Jusqu'à présent, pour l'octroi de certaines prestations sociales, étaient prises en compte les ressources et la situation familiale des assurés. Dans le cadre de la lutte contre les abus et les fraudes, et conformément à la loi de financement de la sécurité sociale pour 2007, les éléments du train de vie doivent aussi désormais être pris en compte. Ainsi, lorsque l'organisme local de sécurité sociale constate, lors de l'instruction d'une demande ou lors d'un contrôle, une disproportion marquée entre, d'une part, le train de vie du demandeur ou du bénéficiaire et, d'autre part, les ressources qu'il déclare, une évaluation forfaitaire de son train de vie est réalisée. Cette mesure vaut pour la détermination du droit à certaines prestations familiales, au revenu minimum d'insertion, à l'allocation de parent isolé, à la couverture maladie universelle complémentaire et à l'aide à l'acquisition d'une couverture complémentaire santé.
La mise en place de ce dispositif a suscité la colère de plusieurs mouvements de soutien aux chômeurs et aux personnes en difficulté (1), qui l'accusent de stigmatiser les plus vulnérables par la suspicion et le contrôle. Pour la direction de la sécurité sociale (DSS), l'objectif est seulement de « mettre un terme à des situations, rares mais choquantes, de personnes pour lesquelles le bénéfice des minima sociaux n'est pas justifié ». Cette procédure doit « rester exceptionnelle », précise-t-elle. Elle « n'a pas vocation à s'appliquer aux personnes ayant de faibles ressources ou un patrimoine peu important » et n'est pas dirigée contre elles. Selon l'administration, il s'agit uniquement d'« un outil supplémentaire à disposition des agents de contrôle » (circulaire DSS du 6 juin 2008).
Les éléments du train de vie, qui comprennent notamment le patrimoine mobilier ou immobilier, sont ceux dont la personne a disposé au cours de la période correspondant à la déclaration de ses ressources, en quelque lieu que ce soit, en France ou à l'étranger, et à quelque titre que ce soit (code de la sécurité sociale [CSS], art. L. 553-5, al. 2, L. 861-2-1, al. 2 et code de l'action sociale et des familles [CASF], art. L. 262-10-1, al. 2).
Signalons que ce dispositif touche également les demandeurs ou les bénéficiaires de la couverture maladie universelle (CMU) de base. En effet, les éléments du train de vie sont dorénavant pris en compte pour le calcul de l'assiette utilisée comme base de calcul de la cotisation due par les personnes dont les ressources dépassent le plafond d'attribution de la CMU de base (voir encadré, page 22).
Lorsque l'organisme local de sécurité sociale, à l'occasion de l'instruction d'une demande ou d'un contrôle, constate une disproportion marquée entre, d'une part, le train de vie du demandeur ou du bénéficiaire et, d'autre part, les ressources qu'il déclare, une évaluation forfaitaire des éléments de train de vie est effectuée. Celle-ci est alors prise en compte pour la détermination du droit à la prestation sollicitée (CSS, art. L. 553-5 et L. 861-2-1 ; CASF, art. L. 262-10-1).
Concrètement, la procédure d'évaluation des éléments du train de vie concerne deux situations, la première étant celle des personnes qui dissimulent leurs ressources afin d'obtenir des minima sociaux ou des prestations sociales. Il s'agit là, explique la direction de la sécurité sociale, de « personnes qui bénéficient effectivement de minima sociaux alors même que le niveau de leurs dépenses ou du patrimoine dont elles disposent laisse manifestement supposer une dissimulation de leurs ressources ».
