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Droit au logement opposable : le comité de suivi relève des difficultés aiguës dans plusieurs départements

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Après avoir - vainement - attendu une date de remise officielle au gouvernement, le comité de suivi de la mise en oeuvre du droit au logement opposable (DALO) a décidé de rendre public son deuxième rapport annuel (1). Il y dresse un premier bilan huit mois après l'ouverture, pour les personnes mal logées, d'un recours amiable au 1er janvier et en attendant celle, le 1er décembre prochain, d'un recours contentieux réservé aux personnes qui sont dans les situations les plus critiques. « Le DALO est en marche », estime le comité, mais « pour qu'il bénéficie effectivement à tous ceux de nos concitoyens qui en ont besoin, il est maintenant nécessaire de tirer toutes les conséquences d'une obligation de résultat dont l'Etat est le garant ». Notamment en mettant sur la table davantage de moyens, en particulier dans les départements qui connaissent une situation de crise exceptionnelle.

La procédure de recours amiable est opérationnelle

Premier constat : « la procédure de recours amiable est opérationnelle et a commencé à produire ses effets ». Chargées de se prononcer sur le caractère prioritaire de la situation des demandeurs, les commissions de médiation - qui ont été mises en place dans chaque département, conformément à la loi - ont ainsi reçu plus de 40 000 demandes entre les mois de janvier et août 2008 et en ont traité la moitié (2).

Dans le détail, elles ont désigné comme prioritaires, aux préfets, près de 9 000 demandeurs : environ 8 000 en vue d'un relogement et 1 000 en vue d'un hébergement. Un peu plus de 2 000 d'entre eux ont d'ores et déjà fait l'objet d'une offre de logement ou d'hébergement. A noter également : sur les quelque 20 000 demandes examinées, près de 770 ont été jugées sans objet, les demandeurs ayant obtenu satisfaction avant le passage en commission. Aussi et surtout, un peu plus de 8 000 ont été rejetées, soit un taux de rejet important (47 %).

L'information et l'accompagnement des demandeurs mis en cause

« Si la procédure est en place, beaucoup reste à faire pour que le recours soit effectivement rendu accessible à tous ceux qui en ont besoin », souligne le rapport. Mis en cause : le manque d'information et d'accompagnement des demandeurs en amont. L'importance du taux de rejet est déjà, en soi, un indicateur. Il révèle en effet une mauvaise orientation de certaines personnes vers les procédures de recours. « Les critères qui permettent de faire un recours sans attendre le délai anormalement long sont très sélectifs, ce qui est logique dans une première phase, et il peut y avoir un décalage entre ces critères et la situation ressentie par les demandeurs », explique le rapport. A l'inverse, de nombreux mal-logés restent en dehors de la procédure, faute de disposer des informations et du soutien nécessaire pour entreprendre une démarche qui est de nature très différente de la simple demande de logement (3).

Le comité de suivi appelle donc l'Etat à organiser avec ses partenaires l'information des personnes concernées dans chaque département, comme la loi le prévoit. Problème : cette information « est encore très insuffisante ». Les intervenants sociaux, notamment, devraient en constituer des relais. « Or c'est encore très peu souvent le cas, beaucoup de travailleurs sociaux ignorant eux-mêmes les critères et la procédure du DALO », note le comité. L'article 6 de la loi DALO a certes intégré la promotion du droit au logement parmi les objectifs de la formation des travailleurs sociaux. Mais cette prise en compte ne produira ses effets que sur le long terme. En attendant, « l'urgence commande de s'interroger sur la formation dispensée dans le cadre de la formation continue depuis le vote de la loi », estiment les experts, qui plaident pour que les départements veillent à ce que chaque travailleur social ait reçu une formation d'au moins une journée sur le DALO d'ici à la fin de l'année 2008, en s'appuyant par exemple sur les agences départementales pour l'information sur le logement.

Le comité insiste également sur le rôle d'accompagnement que les associations d'insertion ou de défense des personnes défavorisées ont à jouer auprès des demandeurs. Il suggère notamment que les préfets prennent le soin de dégager des crédits suffisants « pour rémunérer, au cas par cas, l'intervention d'opérateurs associatifs notamment en faveur des personnes ayant déposé un recours par elles-mêmes et pour lesquelles l'instruction révèle un besoin d'approfondissement et/ou d'accompagnement pour la mobilisation des dispositifs de droit commun ».

Au-delà, il demande que, dans les départements qui reçoivent le plus de demandes, des moyens exceptionnels soient dégagés pour l'instruction des dossiers. « Il n'est pas normal que des demandeurs n'aient pas reçu d'accusé de réception de leur demande au bout de trois mois comme c'est le cas aujourd'hui en Ile-de-France et dans les Bouches-du-Rhône », indique le rapport.

Une très forte territorialisation des recours

Autre constat : la géographie des recours enregistrés fait apparaître des situations très contrastées. En effet, alors que, d'un côté, les trois quarts des départements enregistrent moins de 200 demandes (soit moins de 25 par mois), de l'autre, les chiffres témoignent d'une situation « tendue » dans 11 départements (4) et surtout « critique » dans 16 autres, indique le rapport. 25 600 recours ont ainsi été déposés dans les huit départements d'Ile-de-France, dont 9 200 pour Paris. Les commissions des quatre départements du pourtour méditerranéen - les Alpes-Maritimes, le Var, les Bouches-du-Rhône et l'Hérault - ont pour leur part reçu chacune plus de 600 recours. Le comité de suivi s'inquiète également de la situation dans les quatre départements d'outre-mer, « où les chiffres sont encore modestes mais qui connaissent un manque de logements abordables et une situation grave au niveau de l'habitat indigne ».

Dans tous ces départements en difficulté, les préfets connaissent ou risquent de connaître des problèmes pour reloger tous les ménages désignés par les commissions de médiation, estime le comité. « L'Etat pourrait [y] être condamné dès le 1er décembre 2008. » Cette condamnation pourrait toutefois être évitée... « à condition de s'en donner les moyens », précise-t-il, proposant notamment que l'Etat mette à la disposition de ces préfets un fonds spécial d'intervention DALO qui permettrait au moins, en l'absence de logements sociaux en nombre suffisant, « le financement d'ingénierie pour permettre l'application des procédures de sortie d'insalubrité, de médiation locative pour éviter une expulsion, d'aide à un propriétaire acceptant de conventionner un logement, etc. ». Le rapport suggère également, toujours dans ces départements en difficulté, que pour chacun d'eux, des objectifs de production de logements locatifs sociaux soient déclinés par commune pour les trois ans à venir.

Notes

(1) Document disponible sur www.hclpd.gouv.fr.

(2) Rappelons que, dans son premier rapport annuel, le comité de suivi de la loi « DALO » a évalué à 600 000 le nombre de ménages prioritaires susceptibles de faire valoir, à partir du 1er janvier 2008, leur droit au logement.

(3) Voir sur ce sujet l'initiative du Secours catholique et de la Fondation Abbé-Pierre, ce numéro, p. 43.

(4) Le Rhône, la Haute-Savoie, la Loire-Atlantique, les Alpes-de-Haute-Provence, le Nord, la Haute-Garonne, le Gard, l'Aude, la Corse-du-Sud, la Gironde et le Vaucluse.

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