Au bord de l'asphyxie. Missionnées par le gouvernement pour réaliser « un audit rapide de l'organisation et de la gestion du fonds d'indemnisation des victimes de l'amiante (FIVA) », les inspections générales des finances et des affaires sociales (IGF et IGAS) se sont retrouvées face à « un établissement en situation critique » (1). La conséquence d'« un afflux de dossiers [...] que le FIVA n'a su ni anticiper, ni maîtriser », selon la mission, et, plus largement, le résultat de « graves difficultés d'organisation de cet établissement dans toute la chaîne de traitement des demandes d'indemnisation, qu'on retrouve également dans l'activité induite du contentieux subrogatoire » (2).
Dans leur rapport, les deux inspections soulignent l'urgence de mener « sans délai » des actions fortes pour « apurer le passé et réorganiser en profondeur » le FIVA. Selon elles, deux types d'actions doivent être engagées concomitamment. D'une part, il s'agit de mettre en place un dispositif d'urgence pour « sortir du cercle vicieux de l'engorgement des demandes ». « D'une durée de neuf mois, ce dispositif prendrait en charge, jusqu'au paiement, dans un mode de traitement simplifié, les «demandes simples» accumulées dans les encours du FIVA, c'est-à-dire les demandes initiales de victimes reconnues en maladies professionnelles au taux de 5 % (sans indemnisation en rentes) et les demandes initiales des ayants droit pour leurs préjudices personnels (sauf si il y a un calcul spécifique de préjudice économique). » En plus de ces demandes (environ 20 000), la cellule d'urgence ainsi créée aurait également à prendre en charge les nouvelles « demandes simples ». Elle serait complétée par la création d'un centre de réponse téléphonique qui serait sous-traité. L'ensemble nécessite « le recrutement temporaire, pour une durée de l'ordre de neuf mois, de 20 agents de niveau intermédiaire (bac + 2) et que soit dégagé un budget supplémentaire de fonctionnement de l'ordre de 1,2 million d'euros », évalue le rapport IGF-IGAS. A noter : pendant les neuf mois de la mise en place de cette cellule d'urgence, le service d'indemnisation du FIVA traiterait les autres demandes en instance et le flux entrant de demandes non simples, ainsi que les contentieux liés, avec l'objectif de « diminuer fortement les délais de réponse ». Les deux inspections estiment que « le niveau actuel du fonds de roulement, soit 345,8 millions d'euros au 31 décembre 2007, devrait permettre de faire face à l'accélération du traitement des demandes ».
D'autre part, le rapport appelle à « une réforme de l'organisation du travail et des modes opératoires du FIVA, appuyée sur un renouvellement progressif des systèmes informatiques, propre à améliorer sensiblement la productivité et les délais de traitement, tout en accroissant la qualité du service rendu aux victimes et aux ayants droit ». Il s'agit pour l'établissement « de s'organiser pour le traitement de masse, d'améliorer son pilotage et de sortir du formalisme, pour entrer dans une culture de résultat », expliquent les deux inspections. Une nécessité d'autant plus impérieuse « dans un contexte où [son] activité devrait demeurer à un niveau élevé dans les prochaines années ».
Au-delà, pour la mission, la conclusion entre l'Etat et le FIVA d'un contrat d'objectifs et de moyens est « une perspective indispensable ». Ce contrat « devrait conduire la direction [de l'établissement] à prendre des engagements forts au niveau des délais de traitement (atteindre, en un an, 70 % des demandes traitées dans un délai inférieur à quatre mois après la date de recevabilité, [et] 90 % dans un délai inférieur à six mois), de paiement (90 % des victimes de pathologies graves payées dans le délai d'un mois après acceptation de l'offre, 100 % des paiements effectués dans le délai de deux mois) et du contentieux subrogatoire. En contrepartie, l'Etat s'engagerait sur les moyens du FIVA, en fonction de son niveau d'activité, [...] au-delà de ce qui doit être réalisé à court terme », explique-t-elle.
L'ensemble des ces actions, concluent les deux inspections, demandent « une implication très forte de la direction du FIVA », qui partage la quasi-totalité de leurs constatations. Elles supposent aussi « un engagement très ferme des tutelles, qui pourront utilement désigner un chargé de mission de haut niveau, chargé de veiller à la bonne fin des actions à entreprendre et d'apporter son appui à la direction du FIVA, notamment en ce qui concerne le dialogue avec les tutelles ».
(1) Le fonds d'indemnisation des victimes de l'amiante - Juillet 2008 - Disponible sur
(2) Une fois l'offre d'indemnisation du fonds acceptée par le demandeur, le FIVA exerce une action - dite « action subrogatoire » - contre l'employeur responsable.