Autre public visé : les personnes qui disposent d'un patrimoine important ne justifiant pas le bénéfice de minima sociaux ou de prestations sociales. L'administration précise que sont ici ciblées les « personnes qui ne dissimulent aucunes ressources, qui ne fraudent pas mais qui peuvent, en l'état de la réglementation de droit commun, se voir attribuer des minima sociaux ou des prestations sociales alors même qu'elles disposent d'un patrimoine important ». « Ces situations, avoue-t-elle, ont permis de constater que pouvaient bénéficier de minima sociaux des personnes ne faisant état d'aucunes ressources tirées d'une activité professionnelle mais qui étaient néanmoins propriétaires d'un ou plusieurs biens immobiliers de grande valeur ou disposant de capitaux les assujettissant à l'[impôt sur les grandes fortunes] ». Dans ce cas, indique la DSS, la procédure d'évaluation des éléments du train de vie ne vise qu'à « corriger les imperfections de la réglementation de droit commun qui valorise insuffisamment les éléments de patrimoine ».
En tout état de cause, ajoute-t-elle, « cette procédure a été conçue essentiellement afin de doter les agents chargés du contrôle d'un outil supplémentaire de détection de la fraude ou de la fausse déclaration » (circulaire DSS du 6 juin 2008).
La procédure d'évaluation des éléments de train de vie peut concerner les prestations suivantes :
les prestations familiales soumises à condition de ressources, à savoir la prestation d'accueil du jeune enfant (PAJE), le complément familial, l'allocation de rentrée scolaire (ARS) et l'allocation de parent isolé (API) (CSS, art. L. 553-5) ;
le revenu minimum d'insertion (RMI) (CASF, art. L. 262-10) ;
la couverture maladie universelle complémentaire (CMU-C) (CSS, art. L. 861-2-1) ;
l'aide à l'acquisition d'une couverture complémentaire santé (ACS) (CSS, art. L. 863-1).
Ne sont en revanche pas concernées par cette procédure (circulaire DSS du 6 juin 2008) :
les prestations d'aide au logement ;
les prestations familiales non soumises à condition de ressources, c'est-à-dire :
- les allocations familiales ;
- l'allocation d'éducation de l'enfant handicapé ;
- l'allocation de soutien familial ;
- l'allocation journalière de présence parentale ;
- la prime forfaitaire octroyée à l'allocataire du RMI ou de l'API qui débute ou reprend une activité professionnelle ou un stage de formation rémunéré.
Sont pris en compte pour l'évaluation du train de vie (CASF, art. R. 262-22-1, I ; CSS, art. R. 524-15-1, I, R. 553-3-1, I et R. 861-15-1, I) :
les propriétés bâties détenues ou occupées par le demandeur ou le bénéficiaire (2) :
- pour le RMI, les prestations familiales et l'API, à hauteur d'un quart de la valeur locative annuelle définie aux articles 1494 à 1508 et 1516 et 1518 B du code général des impôts (CGI),
- pour la CMU-C et l'ACS, le total de la valeur locative annuelle définie aux articles 1494 à 1508 et 1516 à 1518 B du CGI ;
les propriétés non bâties détenues ou occupées par le demandeur ou le bénéficiaire (3) :
- pour le RMI, les prestations familiales et l'API, à hauteur d'un quart de la valeur locative annuelle définie aux articles 1509 à 1518 A du CGI,
- pour la CMU-C et l'ACS, le total de la valeur locative annuelle définie aux articles 1509 à 1518 A du CGI ;
les capitaux :
- pour le RMI et l'API, à hauteur de 2,5 % de leur montant à la fin de la période de référence (voir ci-dessous),
- pour les prestations familiales, la CMU-C et l'ACS, à hauteur de 10 % de leur montant à la fin de la période de référence (voir ci-dessous) ;
les automobiles, bateaux de plaisance, motocyclettes :
- pour le RMI et l'API, à hauteur de 6,25 % de la valeur vénale de chaque bien lorsque celle-ci est supérieure à 10 000 € ,
- pour les prestations familiales, la CMU-C et l'ACS, à hauteur de 25 % de la valeur vénale de chaque bien lorsque celle-ci est supérieure à 10 000 € ;
les objets d'art ou de collection, articles de joaillerie et métaux précieux :
- pour le RMI et l'API, à hauteur de 0,75 % de leur valeur vénale,
- pour les prestations familiales, la CMU-C et l'ACS, à hauteur de 3 % de leur valeur vénale ;
les travaux, charges et frais d'entretien des immeubles : 80 % du montant des dépenses ;
les personnels et services domestiques : 80 % du montant des dépenses ;
les appareils électroménagers, équipements son-hifi-vidéo, matériels informatiques : 80 % du montant des dépenses lorsque celles-ci sont supérieures à 1 000 € ;
les voyages, séjours en hôtels et locations saisonnières, restaurants, frais de réception, biens et services culturels, éducatifs, de communication ou de loisirs : 80 % du montant des dépenses ;
les clubs de sports et de loisirs, droits de chasse : 80 % du montant des dépenses.
