Soucieux d'articuler l'économique et le social en mobilisant l'identité culturelle, des leaders du monde paysan pro-meuvent, à partir des années 60, le développement « local ». Vingt ans plus tard dans les villes, le développement « social » des quartiers et le développement « social » urbain, destinés à lutter contre l'exclusion, participent du même mouvement de remise en cause du modèle de développement dominant. Depuis les années 90, c'est le développement « social local » (DSL) qui a le vent en poupe. Laissant entendre « que l'on peut traiter, dans le même temps, et la question du développement, et la question des politiques sociales, et la question territoriale », l'expression DSL est d'une simplicité aussi séduisante qu'apparente, souligne Geneviève Besson.
Docteure en sociologie et directrice de la lutte contre les exclusions au conseil général de l'Eure, l'auteure s'attache à présenter les multiples significations, les contradictions et les ambiguïtés latentes d'une démarche « encore assez incantatoire » - comme l'est aussi la participation des habitants/ usagers qui en constitue une préoccupation centrale. « Tentative des différents acteurs des politiques sociales de redonner du sens à leurs actes et des perspectives au «Vivre ensemble» [...], en situant au coeur des processus et en tant qu'acteurs les bénéficiaires de ces politiques sociales », l'idée de DSL suscite une « ferveur quasi religieuse ».
De fait, chacun peut y trouver un intérêt immédiat, explique Geneviève Besson. A commencer par les travailleurs sociaux qui entrevoient dans le DSL « la possibilité d'influer enfin sur la définition des politiques sociales en participant localement et avec les publics concernés à la construction de l'action sociale ». Sous ses habits neufs de « développement », l'ancien travail social communautaire retrouve ainsi droit de cité. Des assistantes sociales, qui témoignent dans l'ouvrage, ne cachent d'ailleurs pas leur surprise de voir ériger le DSL au rang de méthode d'intervention novatrice. Mais, dévoreuse de temps, la mise en oeuvre de partenariats et de pratiques collectives et participatives se heurte au manque de disponibilité des travailleurs sociaux, absorbés par le traitement des demandes individuelles et la gestion des dispositifs. Cette autre façon de travailler se voit aussi contrecarrée par les contraintes budgétaires des collectivités locales, qui ont à digérer les coûts de la décentralisation. Au point même que, tout en favorisant l'émergence du DSL, avance Geneviève Besson, la décentralisation pourrait tout aussi bien amener à y renoncer.
Le développement social local. Significations, complexité et exigences - Geneviève Besson - Ed. L'Harmattan - 24 € .
Comment les parents d'enfants suivis dans le cadre d'une mesure d'action éducative d'aide à domicile (AEAD) perçoivent-ils cette intervention ? Basée sur des entretiens avec 31 familles et 13 travailleurs sociaux, ainsi que sur la lecture des écrits professionnels permettant de contextualiser le discours des parents, la recherche d'Anna Rurka fournit plusieurs éléments de réponse à cette question. Les parents rencontrés évoquent tous le rôle libérateur de la parole, la parole confiée au travailleur social comme celle échangée avec d'autres parents dans le cadre de réunions de groupe. Cependant, ils sont nombreux aussi à souligner l'importance de l'équilibre à trouver entre la parole et l'action. « Au début, c'était bien, ça m'a permis de parler », fait observer une mère, qui déplore ensuite de n'avoir « pas vu d'aide concrète : on ne faisait que parler ». En termes de satisfaction ou d'insatisfaction à la fin de la mesure, les parents se partagent en deux groupes quantitativement équivalents. Mais une différence notable les distingue : ceux insatisfaits ont toujours été adressés au service par un autre acteur institutionnel. Chez eux, c'est l'incompréhension qui domine : « Ils ont vécu l'intervention comme une violence vis-à-vis de leur famille, une violence incomprise », explique la chercheuse. Les adultes satisfaits, en revanche, comptent à la fois dans leurs rangs des parents qui ont fait une demande directe d'AEAD et d'autres qui ont été orientés par un tiers vers le service. Ces parents satisfaits semblent avoir pris « la bonne place », fait observer Anna Rurka, c'est-à-dire que « la place de «demandeur de l'aide» », qui leur était implicitement dévolue, ne se trouvait pas en discordance avec celle qu'ils voulaient occuper. Faisant montre d'une envie de changement importante, ces familles ont trouvé le travailleur social efficace, car les transformations escomptées sont intervenues, ajoute Anna Rurka, précisant que pour la majorité des travailleurs sociaux interviewés, « les changements obtenus dépendent de l'attitude adoptée par l'usager ». Réponse du berger à la bergère : les parents apprécient l'action éducative d'aide à domicile dans la mesure où ils trouvent la relation avec l'intervenant social positive.
L'efficacité de l'action éducative d'aide à domicile. Le point de vue des usagers et des professionnels - Anna Rurka - Ed. L'Harmattan - 16,50 € .
