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Les 27 adoptent formellement le Pacte européen sur l'immigration et l'asile

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Réunis à Bruxelles les 15 et 16 octobre, les chefs d'Etat et de gouvernement des 27 Etats membres de l'Union européenne (UE) ont adopté formellement le Pacte européen sur l'immigration et l'asile proposé par la France, qui énonce un certain nombre de principes fondamentaux symboliquement forts mais sans valeur juridique contraignante... et dont la déclinaison en actions concrètes devrait prendre plusieurs années (1).

Ce pacte, qui soulève l'inquiétude du secteur associatif (voir ce numéro, page 49) et dont Nicolas Sarkozy avait fait l'un des principaux objectifs de la présidence française de l'UE, avait déjà fait l'objet d'un accord entre les ministres européens chargés des politiques d'immigration et d'asile, le 25 septembre dernier (2). Selon les conclusions du sommet de Bruxelles, il « constitue désormais pour l'Union et ses Etats membres le socle d'une politique commune de l'immigration et de l'asile, guidée par un esprit de solidarité entre Etats membres et de coopération avec les pays tiers ». Une politique commune qui, indiquent-elles encore, « doit reposer sur une bonne gestion des flux migratoires, dans l'intérêt non seulement des pays d'accueil mais également des pays d'origine et du migrant lui-même ». « Il s'agit de mieux organiser l'immigration légale, de désorganiser l'immigration clandestine, de renforcer l'efficacité des contrôles aux frontières de l'Union, de bâtir l'Europe de l'asile et de se concerter davantage avec les pays source d'immigration », résumait, quant à lui, Brice Hortefeux le 15 octobre à l'AFP.

Pour emporter l'adhésion des autres Etats membres, le ministre français de l'Immigration aura dû, au gré des négociations avec les capitales européennes, remanier le texte initialement proposé à ses partenaires. C'est ainsi que, sous la pression des Espagnols, l'obligation faite à chaque Etat membre de « renoncer » aux régularisations massives et collectives a disparu au profit d'une formule plus conciliante : il s'agira pour les Etats membres de « se limiter à des régularisations au cas par cas et non générales, dans le cadre des législations nationales, pour des motifs humanitaires ou économiques ». Autrement dit, l'engagement de ne pas pratiquer de régularisations massives demeure mais apparaît de façon moins impérative.

Madrid n'était pas non plus partisan du contrat d'accueil et d'intégration que Paris voulait rendre obligatoire pour les immigrés entrant dans l'Union européenne. Un contrat incluant « l'impératif » pour ces étrangers d'apprendre la langue du pays d'accueil et d'adopter les « valeurs européennes ». Dans sa version finale, le pacte invite simplement les Etats membres à « mettre en place, selon les procédures et avec les moyens qui leur paraîtront adaptés, des politiques ambitieuses pour favoriser l'intégration harmonieuse, dans leur pays d'accueil, des migrants ayant la perspective de s'y installer durablement ». Dans ce cadre, les partenaires devront prévoir « des mesures spécifiques pour favoriser l'apprentissage de la langue et l'accès à l'emploi ». Ils devront également mettre « l'accent sur le respect des identités des Etats membres et de l'Union européenne, ainsi que de leurs valeurs fondamentales telles que les droits de l'Homme, la liberté d'opinion, la tolérance, l'égalité entre les hommes et les femmes et l'obligation de scolariser les enfants ».

Il reste que, malgré les modifications apportées au texte initial, la France aura bien, avec le pacte, réussi à imposer sa vision, en particulier sur la question de la gestion des flux migratoires. S'agissant de l'immigration légale, les Etats membres restent bien évidemment souverains pour décider des conditions d'admission sur leur territoire des migrants légaux et fixer leur nombre, le cas échéant. Mais ils sont tout de même invités à appliquer une politique d'immigration choisie. Et ainsi à mettre en oeuvre, dans le respect de l'acquis communautaire et de la préférence communautaire, « avec les moyens les plus appropriés », des politiques d'immigration professionnelle « qui tiennent compte de tous les besoins du marché du travail de chaque Etat membre ». Il s'agira également de « renforcer l'attractivité de l'Union européenne pour les travailleurs hautement qualifiés et de prendre de nouvelles mesures pour faciliter davantage l'accueil des étudiants et des chercheurs, et leur circulation » en Europe. Parallèlement, afin de « mieux réguler l'immigration familiale », les Etats sont invités à prendre en considération dans leur législation nationale, dans le respect de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'Homme et des libertés fondamentales, non seulement leurs propres capacités d'accueil mais aussi « les capacités d'intégration des familles appréciées au regard de leurs conditions de ressources et de logement dans le pays de destination ainsi que, par exemple, de leur connaissance de la langue de ce pays ».

En matière de lutte contre l'immigration irrégulière et de contrôle aux frontières, les Etats membres s'accordent autour de plusieurs principes : la conclusion d'accords de réadmission - soit au niveau communautaire, soit à titre bilatéral - « avec les pays [d'origine] pour lesquels cela est nécessaire », de sorte que « chaque Etat membre dispose des outils juridiques pour assurer l'éloignement des étrangers en situation irrégulière » ; le développement d'une coopération entre partenaires européens, en ayant recours à des dispositifs communs pour assurer l'éloignement des clandestins tels que l'identification biométrique ou bien encore les vols conjoints ; l'enregistrement électronique des entrées et sorties de l'UE à partir de 2012, « assorti d'une procédure facilitée pour les citoyens européens et d'autres voyageurs » ; la généralisation au plus tard au 1er janvier 2012 des visas biométriques pour entrer dans l'Union ; le renforcement des moyens de l'agence Frontex afin que celle-ci exerce pleinement sa mission de coordination dans la maîtrise de la frontière extérieure, l'approfondissement de la coopération avec les pays d'origine ou de transit afin de renforcer le contrôle de la frontière extérieure, en accroissant l'aide de l'Union européenne pour la formation et l'équipement de leurs personnels chargés de la maîtrise des flux migratoires, etc.

Au chapitre de l'asile, les 27 s'engagent dans le pacte à mettre en place en 2009 un « bureau d'appui européen » dont la mission sera de « faciliter les échanges d'informations, d'analyses et d'expériences entre Etats membres et de développer des coopérations concrètes entre les administrations chargées de l'examen des demandes d'asile ». Ce bureau, indique le texte, « ne sera doté ni d'un pouvoir d'instruction, ni d'un pouvoir de décision ». Il « favorisera, sur le fondement d'une connaissance partagée des pays d'origine, la mise en cohérence des pratiques, des procédures et, par voie de conséquence, des décisions nationales ».

La Commission européenne sera par ailleurs, indique le pacte, invitée à présenter des propositions « en vue d'instaurer, si possible en 2010 et au plus tard en 2012, une procédure d'asile unique comportant des garanties communes », mais aussi en vue « d'adopter des statuts uniformes de réfugié, d'une part, et de bénéficiaire de la protection subsidiaire, d'autre part ».

Signalons encore que l'accord prévoit aussi la mise en place, en cas de crise dans un Etat membre confronté à un afflux massif de demandeurs d'asile, de procédures permettant la mise à sa disposition de fonctionnaires d'autres Etats membres et « l'exercice [à son] profit d'une solidarité effective par une meilleure mobilisation des programmes communautaires existants ».

Notes

(1) Document disponible sur www.ue2008.fr.

(2) Voir ASH n° 2566 du 11-07-08, p. 28 et n° 2575 du 3-10-08, p. 10.

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