Dans les cinq derniers cas, précise la caisse nationale des allocations familiales (CNAF), ces dépenses sont prises en compte, qu'elles aient été « effectuées par l'allocataire lui-même ou un membre de sa famille ou aient été prises en charge par une autre personne pour son compte ». « S'agissant par exemple d'un logement mis à disposition gracieuse de l'allocataire, d'une part pourra être pris en compte sa valeur locative et, d'autre part, les charges de copropriété quand bien même elles sont acquittées par le propriétaire », illustre la caisse (circulaire CNAF du 2 avril 2008).
Quant à la valeur vénale, il s'agit de la valeur réelle à la date de mise à disposition. Afin de l'évaluer, sont notamment retenus, lorsqu'ils existent (CASF, art. R. 262-22-1, II ; CSS, art. R. 524-15-1, II, art. R. 553-3-2, II et art. R. 861-15-1, II) :
le montant garanti par le contrat d'assurance ;
l'estimation particulière effectuée par un professionnel ;
la référence issue d'une publication professionnelle faisant autorité.
A noter : dans tous les cas, les biens et services ne sont pas pris en compte lorsqu'ils ont été détenus ou utilisés à usage professionnel. En cas d'usage mixte, l'évaluation est effectuée au prorata de l'utilisation à usage privé ou personnel.
Les éléments pris en compte pour l'évaluation du train de vie sont ceux dont la personne a disposé au cours de la période correspondant à la déclaration de ses ressources, qui varie selon la prestation concernée.
Les dépenses doivent avoir été engagées pendant cette période de référence. S'agissant d'un bien à crédit, précise l'administration, seul le montant des mensualités de crédit effectivement réglées sera pris en compte (circulaire DSS du 6 juin 2008).
Pour le RMI et l'API, la période de référence est la période de 3 mois précédant la demande ou la révision de la prestation (CASF, art. R. 262-22-2 et CSS, art. 524-5, al. 1).
Pour les prestations familiales, la période de référence est l'avant-dernière année précédant la période de paiement (2006 pour 2008, par exemple) (CSS, art. R. 532-1).
Pour la CMU-C et l'ACS, la période de référence est la période de 12 mois civils précédant la demande (CSS, art. R. 861-8, al. 1).
Il appartient au président du conseil général, dans le cas du RMI - sur demande ou après consultation de la caisse d'allocations familiales -, ou à l'organisme de sécurité sociale, dans les autres cas, d'informer le demandeur ou le bénéficiaire de la prestation, par lettre recommandée avec accusé de réception, qu'il va faire l'objet d'une procédure d'évaluation des éléments de son train de vie. Ce courrier doit tout d'abord l'informer de l'objet de la procédure engagée, de son déroulement, de ses conséquences, de sa possibilité de demander à être entendu et assisté, lors de cet entretien, du conseil de son choix, des sanctions applicables en cas de déclarations fausses ou incomplètes et du fait que le résultat de cette évaluation est transmis aux autres organismes de sécurité sociale qui lui attribuent, le cas échéant, des prestations sous conditions de ressources. Cette lettre doit aussi l'inviter à renvoyer, dans un délai de 30 jours, le questionnaire adressé par l'organisme visant à évaluer les différents éléments de son train de vie accompagné de toutes les pièces justificatives (CASF, art. R. 262-22-4 ; CSS, art. R. 524-15-4, R. 553-3-4 et R. 861-15-4). A défaut de réponse complète dans ce délai, le demandeur ou le bénéficiaire est prévenu qu'il s'expose à la suspension, selon le cas, soit du versement de la prestation jusqu'à la production des pièces requises, soit du délai d'instruction de la demande pendant une durée maximale fixée à (CSS, art. D. 161-1-4, al. 3 et D. 161-1-3) :
pour les décisions régies par un régime implicite de rejet, 2 mois à compter de la date à laquelle l'organisme de sécurité sociale a informé le demandeur qu'il devait produire des pièces supplémentaires ;
pour les décisions obéissant à un régime de décision implicite d'acceptation, jusqu'à la production des pièces requises.
