Les associations de défense des droits des étrangers ont remporté une manche dans le bras de fer qui les opposent actuellement au ministère de l'Immigration à propos des nouvelles règles de fonctionnement des centres de rétention administrative (CRA) (1). Dans une décision rendue le 14 octobre, le tribunal administratif de Paris enjoint en effet à Brice Hortefeux de différer - jusqu'au 31 octobre au plus tard - la signature des contrats relatifs au « marché de service d'appui aux pouvoirs publics destiné à l'information des étrangers maintenus dans les centres de rétention administrative ». Autrement dit, le juge demande au ministère de ne rien signer, pour l'instant, avec les candidats répondant à l'appel d'offres lancé en septembre dernier pour mettre fin à la situation de monopole de la Cimade au sein des centres de rétention (2). Un appel d'offres qui, rappelons-le, ouvre les portes de ces établissements à de nouveaux intervenants mais aussi répartit les 22 CRA actuels en huit lots géographiques et modifie les conditions d'intervention des associations dans ces structures, les contraignant notamment à un devoir de « discrétion ». D'où son caractère controversé.
Le tribunal avait été saisi la veille de sa décision, en référé, par un groupement d'associations et de syndicats - le Groupe d'information et de soutien des immigrés (GISTI), la Ligue des droits de l'Homme, Avocats pour la défense des droits des étrangers, le réseau Elena France et le Syndicat des avocats de France -, qui invoquaient « un manquement aux obligations de publicité et de mise en concurrence auxquelles est soumise la passation de certains marchés publics ». En clair, les associations ont pointé plusieurs irrégularités, notamment la contradiction entre le texte du décret du 22 août 2008 portant réforme du dispositif d'aide aux étrangers dans les CRA et celui de l'appel d'offres consécutif, le premier prévoyant un accompagnement juridique des étrangers afin de leur permettre un accès effectif au droit tandis que le second évoque une simple permanence d'information.
La précision est importante : tout en enjoignant au ministère de - en quelque sorte - « geler » l'appel d'offres, le tribunal administratif ne s'est pas pour autant prononcé sur le fond, n'exprimant pas, par exemple, de doutes explicites sur sa légalité. Mais la requête des associations aura donc été prise suffisamment au sérieux pour conduire le juge à différer la conclusion du marché jusqu'au 31 octobre au plus tard. Le temps pour le tribunal d'entendre les observations du ministère puis de prendre une décision sur le fond. Ce jugement devrait intervenir « d'ici à une quinzaine de jours », selon l'avocat du GISTI. En attendant, l'appel d'offres n'est pas en soi suspendu et les intervenants potentiels ont toujours jusqu'au 22 octobre pour déposer leurs candidatures auprès des services de Brice Hortefeux, a souligné le ministère, le soir même, auprès de l'AFP.
(1) Voir en dernier lieu ASH n° 2575 du 3-10-08, p. 40.