titulaires de ce document remplissent-ils les conditions de permanence de la résidence sans délai de séjour préalable ? La question se pose car le décret ne prévoit pas expressément l'assimilation des titulaires de ce récépissé aux titulaires de la carte de résident délivrée au titre de réfugié. Interrogé par un député sur ce point qui inquiétait les associations, Brice Hortefeux a promis, dans une réponse ministérielle datée du 29 juillet 2008 (8), que « toutes instructions utiles seront données pour que les titulaires de ce récépissé aient accès au droit au logement opposable dans les mêmes conditions que les titulaires de la carte de résident ».
S'agissant des bénéficiaires de la protection subsidiaire et munis, à ce titre et de plein droit, de la carte de séjour temporaire « vie privée et familiale », ils bénéficient, comme les autres titulaires de ce titre de séjour et comme l'indique le décret, du droit au logement opposable sous réserve de justifier d'au moins 2 années de résidence ininterrompue en France sous couvert de la carte de séjour temporaire renouvelée au moins 2 fois.
Quand la commission de médiation reconnaît soit que le demandeur est prioritaire et doit se voir attribuer un logement en urgence, soit qu'il doit être accueilli dans une structure d'hébergement, un établissement ou logement de transition, un logement-foyer ou une résidence hôtelière à vocation sociale, elle informe l'intéressé dans la notification de sa décision du délai dans lequel une offre de logement adaptée à ses besoins et à ses capacités ou une proposition d'accueil doit lui être faite. Elle porte également à sa connaissance le délai dans lequel il pourra exercer le recours contentieux devant le tribunal administratif si aucune offre de logement ne lui est faite dans le délai prévu. La commission de médiation doit également indiquer le tribunal administratif compétent, ainsi que l'obligation de joindre à la requête devant ce dernier la décision qu'elle a rendue (CCH, art. R. 441-18-2).
(3) Rappelons que la date de délivrance de cet accusé de réception fait courir les délais qui s'imposent à l'instance pour rendre sa décision.
(4) Notons toutefois que, selon le deuxième rapport annuel du comité de suivi de la mise en oeuvre du droit au logement opposable, des commissions de médiation ont été mises en places dans tous les départements - Voir ASH n° 2578 du 24-10-08, p. 9.
(5) Un fonds destiné aux communes et aux établissements publics de coopération intercommunale de la région concernée pour des actions foncières et immobilières en faveur du logement social.
(6) Voir la présentation du droit au logement opposable faite par le Haut Comité sur
(7) Font partie de l'Espace économique européen tous les pays de l'Union européenne, plus l'Islande, le Liechtenstein et la Norvège.
(8) Rép. min. Le Bouillonnec n° 22372, J.O.A.N. (Q.) n° 31 du 29-07-08, p. 6569.