En outre, rappelle la DSS, il convient d'informer le demandeur ou le bénéficiaire de la prestation que les déclarations qu'il a faites portant sur les éléments de son train de vie feront l'objet d'un contrôle systématique, notamment par l'exercice du droit de communication récemment dévolu aux agents de contrôle des organismes de sécurité sociale par la loi de financement de la sécurité sociale pour 2008 (4). Titulaires des mêmes pouvoirs que les services fiscaux, les contrôleurs des organismes de sécurité sociale peuvent en effet, sans que s'y oppose le secret professionnel, obtenir directement les informations et les documents nécessaires afin de vérifier auprès d'organismes ou entreprises tiers - en particulier les fournisseurs d'énergie, de téléphonie et les établissements bancaires - la sincérité et l'exactitude des déclarations souscrites ou l'authenticité des pièces produites par le demandeur ou le bénéficiaire (circulaire DSS du 6 juin 2008) (5).
Dans tous les cas - hormis celui du RMI -, les organismes locaux de sécurité sociale doivent rendre compte sans délai au préfet de région de chacune des évaluations effectuées, après suppression de tout élément d'identification des personnes concernées. Et préciser :
le cas échéant, si le demandeur ou le bénéficiaire a transmis une réponse à la demande d'évaluation dans le délai prescrit ;
le sens de la décision prise à l'issue de l'évaluation ;
les éléments du train de vie qui en ont fait l'objet ;
le cas échéant, la nature et le montant de la sanction prononcée en cas de fraude ou de fausse déclaration.
Le représentant de l'Etat transmet ensuite périodiquement un bilan de ces éléments au ministre concerné (CSS, art. R. 524-15-7, art. R. 553-3-7 et art. R. 861-15-7).
Dans le cas du RMI, la CNAF et la caisse centrale de mutualité sociale agricole transmettent, à la fin de chaque trimestre, au ministre chargé de l'action sociale un bilan de l'application des dispositions régissant la procédure d'évaluation du train de vie (CASF, art. R. 262-22-7).
L'organisme local de sécurité sociale considère qu'il y a disproportion marquée entre le train de vie et les ressources déclarées lorsque le montant du train de vie est supérieur ou égal :
pour le RMI, à la moitié du montant annuel de la prestation, augmentée des revenus perçus, pour la période de référence, au titre, d'une part, des prestations et aides exclues en tout ou partie pour l'appréciation des ressources déclarées en aplication des articles R. 262-6 et R. 262-7 du code de l'action sociale et des familles et, d'autre part, des rémunérations tirées d'une activité professionnelle ou de stages de formation qui ont commencé au cours de la période de versement de cette prestation (CASF, art.R. 262-22-5) ;
pour la PAJE, l'ARS et le complément familial, au double du plafond de ressources applicable à la prestation concernée, augmenté des revenus perçus, pour la période de référence, au titre des prestations et rémunérations exclues en tout ou en partie pour l'appréciation des ressources déclarées, en application des articles R. 532-3 à R. 532-8 du code de la sécurité sociale (CSS, art.R. 553-3-5) ;
pour l'API, à la moitié du montant annuel de la prestation, augmentée des revenus perçus, pour la période de référence, au titre des prestations et rémunérations exclues en tout ou en partie pour l'appréciation des ressources déclarées en application des articles R. 524-3 et R. 524-6 du code de la sécurité sociale (CSS, art.R. 524-15-5) ;
pour la CMU-C et l'ACS, au double du plafond de ressources applicable pour l'ouverture du droit à la prestation concernée, augmenté des revenus perçus, pour la période de référence, au titre des prestations et rémunérations exclues en tout ou en partie pour l'appréciation des ressources déclarées en application des articles R. 861-8 et R. 861-10 du code de la sécurité sociale (CSS, art.R. 861-15-5).
