Cette disposition avait suscité peu d'émoi avant que le Groupe d'information et de soutien des immigrés (GISTI) (1) ne saisisse la HALDE (Haute Autorité de lutte contre les discriminations et pour l'égalité), le 11 septembre. « Bien que son exposé des motifs affirme que la fusion du RMI [revenu minimum d'insertion] et de l'allocation de parent isolé [API] se fera à «droit constant», les conditions d'attribution, s'agissant des étrangers, sont encore plus restrictives que celles applicables aux actuels bénéficiaires du RMI », explique l'association.
Pour bénéficier du revenu de solidarité active (RSA), souligne-t-elle, les étrangers non communautaires devront, en l'état actuel du projet de loi examiné au Parlement, être titulaires depuis au moins cinq ans d'un titre de séjour les autorisant à travailler. Les réfugiés et apatrides, les titulaires de la carte de résident de dix ans et les personnes qui répondent à la condition de régularité de séjour pour l'attribution de l'API sont dispensés de cette exigence. Ne seront donc pas éligibles, en déduit Antoine Math, membre du GISTI, « les familles d'enfants scolarisés régularisées il y a deux ans, pourtant aussi méritantes que les autres ». Ce critère d'attribution s'applique aussi au conjoint, concubin ou partenaire « pacsé ». En outre, s'agissant de la prise en compte des enfants, les règles sont alignées sur celles des prestations familiales, ce qui revient à continuer à exclure ceux venus hors du regroupement familial.
Dans une réponse mise en ligne sur son blog sur le RSA (2), Martin Hirsch dément, fiche juridique à l'appui, que le RSA soit plus restrictif pour les étrangers que les minima sociaux auxquels il se substitue. « Nous avons pris soin de ne pas modifier, à l'occasion de la création du RSA, les conditions d'accès actuellement prévues par les textes en vigueur », affirme le Haut Commissaire aux solidarités actives contre la pauvreté.
Un tel argument fait fi des textes internationaux et réglementaires, ainsi que de la jurisprudence, rétorque le GISTI. Certes, le projet de loi reprend les dispositions actuelles, en les simplifiant, concernant le demandeur : celui-ci doit justifier d'un titre de séjour de un an autorisant au travail et remplir en même temps les conditions de demande d'une carte de résident, soit cinq ans de séjour avec droit au travail. Mais cette exigence de durée de résidence préalable a été condamnée par le Comité européen des droits sociaux du Conseil de l'Europe, comme par la Cour de justice des communautés européennes. Autre oubli : pour les ressortissants de certains pays (Algérie, Mali, Maroc, Sénégal...), cette exigence est « seulement » de trois ans. Quant aux concubins et conjoints, « il n'y a rien dans le code de l'action sociale et des familles les concernant, mais les circulaires leur imposent uniquement de justifier d'un titre de séjour de un an », ajoute Antoine Math. Enfin, la Cour de cassation et la HALDE ont reconnu comme discriminatoire, car contraire à la Convention européenne des droits de l'Homme et à la Convention internationale des droits de l'enfant, la non-prise en compte des enfants arrivés hors du regroupement familial. « Des recours sont constamment gagnés par les familles devant les tribunaux », témoigne Antoine Math. Le Haut Commissariat a indiqué, rapporte-t-il, qu'il s'attacherait à tenir compte de certains textes non législatifs par voie réglementaire.
(1) GISTI : 3, villa Marcès - 75011 Paris - Tél. 01 43 14 84 84.
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