La garde des Sceaux a présenté le 5 novembre, en conseil des ministres, un projet de loi tendant à amoindrir le risque de récidive criminelle et portant diverses dispositions de procédure pénale. Ce texte complète la loi du 25 février 2008 relative à la rétention de sûreté et à la déclaration d'irresponsabilité pénale pour cause de trouble mental, qui avait fait l'objet d'une censure partielle par le Conseil constitutionnel (1). La Haute Juridiction avait notamment estimé que la mesure de rétention de sûreté ne pouvait être appliquée aux personnes condamnées avant le 27 février dernier - date de publication de la loi - ou faisant l'objet d'une condamnation postérieure pour des faits commis antérieurement. Sauf en cas de non-respect des obligations imposées dans le cadre de la surveillance de sûreté. Pour contourner les difficultés soulevées par l'instance, Nicolas Sarkozy avait alors demandé au président de la Cour de cassation, Vincent Lamanda, de lui faire des propositions en vue d'une adaptation du droit (2).
Si le Conseil constitutionnel a considéré que la loi du 25 février dernier présente toutes les garanties nécessaires quant à l'adéquation, la proportionnalité et la nécessité de la rétention de sûreté, il a toutefois insisté pour que cette mesure ne soit prononcée que si « le condamné a pu, pendant l'exécution de sa peine, bénéficier de soins ou d'une prise en charge [médicale, sociale ou psychologique] destinée à atténuer sa dangerosité ». Une précision que consacre le projet de loi. Toujours sur le caractère de nécessité de la rétention de sûreté, le projet de loi prévoit - sur la recommandation du rapport « Lamanda » - que « le placement en centre socio-médico-judiciaire de sûreté ne peut être ordonné qu'à la condition qu'un renforcement des obligations de surveillance de sûreté (3)apparaisse insuffisant » pour prévenir la commission des crimes pouvant donner lieu à une telle mesure. Dans ce cadre, précise le ministère de la Justice, la juridiction régionale de la rétention de sûreté pourra, par exemple, « décider de compléter les obligations d'une surveillance de sûreté par un placement sous surveillance électronique mobile qui n'avait pas déjà été ordonné si le comportement de la personne le justifie, avant de prononcer, dans le cas où ce renforcement des obligations ne produirait pas les effets escomptés, une rétention de sûreté ».
Autre mesure prévue par le projet de loi : la suspension de la rétention de sûreté et de la surveillance de sûreté en cas de détention prononcée au cours de leur exécution. « Tel sera le cas si une personne sous surveillance de sûreté est placée pendant un certain temps en détention provisoire ou doit exécuter une peine d'emprisonnement pour avoir commis une infraction sans rapport avec la mesure de sûreté », explique l'exposé des motifs. Toutefois, précise le projet de loi, « si la détention excède une durée de un an, la reprise de la rétention de sûreté ou de la surveillance de sûreté devra être confirmée par la juridiction régionale de la rétention de sûreté au plus tard dans un délai de trois mois après la cessation de la détention, à défaut de quoi il sera mis fin d'office à la mesure ».
S'inspirant encore du rapport « Lamanda », le texte défendu par Rachida Dati permet à la juridiction régionale de rétention de sûreté d'ordonner une mesure de surveillance de sûreté, à l'issue de l'exécution d'une peine de réclusion, à l'égard d'un condamné précédemment libéré et placé sous surveillance judiciaire n'ayant pas respecté les obligations auxquelles il était astreint et dont les réductions de peine ont été retirées. Il offre également la possibilité de soumettre une personne dont la peine a été suspendue du fait d'une procédure de révision aux obligations d'une libération conditionnelle, y compris la mise sous surveillance électronique mobile (4).
Le projet de loi stipule par ailleurs que les jugements ou arrêts de déclaration d'irresponsabilité pénale pour cause de trouble mental ne peuvent être inscrits au casier judiciaire que lorsque des mesures de sûreté ont été prononcées (interdiction d'entrer en relation avec la victime, de paraître en tout lieu spécialement désigné ou encore d'exercer une activité professionnelle ou bénévole spécialement désignée). Une rédaction plus restrictive que celle de la loi du 25 février qui ne fait actuellement pas de distinction, ce qui avait suscité la réserve du Conseil constitutionnel.
A noter enfin : la garde des Sceaux entend permettre aux personnes retenues dans un centre socio-médico-judiciaire de bénéficier de l'aide juridictionnelle pour les décisions prises à leur encontre en vue d'assurer le bon ordre dans la structure.
(3) La surveillance de sûreté peut être prononcée pour une durée de un an renouvelable lorsque la mesure de rétention de sûreté n'est pas prolongée ou qu'il y est mis fin mais que le condamné présente toujours un risque de récidive.
(4) Obligations qui s'appliqueraient pour une durée de un an, renouvelable par la commission ou la cour de révision. En cas de violation de ces mesures, le condamné s'exposerait à une incarcération provisoire.