Signalons qu'un seul élément pris en compte pour l'évaluation du train de vie ne suffit pas à remettre en cause le droit du demandeur ou du bénéficiaire à une prestation. Par exemple, explique la direction de la sécurité sociale, « ne remet pas en cause le droit [aux prestations] le fait pour une personne seule d'être uniquement propriétaire : d'un appartement de 5 pièces à Paris dont la valeur locative médiane est de 10 399 € ; d'un véhicule haut de gamme d'une valeur neuve de 40 000 € qui ne sera pris en compte qu'à hauteur de 25 %, soit 10 000 € ; de capitaux d'un montant de 50 000 € qui ne seront pris en compte qu'à hauteur de [10 %, soit] 5 000 € € ». L'administration insiste en effet sur le fait que « seul un examen de la situation générale du train de vie de la personne peut conduire à une remise en cause du droit à la prestation » (questions-réponses de la DSS).
Si l'examen de la situation du demandeur ou du bénéficiaire révèle une disproportion par rapport aux ressources déclarées, les éléments du train de vie sont pris en compte pour la détermination du droit à la prestation, l'évaluation forfaitaire se substituant ainsi aux ressources déclarées. Toutefois, souligne l'administration, « dans le cas où ces ressources avaient été déclarées conformément à la réglementation en vigueur, il ne saurait en résulter un indu à rembourser pour le passé ». « Sauf cas de fraude, les règles et les procédures de recouvrement de l'indu ne sont donc pas applicables. » Le constat de la disproportion marquée n'a d'effet que pour l'avenir, c'est-à-dire qu'il a un impact sur la décision d'attribution du droit si ce constat est effectué à l'occasion d'une demande, ou sur son renouvellement si ce constat est réalisé à l'occasion d'un contrôle au cours de la période de droit. Dans ce dernier cas, indique la DSS, le renouvellement ne pourra être accordé que si l'intéressé établit, lors de cette demande, que la disproportion a cessé, « ce qui suppose une nouvelle évaluation du train de vie lors de cette demande » (circulaire DSS du 6 juin 2008).
La disproportion marquée entre les revenus déclarés et le train de vie entraîne, en principe, la non-ouverture du droit à la prestation ou le non-renouvellement du droit. Dans ce dernier cas, selon la prestation en cause, le droit est suspendu au prochain renouvellement trimestriel (API et RMI) ou annuel (prestations familiales, CMU-C et ACS) suivant la notification définitive de l'évaluation forfaitaire du train de vie. Par exemple, indique la CNAF, « s'agissant d'un bénéficiaire du RMI dont les droits sont renouvelés en février, mai, août et novembre, une évaluation du train de vie effectuée sur le trimestre de ressources février/mars/avril, et notifiée au cours de ce trimestre, aboutira à la suspension du droit à compter de mai. Si la notification n'intervient qu'en mai, le droit est suspendu en août ». Pour la PAJE et le complément familial, « l'évaluation effectuée et mise en oeuvre par exemple au cours de l'année 2008 aboutira à la suspension des droits au 1er janvier 2009 » (circulaire CNAF du 2 avril 2008).
En cas de refus d'octroi de la prestation, la décision - qui doit être motivée et indiquer les voies de recours dont dispose l'intéressé - est notifiée au demandeur ou au bénéficiaire, par lettre recommandée avec accusé de réception (CASF, art.R. 262-22-6 ; CSS, art. R. 524-15-6 ; art. R. 553-3-6 ; art. R. 861-15-6).