Exposer publiquement les violences dont on est victime dans le cadre privé est une démarche qui n'est guère facile. En particulier pour les jeunes filles et les femmes étrangères ou d'origine étrangère tiraillées entre la crainte d'être mises au ban de leur famille et la peur de la stigmatiser. « J'ai quand même une boule à l'estomac quand je me dis que je ne reverrai peut-être jamais plus mes parents et je pense aussi à la «honte» qui va s'abattre sur eux quand la famille le saura », résume Fatiha, qui refuse un mariage imposé. A l'instar de cette adolescente, de nombreuses jeunes filles et femmes immigrées ou issues de l'immigration sortent du silence pour rompre avec la violence. Elles se tournent alors vers des associations à même de les aider. Deux d'entre elles ont fourni au sociologue Smaïn Laacher les quelque 700 courriers ou fiches téléphoniques qui constituent le matériau principal de ses analyses : Voix de femmes, créée en 1998 et spécialisée dans la lutte contre les mariages forcés, et « Ni putes ni soumises », fondée en 2002, dont les lettres retenues portent explicitement sur la dénonciation de violences familiales et/ou conjugales. « Il y a plus inconnu que le soldat inconnu : sa femme », affirmaient les féministes dans les années 70. Cette observation pourrait tout aussi bien s'appliquer aux femmes étrangères ou d'origine étrangère, « point aveugle » de l'histoire de l'immigration en France. « Des années 1960 aux années 1990, ces femmes sont considérées d'abord et avant tout comme épouses de travailleurs immigrés ou en tant que filles de parents immigrés », explique Smaïn Laacher. La seule controverse qui les met spécifiquement en scène est celle qui a trait au foulard islamique. Mais, l'inquiétude porte alors plus sur les dangers encourus par la République et son idéal de laïcité que sur la domination des intéressées dans le huis clos domestique. En dehors de certains lieux publics - principalement à l'école et dans l'administration -, « leur condition ne regardait qu'elles et, bien entendu les groupes auxquels elles étaient liées par la filiation, le sang et la nationalité », commente le sociologue. C'est cet espace du secret qui vole ici en éclats. Au travers de leurs prises de parole, ces « femmes invisibles » montrent que ni la souffrance ni la résignation ne sont une fatalité.
Femmes invisibles. Leurs mots contre la violence - Smaïn Laacher - Ed. Calmann-Lévy -18 € .
Nouvelles approches des droits des usagers, de la participation et la citoyenneté des personnes handicapées, de la protection de l'enfance et de la prévention de la délinquance : quatre lois, au cours des six dernières années, ont sensible-ment transformé le paysage de l'éducation spécialisée. Pour aider les éducateurs à en saisir les enjeux, c'est-à-dire aussi « à transformer leurs représentations, voire à repenser le métier », Pascal Le Rest et Macaire Passy font le point sur les dernières évolutions sociales et sociétales.
L'éducation spécialisée en 45 fiches - Pascal Le Rest, Macaire Passy - Ed. Ellipses - 19 € .
En 1981, Isabelle Affolter a créé un centre d'hébergement et de réinsertion sociale pour femmes victimes de violences conjugales. Dans cet espace qu'elle a dirigé pendant 20 ans, Simone, Colette, Karima et bien d'autres ont pu « souffler, poser [leurs] valises, ne plus attendre le soir la peur au ventre ». Ce sont leurs histoires de vie qui sont au coeur de cet attachant récit.
Accueillir des femmes en détresse. Le quotidien d'un centre d'hébergement - Isabelle Affolter - Ed. érès - 10 € .
Parce que, même lorsqu'elles ont besoin de soins, les personnes âgées sont d'abord et avant tout des êtres sociaux, leur projet de vie ne peut se réduire à la seule approche médico-centrée. Mais, à domicile comme en établissement, la dimension sociale de l'accompagnement gérontologique fait figure de parent pauvre, soulignent les auteurs, qui plaident notamment pour la création d'une fonction de « coordonnateur social ».
Le projet de vie personnalisé des personnes âgées - Richard Vercauteren, Bernard Hervy et Jean-Luc Schaff - Ed. érès - 23 € .
Comment la disparition partielle de la frontière entre les espaces publics et les espaces privés modifie-t-elle les rapports entre la famille, l'institution et les intervenants sociaux ? Cette confusion des espaces est-elle une menace pour l'enfant ? Des questions débattues par les sociologues, psychiatres, juristes et chercheurs, lors des journées d'études de la Fn3s (Fédération nationale des services sociaux spécialisés de protection de l'enfance et de l'adolescence en danger) les 31 mai, 1er et 2 juin 2006, à Bordeaux.
Disponibles à la Fn3s : 78 bis, boulevard Foch - 54520 Laxou - Tél. 03 83 94 22 47 - 20 € .
Les questions d'éthique ont fait l'objet du deuxième séminaire interuniversitaire sur la clinique du handicap, qui s'est tenu à Nanterre en octobre 2007. Abordées sous l'angle théorique mais aussi à travers l'approche clinique des professionnels, des praticiens et des chercheurs croisent leurs réflexions sur le dépistage médical et le diagnostic anténatal, la procréation (la sexualité et la parentalité des personnes handicapées), l'autonomie et le respect de l'altérité (tutelle, choix du lieu de vie).
Sous la direction de Régine Scelles - Ed. érès : 11, rue des Alouettes - 31520 Ramonville-Saint-Agne - Tél. 05 61 75 15 76 - 25 € .
Convoquer le droit pour compren-dre les enjeux de la pauvreté. C'était l'approche originale du séminaire organisé en 2007 par l'Observatoire national de la pauvreté et de l'exclusion sociale (ONPES) en collaboration avec la mission recherche de la direction de la recherche, des études, de l'évaluation et des statistiques (MiRe DREES). Au programme : les évolutions et ruptures dans le lien entre droit et pauvreté, l'analyse des catégories émergentes du droit et l'accès au droit des plus démunis.
Coordonné par Patrick Du Cheyron et Didier Gélot - Consultable sur