Le président délégué du Conseil d'analyse de la société, Luc Ferry, a remis le 10 septembre au président de la République un rapport dans lequel il propose la mise en place progressive d'un « service civique volontaire » (1). Il répondait à une commande du chef de l'Etat qui, en mars dernier et alors qu'un service civil volontaire existe déjà pour les jeunes de 16 à 25 ans afin de leur permettre d'acquérir une formation civique ou professionnelle (2), lui avait demandé de plancher sur les conditions de mise en place d'un service civique qui engagerait les jeunes à s'investir dans des activités d'intérêt général (3). « Ce service devra-t-il être volontaire ou obligatoire ? A qui s'adressera-t-il exactement ? Quel contenu lui donner si l'on veut qu'il suscite l'intérêt des jeunes et non une réaction de rejet ? Quelle durée lui fixer ? Et quel en sera le coût ? » Telles sont les questions auxquelles l'ancien ministre de l'Education nationale s'est efforcé de répondre.
Luc Ferry a examiné trois hypothèses. La première consisterait en « un service civique universel et obligatoire qui viendrait en quelque sorte prendre la place du défunt service militaire » et aurait une durée de six mois en continu. Seconde hypothèse : un service civique lui aussi obligatoire mais fractionné en périodes d'une durée variable selon les tâches à remplir et la disponibilité des jeunes. Enfin, la troisième envisagerait un service civique volontaire qui, à la différence de celui actuellement en vigueur, prendrait, grâce à un nouvel engagement de l'Etat mais aussi des collectivités territoriales et de la société civile, une dimension telle qu'il pourrait concerner environ 10 % à 20 % d'une tranche d'âge. Soit, grosso modo, entre 60 000 et 120 000 jeunes contre 2 700 environ pour l'actuel service volontaire.
L'ancien ministre penche pour cette troisième solution. En effet, malgré une préférence personnelle pour un service civique obligatoire, il a indiqué y avoir « renoncé » en raison de son coût, estimé entre 3 et 5 milliards d'euros par an. Mais pas seulement. En effet, « le sujet de fond, c'est qu'on n'a pas les postes à offrir et il faut éviter l'écueil des stages polycopie-café [...]. Une classe d'âge, c'est 750 000 jeunes [...], on n'a pas 750 000 postes par an à leur offrir », a-t-il insisté devant la presse. Concrètement, le président délégué du Conseil d'analyse de la société propose la mise en place d'un service volontaire permettant la mobilisation, pour une durée de six mois consécutifs, de jeunes de 18 à 25 ans « sur des projets d'intérêt public », moyennant une bourse de 650 € mensuels. Ces jeunes bénéficieraient d'un système de valorisation des acquis. Le rapport suggère également la mise en place d'une « fondation » chargée d'« habiliter les associations qui vont accueillir les intéressés » mais aussi de « sélectionner les projets pour être bien certain qu'il s'agit de projets d'intérêt général et non pas d'intérêt privé ».
Luc Ferry a indiqué que Nicolas Sarkozy ne lui avait pas annoncé de calendrier pour l'entrée en vigueur d'un nouveau dispositif. « On va se réunir avec lui en interministérielle dans les trois semaines ou dans le mois qui vient et on verra après », a-t-il précisé.
(1) Pour un service civique - Luc Ferry avec le Conseil d'analyse de la société - Rapport au président de la République - Septembre 2008 - Editions Odile Jacob - 18 € .
(2) C'est la loi pour l'égalité des chances du 31 mars 2006 qui a institué ce dispositif, après les émeutes de l'automne 2005 dans les banlieues - Voir ASH n° 2451 du 14-04-06, p. 19.
(3) C'était une des promesses de campagne de Nicolas Sarkozy : la création d'un service civique de six mois pour les jeunes de 18 à 30 ans, effectué en une fois ou fractionné, à temps plein ou à temps partiel, réalisé en France ou à l'étranger, dans toute activité revêtant un caractère d'intérêt général et qui deviendrait obligatoire « après une expérimentation à grande échelle ».