Lorsque les ressources prises en compte selon l'évaluation forfaitaire du train de vie ne donnent pas droit à la prestation, l'attribution, la prorogation ou le renouvellement de la prestation n'est pas refusé en cas de circonstances exceptionnelles liées notamment à la situation économique et sociale du foyer, ou s'il est établi que la disproportion marquée a cessé.
Autre cas de figure : les disproportions occasionnelles résultant du bénéfice d'une succession, c'est-à-dire du « versement d'une libéralité par un tiers de faible montant qui augmente ponctuellement les ressources mais ne modifie pas fondamentalement la situation sociale du bénéficiaire ». Ici, précise la DSS, le demandeur ou le bénéficiaire - à qui incombe la charge de la preuve - peut toujours établir que la disproportion a cessé. Dans ce cas, la disproportion n'aura pas de conséquence. Il existe ainsi, en cas de disproportion, une « présomption de non-droit à la prestation, que le demandeur [peut] toujours essayer de contredire » (circulaire DSS du 6 juin 2008).
En cas de fraude, explique la CNAF, et en particulier « en cas de non-déclaration sur les demandes de RMI et d'API ou les déclarations trimestrielles des éléments du train de vie demandés, tels des biens immobiliers ou des capitaux, le droit peut être remis en cause rétroactivement » (circulaire CNAF du 2 avril 2008).
Concernant le bénéficiaire de la CMU-C, en cas de réticence à fournir les informations requises ou de fausses déclarations intentionnelles, la décision d'attribution de la prestation est annulée, ce qui entraîne la nullité des adhésions et des contrats de CMU-C. Les organismes de protection complémentaire de santé assurant la gestion du dispositif peuvent alors demander à l'assuré le remboursement des sommes versées à tort. Pour ce faire, ils doivent émettre un avis des sommes à payer, qui précise les dates des soins ou prestations effectués, ainsi que les dates et les montants correspondants des versements réalisés à tort. Sous peine de nullité, cet avis doit informer le débiteur qu'il peut demander la remise ou la réduction de sa dette dans un délai de 1 mois à compter de sa notification (6), demande qu'il doit adresser à l'organisme concerné (CSS, art. R. 861-22). Dès lors, et à peine de nullité de la créance, ce dernier transmet la demande de l'allocataire au préfet territorialement compétent dans un délai de 15 jours à compter de la réception de cette demande. Le préfet notifie ensuite au débiteur et à l'organisme local de sécurité sociale concerné le montant de la somme due et, le cas échéant, celui de la remise ou de la réduction. Dans ce dernier cas, la dette restant à la charge du débiteur peut être remboursée selon un échéancier établi par l'organisme qui a émis l'avis des sommes à payer (CSS, art. R. 861-23 à R. 861-25).
Articles L. 553-5 et L. 861-2-1 du code de la sécurité sociale, article L. 262-10-1 du code de l'action sociale et des familles (issus de la loi n° 2006-1640 du 21 décembre 2006, art. 132, J.O. du 22-12-06).
Articles R. 553-3 à 553-3-7, R. 524-4, R. 524-15-1 à R. 524-15-7, R. 861-15-1 à R. 861-15-7, R. 861-22 à R. 861-26 du code de la sécurité sociale, articles R. 262-22-1 à R. 262-22-7 du code de l'action sociale et des familles (issus du décret n° 2008-88 du 28 janvier 2008, J.O. du 30-01-08).
Article D. 161-1-3 du code de la sécurité sociale (issu du décret n° 2008-992 du 18 septembre 2008, J.O. du 21-09-08).
Circulaire n° DSS/2A/2008/181 du 6 juin 2008 (B.O. Santé-Protection sociale-Solidarités n° 6 du 15-07-08).
Lettre-circulaire de la CNAF n° 2008-065 du 2 avril 2008, non publiée.
