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Crise économique : les associations refusent d'être les « régulateurs » de la hausse de la pauvreté

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Après avoir alerté Martin Hirsch au début du mois, les associations du collectif Alerte ont, le 28 novembre, publiquement tiré la sonnette d'alarme : les indicateurs de la précarité, déjà dans le rouge, s'aggravent avec la crise économique. Aux pouvoirs publics, aux entreprises et aux partenaires sociaux de prendre leurs responsabilités pour protéger les plus faibles. « Il y a encore quelques mois, il ne fallait pas présenter les pauvres comme des victimes, ils étaient responsables de leur situation, disqualifiés, traités d'assistés. Aujourd'hui, les économistes sont disqualifiés, les banquiers assistés. Les associations ne veulent pas être les régulateurs de la seule croissance prévue : celle de la pauvreté », a ironisé Olivier Brès, président du collectif Alerte.

Retour en arrière

Les témoignages (1), étayés par des chiffres, prouvent en effet que les secousses de la débâcle financière malmènent les plus modestes. Médecins du monde, qui tiendra compte de cet aspect dans son observatoire de l'accès aux soins, a interrogé cinq de ses principaux centres d'accueil et de soins et d'orientation (CASO), à Strasbourg, Bordeaux, Paris, Marseille et Toulouse. Résultat : le « poste santé » est de plus en plus sacrifié dans les budgets déjà étriqués. Michel Brugière, directeur général de l'association, déplore même un retour en arrière : « On voit arriver depuis septembre une part croissante de personnes qui, depuis la création de la couverture maladie universelle [CMU] en 2000, n'avaient plus besoin de recourir à nos centres, dont le public est aujourd'hui constitué à 90 % d'étrangers en situation irrégulière. Viennent aujourd'hui des travailleurs pauvres, notamment non déclarés, dont les employeurs profitent de la situation pour diminuer les rémunérations, des bénéficiaires de l'allocation aux adultes handicapés, du minimum vieillesse, de la couverture maladie universelle sans complémentaire et, dans une moindre mesure, des assurés sociaux sans mutuelle. » Ces publics aux revenus modestes, qui ont vu leur « reste à vivre » diminuer à cause de l'augmentation du prix des loyers, de l'alimentation, de l'énergie, n'ont plus les ressources suffisantes pour payer une consultation, des frais de médecine spécialisée ou leur prescription médicale, dont le coût a de surcroît augmenté avec les franchises médicales.

Autre signal préoccupant : l'explosion du recours à l'aide alimentaire. Entre janvier et octobre 2008, les banques alimentaires ont aidé 800 000 personnes, soit 100 000 de plus que sur l'ensemble de l'année 2007, qui avait déjà enregistré un record. Alain Seugé, président de la Fédération française des banques alimentaires, partage le même constat sur l'évolution du profil des personnes aidées : « En 1984, les banques alimentaires ont été créées pour répondre aux besoins des exclus. Aujourd'hui, 15 % des personnes qui y ont recours ont un emploi (contre 9 % il y a deux ans), 14 % sont des retraités pauvres, 18 % sont des chômeurs indemnisés. Soit des personnes intégrées dans le tissu social. »

Alors que le Haut Commissaire aux solidarités actives contre la pauvreté a proposé au président de la République des mesures pour soutenir les publics les plus fragiles, les associations ont rappelé leurs priorités. Solidarités nouvelles face au chômage demande notamment que le système d'indemnisation des demandeurs d'emploi soit adapté aux risques causés par les difficultés du marché du travail et prenne mieux en compte les contrats de travail courts (2). L'association souhaite aussi que les contrats aidés soient « de qualité, d'une durée suffisante, avec une vraie formation » et que le « Pôle emploi » ait les moyens d'accompagner les futurs bénéficiaires du revenu de solidarité active. Tandis que Médecins du monde réitère son voeu de relever le plafond de la CMU (621 € pour une personne seule) au seuil de pauvreté (880 € ), le Secours catholique rappelle une autre revendication : l'indexation des minima sociaux sur le SMIC. « En 2007, le RMI représentait 44 % du SMIC et l'allocation de parent isolé 56 %, contre respectivement 49 % et 65 % en 1990 », argumente Pierre Levené, secrétaire général de l'association. Craignant la multiplication des situations de surendettement, le Secours catholique plaide en faveur du renforcement des compétences des commissions de surendettement, d'un meilleur encadrement du crédit à la consommation, mais aussi de l'accès des plus pauvres aux services bancaires et du développement du microcrédit.

Les solidarités familiales à l'épreuve

Sur le front du logement, la FNARS (Fédération nationale des associations d'accueil et de réinsertion sociale) demande, au moment de l'entrée du DALO (droit au logement opposable) dans sa phase judiciaire le 1er décembre, davantage de logements sociaux, des moyens supplémentaires pour les commissions de médiation, un meilleur fonctionnement des commissions de prévention des expulsions et une garantie des risques locatifs « universelle ». « Pendant 20 ans, les centres d'hébergement et de réinsertion sociale (CHRS) ont joué le rôle d'amortisseur à la crise du logement. Le pourront-ils encore dans le contexte actuel ? », s'inquiète Eric Pliez, président de la FNARS Ile-de-France. « Si les plus marginalisés ne seront pas directement touchés, les solidarités familiales vont trouver leurs limites et on va retrouver dans les CHRS davantage de personnes qui ont des ressources sans pouvoir payer un loyer », prévient-il, rappelant que 30 % des résidents dans ces structures ont un emploi.

Notes

(1) Voir l'analyse d' ASH Magazine n° 30, p. 11.

(2) Voir ASH n° 2581 du 14-11-08, p. 32.

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