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Recentrer le métier de conseiller d'insertion et de probation sur le champ pénal : une proposition controversée

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Les travaux engagés en juin dernier par l'administration pénitentiaire afin de répondre à la mobilisation des syndicats pour la revalorisation du métier de conseil-ler d'insertion et de probation (CIP) (1) touchent à leur fin. Isabelle Gorce, conseillère référendaire à la Cour de cassation, chargée de piloter une réflexion sur les « perspectives métier » et leurs conséquences en termes statutaires et indemnitaires, vient de remettre ses propositions pour « une définition du métier de conseiller d'insertion et de probation ». Selon une note du directeur de l'administration pénitentiaire du 1er octobre, les directeurs de service devaient présenter ces orientations aux agents et faire remonter le résultat des échanges avant le 8 octobre. Ses décisions définitives, elles, sont attendues pour le 20.

Reste que les préconisations de la magistrate, qui souhaite « positionner les CIP sur le champ pénal et criminologique » dans une logique de travail pluridisciplinaire au sein des services pénitentiaires d'insertion et de probation (SPIP), divisent les syndicats. Pas question, estime la CGT-pénitentiaire, qui appelle à des assemblées générales en région le 16 octobre, tout comme la CFDT-Interco, de limiter le travail des agents à cette dimension. Au contraire, favorable à cette orientation, le Snepap (Syndicat national de l'ensemble des personnels de l'administration pénitentiaire)-FSU souhaite tout de même quelques garanties et éclaircissements.

A l'instar du rapport de l'inspection générale des services judiciaires de 2006 (2), Isabelle Gorce estime que la multiplicité des tâches des agents ne favorise « ni une vision commune du métier, ni [sa] lisibilité à l'extérieur de l'administration pénitentiaire ». Les SPIP interviennent, en effet, en tant que services, à la fois sur le champ pénal et sur le champ social. Mais une fois réaffirmée cette double mission, « il est nécessaire de s'interroger sur la meilleure manière de la remplir, dans un contexte où la commande publique exige aujourd'hui un professionnalisme accru en matière de traitement de la délinquance et de prévention de la récidive ».

Sa proposition est claire : distinguer la mission des SPIP de celle des CIP, dont le métier serait recentré sur la préparation des décisions de justice, l'exécution des mesures de milieu ouvert, l'élaboration et le suivi du parcours d'exécution des peines, l'évaluation des risques de récidive et le travail sur le passage à l'acte. Les SPIP conserveraient néanmoins une mission d'accompagnement social, confiée aux assistants de service social. Intervenant en complémentarité avec leurs collègues CIP, ceux-ci leur apporteraient leur expertise en matière sociale et faciliteraient les liens des SPIP avec les partenaires de droit commun compétents.

Cette partition des tâches, estime Isabelle Gorce, « équivaut moins à une diminution de la sphère d'intervention des CIP qu'à une élévation générale du niveau d'intervention des services en direction des publics ». Elle suggère également que les services se dotent de compétences spécifiques, notamment pour la mise en oeuvre d'actions socioculturelles, et puissent bénéficier de l'appui de psychologues. Certaines personnes suivies ne justifiant pas de prise en charge éducative ou sociale majeure, précise-t-elle, le contrôle de leurs obligations, la réalisation de certaines enquêtes et le suivi de mesures engageant des partenaires (comme les travaux d'intérêt général) « pourraient être assurés par des person-nels de surveillance spécifiquement affectés dans ces services ». Autre suggestion : revoir qui, du SPIP ou de l'établissement, prend en charge l'ensemble des demandes ponctuelles faites en milieu fermé, comme les demandes d'aide matérielle ou celles concernant les relations au quotidien avec les familles. « Un service dédié dans les établissements pourrait assumer cette charge à un premier niveau », explique-t-elle sans plus de précision, ou assurer une fonction d'orientation des demandes.

Mais les préconisations de la magistrate ne disent rien des conséquences de cette redéfinition sur la revalorisation statutaire et indemnitaire des CIP, sujet pourtant au coeur des travaux engagés. La CGT-pénitentiaire dénonce, en plus d'une consultation précipitée, « l'odieux chantage de l'administration qui, sans évoquer l'évolution indiciaire, laisse entendre que l'acceptation d'un nouveau métier est la condition sine qua non d'une revalorisation de leur rémunération ». Sur le fond, elle considère que l'insertion sociale constitue l'essence du métier des CIP et refuse la différenciation entre les missions de ces derniers et celles des assistants sociaux. Les personnels devront déterminer s'ils veulent « épouser la profession de criminologue clinicien chargé des aménagements de peine », prévient l'organisation.

Le Snepap-FSU juge au contraire que les deux métiers sont distincts, mais que cela ne conduit pas les CIP « à ne plus prendre en compte l'individu et ses problématiques sociales, familiales et professionnelles ». Selon lui, ces agents doivent pouvoir bénéficier de l'appui technique des assistants de service social, l'objectif étant « l'intervention directe des services de droit commun auprès des personnes détenues », et rester le référent unique de chaque personne suivie. Outre des engagements de l'administration sur le volet statutaire, il attend des réponses sur l'impact de cette pluridisciplinarité sur les recrutements à venir.

Notes

(1) Voir ASH n° 2565 du 4-07-08, p. 29.

(2) Voir ASH n° 2499 du 23-03-07, p. 29.

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