Questions-réponses de la direction de la sécurité sociale, disponible sur
Selon le projet de loi généralisant le revenu de solidarité active (RSA) et réformant les politiques d'insertion (7) - actuellement discuté au Parlement -, cette nouvelle prestation se substituera au revenu minimum d'insertion et à l'allocation de parent isolé. De ce fait, tout comme pour ces dernières, si le président du conseil général ou les organismes chargés de l'instruction des demandes ou du versement du RSA constatent, à l'occasion de l'instruction d'une demande ou lors d'un contrôle, une disproportion marquée entre, d'une part, le train de vie du foyer et, d'autre part, les ressources qu'il déclare, une évaluation forfaitaire des éléments de train de vie sera effectuée et prise en compte pour la détermination du droit à la prestation. Les éléments de train de vie à prendre en compte, qui comprendront notamment le patrimoine mobilier ou immobilier, seront ceux dont le foyer a disposé au cours de la période correspondant à la déclaration de ses ressources, en quelque lieu que ce soit, en France ou à l'étranger, et à quelque titre que ce soit. Tout paiement indu de RSA sera alors récupéré par l'organisme chargé de son service, ainsi que, dans les conditions définies dans le projet de loi, par les collectivités débitrices du RSA (8).
La loi de financement de la sécurité sociale pour 2007 a prévu que les éléments de train de vie doivent aussi être pris en compte pour le calcul de l'assiette utilisée comme base de calcul de la cotisation due pour pouvoir bénéficier, dans certains cas, de la couverture maladie universelle (CMU) de base (CSS, art. L. 380-2). Pour mémoire, les assurés bénéficient de la CMU de base gratuitement lorsque leurs ressources ne dépassent pas un certain plafond, fixé à 8 774 € pour la période du 1er octobre 2008 au 30 septembre 2009. Au-delà de ce montant, ils doivent s'acquitter d'une cotisation annuelle de 8 %, appliquée au montant des revenus perçus l'année civile précédente et dépassant ce plafond (9). La loi dispose que, pour le calcul de cette cotisation, entre dorénavant en ligne de compte l'ensemble des moyens d'existence et des éléments de train de vie, notamment les avantages en nature et les revenus procurés par des biens mobiliers et immobiliers, dont le bénéficiaire a disposé, en quelque lieu que ce soit, en France ou à l'étranger, et à quelque titre que ce soit. Et ce, dès lors que ces éléments ne sont pas déjà retenus pour la détermination du revenu fiscal de référence. Concrètement, les éléments de train de vie pris en compte sont (CGI, art. 168) :
la valeur locative cadastrale de la résidence principale et des résidences secondaires, déduction faite de celle s'appliquant aux locaux ayant un caractère professionnel, à hauteur de 5 fois la valeur locative cadastrale ;
les employés de maison, précepteurs, préceptrices, gouvernantes (10) :
- pour la première personne âgée de moins de 60 ans : 4 600 € ,
- pour chacune des autres personnes : 5 700 € ;
les voitures et les automobiles destinées au transport des personnes : valeur de la voiture neuve avec abattement de 50 % après 3 ans d'usage (11) ;
les motocyclettes de plus de 450 cm3 : valeur de la motocyclette neuve avec abattement de 50 % après 3 ans d'usage ;
les yachts ou bateaux de plaisance à voiles avec ou sans moteur auxiliaire jaugeant au moins 3 tonneaux de jauge internationale (12) :
- pour les 3 premiers tonneaux : 1 140 € ,
- de 4 à 10 tonneaux : 340 € ,
- de 10 à 25 tonneaux : 460 € ,
- au-dessus de 25 tonneaux : 910 € ;
Le nombre de tonneaux à prendre en considération est égal au nombre de tonneaux correspondant à la jauge brute sous déduction, le cas échéant, d'un abattement pour vétusté égal à 25 %, 50 % ou 75 % suivant que la construction du yacht ou du bateau de plaisance a été achevée depuis plus de 5, 15 ou 25 ans. Le tonnage ainsi obtenu est arrondi, s'il y a lieu, à l'unité immédiatement inférieure ;
les bateaux de plaisance à moteur fixe ou hors-bord d'une puissance réelle d'au moins 20 CV :
- pour les 20 premiers chevaux : 910 € ,
- par cheval-vapeur supplémentaire : 69 € .
Toutefois, la puissance n'est comptée que pour 75 %, 50 % ou 25 %, en ce qui concerne les bateaux construits respectivement depuis plus de 5, 15 et 25 ans ;
les avions de tourisme, à hauteur de 69 € par cheval-vapeur de la puissance réelle de chaque avion ;
les chevaux de course âgés d'au moins 2 ans au sens de la réglementation concernant les courses :
- par cheval de pur sang : 4 600 € ,
- par cheval autre que de pur sang et par trotteur : 2 700 € ;
les chevaux de selle, à hauteur de 1 370 € par cheval âgé au moins de 2 ans à compter du second ;
la location de droits de chasse et la participation dans les sociétés de chasse : 2 fois le montant des loyers payés ou des participations versées lorsqu'il dépasse 4 600 € ;
la participation dans les clubs de golf et les abonnements payés en vue de disposer de leurs installations : 2 fois le montant des sommes versées lorsqu'il dépasse 4 600 € .
La somme forfaitaire déterminée en application de ce barème est majorée de 50 % lorsqu'elle est supérieure ou égale à 42 699 € (13) et lorsque le contribuable a disposé de plus de 6 éléments du train de vie figurant au barème (CGI, art. 168, 2). Il y a disproportion marquée entre le train de vie d'un contribuable et ses revenus lorsque cette somme forfaitaire majorée excède d'au moins un tiers, pour l'année de l'imposition, le montant du revenu net global déclaré, y compris les revenus exonérés ou taxés selon un taux proportionnel ou libérés de l'impôt par l'application d'un prélèvement (CGI, art. 168, 2 bis).
(1) Dont AC !, l'Asso-ciation pour l'emploi, l'information et la solidarité, le Collectif national droits des femmes, le Droit au logement et le Mouvement national des chômeurs et précaires - Voir ASH n° 2544 du 8-02-08, p. 39.
(2) Des règles spécifiques sont prévues pour les propriétés situées à l'étranger.
(3) Des règles spécifiques sont prévues pour les propriétés situées à l'étranger.
(5) Les modalités d'application de cette prérogative ont été largement développées dans une circulaire DSS/5C n° 2008-061 du 20 février 2008 (B.O. Santé-Protection sociale-Solidarités n° 2008/03 du 15-04-08).
(6) Le recouvrement de la somme due ne peut en aucun cas intervenir pendant ce délai.
(8) Un décret fixera le seuil au-dessous duquel la prestation indûment versée ne donne pas lieu à récupération.
(9) Ce n'est pas une condition préalable pour pouvoir bénéficier de la CMU, la cotisation étant payable a posteriori , après vérification des conditions d'attribution par la caisse d'assurance maladie.
(10) La base ainsi déterminée est réduite de moitié en ce qui concerne les personnes employées principalement pour l'exercice d'une profession. En outre, il n'est pas tenu compte du premier employé de maison et il est fait abstraction du second lorsque le nombre des personnes âgées de 65 ans ou infirmes vivant sous le même toit est au moins de 4.
(11) Toutefois, la base ainsi déterminée est réduite de moitié en ce qui concerne les voitures appartenant aux pensionnés de guerre bénéficiaires du statut des grands invalides, ainsi qu'aux aveugles et grands infirmes civils titulaires de la carte d'invalidité. Mais aussi pour celles affectées principalement à un usage professionnel. Cette réduction est limitée à un seul véhicule.
(12) Ce barème est quintuplé pour les bateaux de plaisance battant pavillon d'un pays ou territoire qui n'a pas conclu avec la France de convention d'assistance administrative en vue de lutter contre la fraude et l'évasion fiscales.
(13) Cette limite est relevée chaque année dans la même proportion que la limite supérieure de la première tranche du barème de l'impôt sur le revenu.